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Liberté d\'expression
essai [ ]

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par [kerven ]

2005-02-15  |     | 



La Liberté d'expression en danger ?
( Mon intervention au congrès des radios locales)

Je ne suis ni un spécialiste des radios associatives ou commerciales, ni un journaliste ni un historien ni un sociologue, mais un auteur confronté à tous les moyens d'expression et à tous les supports de communication depuis une quarantaine d'années ce qui m'a conduit à observer et à subir souvent et de plus en plus les nouveaux freins mis à la liberté d'expression.
Ces difficultés, je les ai abordées depuis le moment où la France était un pays sous le joug totalitaire, jusqu'à ce jour dit du libéralisme. Mais je me contenterai de tenter de faire le point sur les problèmes actuels de ceux qui, comme nous, ont à parler et à communiquer et se rendent compte combien, malgré les performances des nouvelles technologies, paradoxalement, cela peut devenir de plus en plus difficile.

"On a dit: En démocratie, la liberté c'est non seulement de pouvoir faire ou dire tout ce qui n'est pas interdit par la loi, mais de pouvoir faire ou dire également tout ce que la loi n'avait pas prévu."
Or, la liberté d'expression, dans toutes les époques, a charrié par vocation la nouveauté, la création, la critique de l'ordre établi et souvent la révolte, bref ce que la loi ne pouvait avoir prévu. Porteuse de liberté par définition la liberté d'expression fait souvent partie en démocratie de ce que la loi n'interdit pas en principe, mais qui va déranger tous les pouvoirs établis en posant les questions inattendues et impertinentes. Aucun pouvoir, même démocratique, n'aime cet inattendu qui, tôt où tard, finit par alimenter une opposition.
Dans nos pays démocratiques, toute expression qui n'est pas interdite par la loi est en principe admise, c’est vrai, mais tout se gâte quand le pouvoir théorique de l'état et ses lois ne sont plus le pouvoir réel, ce qui devient de plus en plus souvent le cas. Cette liberté d'expression s'affronte maintenant à des adversaires beaucoup plus puissants et déterminés que nos politiques. Ces pouvoirs sont d'autant plus puissants que la plupart du temps ils sont anonymes.
Tel ou tel pays de démocratie avancée où la liberté totale d'expression est dans les textes va se trouver sous la tutelle bien réelle et omniprésente des propriétaires des organes de presse ou des multimédias à l'échelon mondial dont le soucis n'est pas d'informer le bon peuple mais de lui communiquer de façon plus ou moins ouverte sa publicité ou sa propagande. On aura ainsi des journaux dits de gauche dont les propriétaires sont d’une droite pure et dure. Les journalistes vont devoir pratiquer une auto censure larvée et silencieuse, s'habituer par exemple à ne plus déterminer de hiérarchie entre les événements en privilégiant le sensationnel et ignorant le quotidien, à supporter que leurs articles soient publiés face à une publicité qui affiche le contraire, et surtout à ne plus travailler que sous la dictature du court terme et pour lui. Quand, témoin direct d'une événement vous vous apercevez à la lecture que ce qu'en rapporte la presse la plus crédible est tronqué, désorienté, détourné, sensationnalisé, pour mieux faire passer la publicité qui précède ou suit en flattant le goût du public, vous pouvez toujours vous plaindre au journaliste. Il vous répondra si jamais il le fait, qu'on ne lui avait pas laissé le temps de contrôler ses informations et il ne se sentira pas coupable. Malheur à celui à cause duquel son journal sa radio ou sa télé n'auraient pas été le premier à faire son scoop. On voit là que pour la liberté d'expression dans ce domaine des médias, l'argent et son corollaire impératif l'extrême rapidité de l'information ne sont pas copains avec la réalité des événements. La liberté d'expression n’est plus qu’une façade .
Quand on vous annonce sur notre grande radio nationale que l'interview que vous entendez est en direct du sommet himalayen du Daulaghiri et que vous, au pied dudit sommet, vous avez la preuve qu'il a été enregistré dans un studio de Katmandou et retransmis en différé vous pourrez toujours protester dans le vide.

Mais laissons là l'information, qui n'est pas mon domaine. C'est la liberté d'expression dans le culturel qui me concerne le plus et pour vous aussi c'est je crois un élément important. Il s'agit du culturel dans le sens le plus large et non celui de discussions d'intellectuels branchés. On aurait pu espérer que dans ce domaine au moins, on serait libre de créer et de montrer ou de faire entendre ce qu'on a créé. Or, quand on est dans le bain, on s'aperçoit que même en démocratie notre liberté d'expression artistique et culturelle est loin de ce qu'elle prétend être dans les vitrines à paillettes de la république. Mais tous ceux qui connaissent cette réalité, étant donné la concentration des pouvoirs dans ce domaine ont tout intérêt à se taire s'ils veulent garder les quatre sous nécessaires à faire fonctionner leur petite machine à créer et garder des chances de la diffuser. La manne n'est pas distribuée au hasard et pas toujours à la qualité.
Pour mieux comprendre ce décalage il faut chercher, derrière la libéralité de principe de tout faire et de tout dire, où est le pouvoir culturel réel, ce qu'il impose aux créateurs et comment il manipule les goûts et donc la demande, tout en brandissant bien haut l'étendard de la liberté. Il faut voir comment il se moque de toute légalité en achetant à prix d'or des entreprises illégales comme le groupe Bertelsmann avait mis la mains sur Napster pour des centaines de millions de dollars, ou Vivendi avait acquis MP3.com. Il s'agissait dans les deux cas de transformer "les bandits de grands chemins en voyous à col blanc."
Ainsi, le pouvoir politique légal qui proclame notre liberté de création va se retrouver bien faible face au pouvoir économique du rendement à court terme d'autant plus puissant qu'il est à la fois occulté et décuplé par l'usage des technologies de communication qui donnent des moyens de conditionnement du public d'une puissance jamais égalées.
De temps en temps il faut bien que ce pouvoir qui adore agir en secret se montre au grand jour, comme par exemple avec l'AMI heureusement mise en brèche à Seattle. Avec l'AMI, par accord mutuel international, tout produit culturel ne serait plus légalement qu'une marchandise obéissant aux strictes lois du marché et donc des spéculations à court terme, et où l'auteur n'aurait plus aucun droit ni regard sur l'œuvre une fois vendue. Plus de propriété morale. Le créateur ronchon sera mis sur la touche et ne pourra plus s'exprimer que sur des filières confidentielles et marginales. De plus il y aurait avec l'AMI égalité théorique de traitement sur un territoire donné entre les produits culturels étrangers et les produits nationaux. Il faudrait que la France subventionne les films américains créés sur notre territoire au même titre que nos films français. Du coup, le contenu de la création culturelle ne garderait qu'une importance limitée devant le critère de sa valeur marchande ajoutée immédiate. La liberté d'expression et de création aurait fini de disparaître derrière une façade d'apparence libre et en réalité spéculative. Comme le disait crûment un des grands patrons de l'édition aux Etats unis. *Je suis pour la disparition des auteurs *et un autre: * la culture est d'un trop bon rendement économique pour la laisser entre les mains des intellectuels* On ne s'étonnera pas que beaucoup de grands auteurs américains, et Dieu sait si ce pays en est riche, se tournent vers Europe pour se défendre et les défendre.
Si nos grandes maisons d'édition réussissaient leur projet politico commercial, les auteurs, quel que soit leur support matériel de diffusion devraient calibrer leurs produits, ce qui aboutirait à un sous-salariat. La libre expression serait celle des marchés et donc de la commande. Le vrai comité de lecture des collections serait leur bilan de rentabilité. Le silence des médias, la censure occulte de la grande distribution et les droits d'auteur ridicules limiteraient tout produit perturbateur. Si d'aventure il avait quand même du succès l'auteur serait récupéré par le système. On en ferait le best seller d'un été, puis on le laisserait tomber dans l'oubli ou on lui offrirait un strapontin dans la boutique.

Ce qui semble une vision catastrophiste n'est malheureusement qu'une haute probabilité d'évolution et est déjà mis en place dans certains grands pays car les règles économiques mondiales sont implacables et ceux qui en profitent encore plus. La France a échappé avec l'exception culturelle à une mainmise trop brutale, mais il suffit de regarder de près ce qui se met en place dans la concentration de nos grandes maisons d'édition en France que, comme auteur, je connais depuis longtemps, pour voir comment fonctionne la reprise en mains sournoise, par petites avancées significatives, du marché de la création littéraire et donc de son contenu.

Il peut être intéressant de démonter les moyens spécifiques et foncièrement originaux de la prise de pouvoir des capitaux désormais mondialisées sur la diffusion des idées et de la culture en général.
Les modes ont toujours existé, même si on peut discuter de leur utilité, mais il ne s'agit plus actuellement de modes mais d'un conditionnement systématique du public et des lecteurs par des experts et des cabinets d'audit chargés d’orienter et de créer la demande culturelle comme dans toute industrie de consommation. On va conditionner un public de lecteurs par exemple à un produit dont une étude de marché préalable a permis d'espérer un développement à court terme puisqu'il flatte tel ou tel goût du public. On en arrive en France comme aux USA à voir paraître des livres qui sont déjà des best seller avant même d'avoir été lus et publiés ! Dans l'univers particulièrement rentable de l'édition qu'est le livre jeunesse les techniques de création de ces best seller n'ont rien à envier à l'édition adulte. Harry Potter aura au salon du livre un stand équivalent à certaines de nos plus grandes maisons d'édition. Derrière un seul livre se sont rangés, si l’on peut dire, les capitaux d’AOL, Mac Donald et Coca Kola. Par bonheur, il arrive de temps en temps mais de plus en plus rarement qu'une vraie grande œuvre devienne un best seller porté cette fois à juste titre par le public, mais le parcours du combattant pour qui a des choses originales à dire devient de plus en plus long et aléatoire. S'il y a encore en France des directeurs de collection pour défendre leur choix éditorial de livres à risque, beaucoup ont les oreilles tournées vers un conseil d’administration, car vous vous faites facilement virer pour insuffisance de rapport financier, même si la qualité des titres de votre collection est partout reconnue.
La liberté d'expression sur les grands moyens de communication que sont le livre le disque la radio ou la télévision finira, si l'évolution continue dans ce sens, et on ne voit pas ce qui l'arrêterait, par peser peu face à un conditionnement scientifique par des spécialistes qui savent agir sur les masses et n'ont aucun scrupule.
Tout ceci peut sembler d'un pessimisme noir mais la lucidité veut aussi qu'on sache chercher ailleurs des lieux de liberté d'expression encore réelle, et il y en a heureusement des milliers, et beaucoup plus qu'on ne le pense. La grande presse oublie curieusement de parler du pouvoir créateur de fourmis des quelques huit cent mille association existant en France. Ces médias ne feront une place aux associations que si elles ont un caractère amusant permettant d'en faire un scoop. Le travail de fond est incompris et négligé. Il ne fait pas partie du système, et, comble de l'horreur n'obéit pas aveuglément au pouvoir des capitaux car le plus souvent il n'en dispose pas.
Ces milliers d'initiatives ne seront souvent connues et ne pourront créer des liens entre elles que grâce à vous, radios d'implantation locale qui en informant le public seront les porteuses du développement ou de la simple survie de ces activités créatrices dont le nombre est énorme et parfois contrairement à ce qu'on prétend, le niveau de qualité surprenant. Bien sûr elles rencontrent aussi la médiocrité et la sottise mais pas plus que chez les grands.
On peut espérer que ces lieux de libre expression se multiplient et s'infiltrent dans tous les domaines, pour qu'on puisse y faire les choses soi-même, être son propre acteur, inventer, réaliser ensemble et échanger l'information sans passer par le filtre des médias orientées. Et enfin, dire ce qu'on pense. Devenir des lieux où l'on crée et on se crée.
Car à côté des grandes usines culturelles, on sent partout la montée d'un désir de liberté d'expression qui échappe au pouvoir sans visage et perturbera de plus en plus les habitudes politiques. S'il n'est pas violent il est souvent porteur d'un humour corrosif. Ce n'est pas un hasard si à Seattle ou aux divers congrès pour une autre mondialisation, les mouvements associatifs les plus disparates ont pu se montrer efficaces.
Le milieu associatif et les lieux d'échanges d'Internet peuvent devenir par leur nature même des lieux de déconditionnement de masse et de prise de conscience. Elles peuvent être ces lieux où l'information à la source contredit la communication dominée par la propagande ou la publicité.
N'est-ce pas significatif que la liberté d'association soit la première à disparaître dès qu'un régime politique se durcit ? On en a fait l'expérience ces derniers temps en quelques villes de France prises par l'extrême droite.
C'est avec ce besoin d'être soi-même une véritable personne et non un simple individu interchangeable et rentable qu'un peu partout, on voit fleurir des ateliers d'écriture, des chorales, des radios, des petites formations orchestrales, des lieux de réflexion, des lieux de théâtre, qui seront les pépinières des futurs écrivains, comédiens, journalistes formés à une certaine forme de liberté d'expression et capables de toucher l'opinion de l'intérieur. Malgré leurs grandes difficultés à survivre dans le monde de l'argent, on n'a pu tuer ni les mouvements artistiques populaires, ni toutes les radios associatives. Beaucoup sont domestiquées mais pas toutes.
J'anime avec d'autres un forum francophone culturel très vivant et suis toujours surpris de l'efficacité et de la possibilité de résistance culturelle et d'échanges de vraies informations sur le net. Car lui aussi est planétaire et témoigne d'une diversité culturelle étonnante. Et contre toute ces résistances diffuses, les pouvoirs de censure pour le moment reste impuissant. Si le net n'est pas un paradis, tant s'en faut, il reste une zone de liberté pouvant échapper à l'argent car avec des moyens pauvres on peut y faire et dire beaucoup. On verra de plus en plus d'associations, de festivals, se contenter de moyens modestes matériels compensés par de grandes ressources humaines, et ce n'est pas un hasard mais un signe bien encourageant que de voir par exemple quatre films français à budget modeste faire un tabac auprès du public. On pourrait dire que la pauvreté paye, si ce n'était aussi scandaleux.
Mais tout n'est pas rose dans ces mouvements . Le pouvoir de l'argent attend ces initiatives dès que le succès les force à passer à un autre niveau. Paradoxalement, c'est souvent en raison de leur succès que la liberté d'expression et de création se retrouvent devant le mur. Beaucoup d'association sont tuées par un changement de braqué qui leur impose, pour survivre, de capitaliser c'est à dire de se servir la soupe avec la longue cuillère du diable. Mais d’autres apparaissent ici et là et certains, pas tellement utopistes, commencent à prétendre que la réflexion et l'initiative sociale réelle pourraient un jour glisser vers nous.
Monsieur de La Palisse, qui fut comme on le sait un génial politique, n'a-t-il pas crié et chanté sur tous les toits que la meilleure façon de défendre la liberté d'expression c'était encore de s'en servir?
YH


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