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J\'agonise, yo!
poèmes [ Urban ]
Poème légèrement antipro bucharestois

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par [Iondanu ]

2005-08-18  |     | 




J’agonise, yo !

J’agonise agonisant
parmi poètes et poétesses,
parmi mots et images, doutes et illuminations,
moniteurs et claviers, comme un demi-noyé,
se débattant, essayant de s’en sortir,
s’accrochant à une paille,
à une métaphore, à quelque chose, je donne
mon royaume pour une paille, agonisant, agonisé…

Oh, laif iz a beeech an den iu dai,
dit-il, poète de pacotille, mélangeant ses
langues, ses mots, ses images jusqu’au moment où,
luttant à mains plates, dans des batailles féroces
avec Mihai le brave et le, ô, combien intelligent !
plein d’idées et de citations, parmi des
poétesses violées par le sens giratoire de l’absurde,
si absurde que tu as envie
d’agoniser une fois pour toutes…

Des nymphomanes, des crétins, de vrais génies,
blessés, implorant avec leurs mains tendues
les vivandières en rouge, de vraies amazones
de l’Armée du Salut, avec le bâton de maréchal
dans le « turbinca » d’Ivan, chantant
à la trompette et au trombone
l’aria de Verdi par Aide...
Voyons donc, qui veux-tu duper ?

Oh, l’envol chaotique et ordonné des
flocons de neige, une nuit d'orage, quand
tu attends le retour d'une vierge de quinze ans,
qui boit de la bière, rote et prends de l’xtasy,
quand elle en a.
Hiver, j’espérais que tu ne reviendrais pas…

Oh, artistes, mes frères, je ne suis pas soûl,
même si Verlaine le recommandait chaleureusement,
où c’était Baudelaire ? syphilitique, agonisant lui-aussi,
comme il peut, cheveux teints en vert,
et toutes les fleurs du mal putrides autour
de sa sensibilité gangrenée, avec le monstre
apocalyptique près de lui,
post-coïum omni animalum, ou c’était animali ?
l’important est que c’est triste, très triste, aussi triste
que l’envie me vient de pleurer et de gueuler,
toutes ces agonies agonisantes partout
dans cette ville pourrie, pleine de
putes et de poètes….

Heureusement, des fois je vois s’envolant,
par-dessus océans et pays, quelque chose comme
l’Oeil-aérostat de Redon, une lueur démente,
dans le globe exorbité d’un frère artiste, poète
à ses heures, un qui voit des araignées au plafond,
un peu maboul mais, plein des môts brillants,
expressifs, folâtres, des mots aussi beaux
que la nuit étoilée de mon Hollandais volant
parmi les étoiles, Martin London ou Jack Eden,
je sais plus, avec une balle perdue dans la région
mortelle qu’on appelle cœur de lion, rançonné
pour de lourdes pièces d’or, plus lourdes,
beaucoup plus lourdes que les « paraii »
qui donnent une nuance verdâtre, putride,
à l’ancienne ville agonisante agonisée
par les philistens et les philistins,
par les maquereaux et les gitans superponderaux,
avec aux doigts des énormes bagues
d’or ottoman qui crèvent les yeux des poètes,
des pauvres, et des présidents qui décollent
vers Targovishte, pac ! pac !
des héros conspués, meurtris, brûlés
à la cigarette parce que quelqu’un a utilisé le mot
"terroristes", des "terroristes", un mot que
ce n’est pas les Roumains
qui l'ont inventé mais utilisé, avant Bush
et ses bushismes qui agonisent
le Moyen-Orient dont je me fous, pas mal…

Cette ville a des millions des visages,
quelques milliers agonisent chaque jour,
régulièrement,
chaque nuit qui naissent les monstres de Goya,
qui ne sont rien comparés à nos monstres à nous,
violeurs et pédophiles, assassins,
tu vas te les mettre tous à dos,
ils & elles vont agoniser sur toi,
et tu les insulte, en disant que leur ville
est pleine de poètes (parce que les putes, ça fait partie
de l’économie de marché, n’est-ce-pas ?)
Et pourtant, cette ville-là, qui a des millions
de visages, elle a aussi Hobana qui écrit
sur les châteaux de Verne dans les Carpates,
et Cosashu qui raconte comment,
pour arriver aux petites culottes d’une fillette
de son âge et amadouer les voyous qui le terrorisaient,
il leur racontait en technicolor des histoires de films,
des histoires si captivantes qu’ils oublient
de le terroriser et ils en redemandent,
sans oublier Nae Caranfil,
il est pericoloso sporghersi de réveiller en toi
des si dangereux souvenirs utecistes,
mais c’était la mode, quoi…
Et il y a aussi Mironov qui est un esco, mais
bon garçon, bon cœur, et je crois que je l’aime parce qu’il
nous a fait voir
Jersey & Guernesey et même Paris, où j’ai habité
trois-quatre jours à l’Hôtel de l’Homme Fleuri,
rue de la Gaieté, rue louche,
mais je ne le savais pas,
sortant le jour seulement et où la porte du WC
ne fermait pas
comme tu ne peux pas enfermer tes souvenirs
les agonisants, douloureux souvenirs,
tout comme tu ne parais pas capable de clore
ce poème qui s’agonise en longueur, s’amollissant comme
les montres de Dali, Dali, le clown avec la méthode
paranoïaque et Gala nue, agonisante, elle aussi,
spectaculaire, médiatiquement morte
en pleine lumière de la rampe,
comme la chèvre du voisin qui doit mourir aussi
parce que personne, je répète, personne,
ne devrait agoniser plus de 17 syllabes
ou 13 vers ? je n’en sais plus parce que
je n’ai pas haikoué depuis longtemps
et puis vous comprendrez sans doute…

De toute façon, cette agonie est insupportablement
longue, mais ça ce n’est pas Terri Shaivo ! la pauvre,
et mon cerveau n’est pas encore mush,
je disais, elle est beaucoup trop long, cette foutue
agonie, ça devient de plus en plus énervant, troublant
et chiant,
ça c’est le mot québécois pour merdique,
le mot que le général Cambronne aimait répéter
quand il a découvert,
dans la douce langue de Shakespeare que
Laif iz a beeech an den iu dai...

Je ferme, je la ferme ici, mon long poème
agonisant, un peu, une idée trop, antipro
bucharestois et je vous invite tous
dans l’Agonisateur central.
Venez voir vaincre,
comme moi, le poète peintre,
où le peintre poète ?
je vous donne
mon dernier soupir.


Dan Iordache,

17 08 05, Sherbrooke

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