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■ Voir son épouse pleurer
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- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - 2008-09-06 | | E.O. Notre rencontre qui remonte a plus de quinze ans s’est faite d’emblée autour de la poésie et plus précisément autour de la traduction M.B. A la suite de notre rencontre chez une amie commune, j’ai eu envie de mieux te connaître... C’est là que j’ai appris que tu étais écrivain et que tu traduisais de l’hébreu vers le français. Mais j’étais surtout ravie de rencontrer une femme créatrice et non seulement une traductrice. E.O. Pourquoi c’était important pour toi d’être traduite en français ? M.B. Depuis longtemps j’avais envie d’être traduite dans cette langue que j’aime tout particulièrement. Elle vient en deuxième place après l’hébreu. C’était après des années d’étude du français, d’abord à Jérusalem, puis à l’institut français de Tel-Aviv. J’ai beaucoup investi dans ces études car mon rêve c’était d’être capable de lire dans l’original des poètes que j’admirais tel que Rimbaud et Baudelaire. Je lisais aussi de la prose et des essais philosophiques toujours en traduction. Et puis on me demandait mes poèmes en français pour le festival international de poésie à Liège en Belgique. E.O. Il me semble que cet amour du français s’inscrit dans tes origines bulgares. M.B. C’est vrai, ça me ramène à ma grand-mère bien aimée éduquée dans la langue française pour devenir plus tard professeur de français. Ma grand-mère est née en Turquie et après son mariage elle à immigré en Bulgarie. Elle allait souvent à Paris. Et ici elle écoutait toujours la radio en français. Elle voulait aussi m’enseigner la langue. E.O. Revenons à notre première rencontre. Je n’avais rien lu de toi. Tu m’as aussitôt parlé de ton désir d’être traduite en français Tu m’as envoyé ton livre Le chant des oiseaux et j’ai eu envie de te traduire. M.B. Effectivement. J’habitais alors à Bat-Yam près de mes parents avant de revenir à Tel-Aviv. J’étais contente que tu aies accepté de me traduire. E.O. Nous avons commencé à traduire ensemble. C’est toujours un plaisir de travailler avec l’auteur même s’il a une maigre connaissance de la langue tout en étant capable d’entendre et d’éclairer son texte. C’était un peu comme si tu me servais de dictionnaire hébreu- hébreu. Une sorte d’Even Shoushan et quand je ne trouvais pas l’équivalent en français, tu le cherchais dans le Cohen hébreu/français souvent nécessaire bien qu’il vaille mieux utiliser le moins possible un dico bilingue surtout pour la poésie. M.B. Deux ans plus tard je suis passée à Tel-Aviv. Nous avons approfondi notre amitié et j’ai proposé de te traduire à mon tour. Je suivais à ce moment-là des cours intensifs à l’Institut français. Cette traduction était donc pour moi un défi. Tu as proposé de traduire Petites pièces en prose très prosaïque. Une sorte de poésie en prose. Cela m’a permis de connaître un autre pan de ta création. E.O. C’était à mon tour de servir de dictionnaire. J’avoue que je le faisais de moins bonne grâce que toi. J’étais plus impatiente. Il y avait le problème du Vous intraduisible en hébreu. Ce qui était agréable dans notre travail c’est que rien n’urgeait. La question de la publication n’étant pas au cœur de notre travail. M.B. Très juste. C’était informel sans aucune contrainte extérieure Cela se faisait dans une réelle liberté et dans un climat ludique. On a passé des matinées et des soirées à table sans compter les heures de travail. Puis chacune chez elle retravaillait dans sa propre langue. E.O. Oui, nous avions la vie devant nous. Et surtout nous étions d’accord que chacun ne traduit bien que dans sa langue maternelle sauf exception. Exception qui n’était pas la nôtre. A ce stade chacune de nous avait le dernier mot. Ce n’était pas une traduction à deux voix, mais un travail d’éclaircissement pour que chacune puisse élaborer le matériel dans sa propre langue. M.B. J’avoue que j’ai eu beaucoup de plaisir à travailler sur tes textes chez moi. Trouver des équivalents pour des expressions intraduisibles et même en inventer. Un travail à la fois exigeant et passionnant. Travailler sur deux langues si différentes et servir de passeurs entre elles. Ecouter la musique spécifique à chacune d’elle. La traduction comme révélation, une sorte de Merkaba. A propos de traduction je viens d’achever celle T.S Eliot avec beaucoup de plaisir. Il s’agit de ses Quartet. E.O. Les deux langues sont effectivement très éloignées même par leurs caractères qui nécessitent de lire de gauche à droite et de droite à gauche, de quoi fatiguer les yeux. Ce qui pour moi pose vraiment problème dans une traduction, ce sont les mondes culturels, même aujourd’hui à l’ère de la globalisation, il faut connaître ce qui est particulier à chacun pour aboutir à une lisibilité. M.B. Au cours de notre travail j’ai remarqué que tu avais un rapport privilégié à l’hébreu, lui donnant même une place primordiale. Tu révélais ton amour et ton admiration pour l’hébreu. Tu tenais à sauver ses particularités. Ce n’est pas habituel pour un traducteur qui pense surtout à la langue d’arrivée. E.O. Une frustration. J’aurais sans doute voulu être une parfaite bilingue. Ce que je ne suis pas puisque je suis incapable de traduire en hébreu. Nous avons beaucoup parlé traduction. Parlons un peu écriture. Ce qui m’a intéressée dans ta poésie, c’est d’abord ta langue très riche qui puise dans les sources des nombreuses strates pour dire le temps présent. Ta poésie parle à la fois de sentiments humains, de l’amour, des sciences, de technologie, du cosmos avec simplicité. La force qui s’en dégage se traduit par une langue claire et rigoureuse. M.B. Moi aussi je voudrais parler de ton écriture, plus précisément de Petites pièces en prose très prosaïque. Ces textes fragmentaires m’ont immédiatement attirée à la fois par leur simplicité et leur vitalité. Pas de drame, à peine une narration. De l’humour souvent au second degré. On pourrait dure que leur force tient par une certaine théatralisation de la réalité. On dirait l’œil d’un photographe qui traque de petits instants de vie sans avoir l’air d’y toucher. Et pourtant ces textes parlent du passé, de la mémoire, de l’avenir et des sentiments. Le tout passant par une recherche stylistique… Pour moi traduire ces miniatures au rythme musical a été une vraie leçon, surtout en comparant ton travail à la littérature israélienne actuelle qui se signale davantage par le bruit et la fureur. J’ai appris la retenue, la primauté du style et du mot précis. E.O. Je dirais que la précision du mot et du style fait ou doit faire partie de toute écriture. Au fait la compréhension de nos écritures réciproques est le résultat de nos traductions, l’une des manières les plus sûres de lire en profondeur. Nous voilà revenues à la traduction. J’aimerais encore parler de ton long poème écrit ces dernières années sur ton enfance qui m’a aussitôt interpellée. J’ai aussitôt eu envie de le traduire. J’y ai vu une nouveauté thématique dans ta production. Tu l’as intitulé « J’essaierai de toucher à mon nombril » et dès le premier vers tu écris « par l’imagination ». L’imagination : un élément qui caractérise ta poésie plus curieuse d’objectivité que de subjectivité. M.B. Je voudrais proposer une interprétation à ton intérêt et ton engouement pour ce poème d’enfance. Il ressuscite les années cinquante avec moult détails la nourriture, les vêtements, des coutumes, des jeux d’enfant caractérisant ces années-là . Les souvenirs d’une fillette qui a grandi à Jaffa dans une vieille maison arabe. Ces fragments ont éveillé ton enthousiasme et ton désir de les traduire à peine parus sans doute, car ça correspondait aux années de ton arrivée en Israël. Tu avais treize ans et tu as connu de près ce dont je parle. Il y a là une rencontre de nos deux biographies. Maya Béjerano : poétesse et traductrice ; a publié plus d’une dizaine de livres de poésie en hébreu, réunis dans un recueil intitulé Fréquences (Hakibbutz Hameuhad, 2005) et deux livres de textes en prose ; lauréate du Prix Bialik (2002). Esther Orner : écrivaine, traductrice; a publié : Autobiographie de personne, (Metropolis, Genève, 1999) ; Fin et suite, (Metropolis, Genève, 2001), Petite biographie pour un rêve (Metropolis, Genève, 2003), Une année si ordinaire (Metropolis, Genève, 2004) Petites pièces en prose très prosaïque (Editions Autres Temps, Marseille). De si petits secrets, (Metropolis, Genève, 2006). Elle vient de publier Récits grammaticaux et autres petites histoires (Metropolis, 2008). Elle vient aussi d’établir une anthologie de poétesses israéliennes traduites en français (éd. Caractères, 2008). CONTINUUM NO.5 |
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