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■ Magnolia
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- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - 2006-09-19 | | Ce titre, banal d’apparence, abrite un fort recueil. Une écriture d’une sobriété sans sécheresse, et pratiquant volontiers l’ellipse de l’article, poursuit page après page, poème après poème, un puissant travail où, sans quasiment ne jamais écrire « je », l’auteur porte son lecteur à aiguiser une acuité de perception capable de faire passer de la vision à la révélation. Le second poème, titré « le vide du voir » rappelle la belle formule de Jean-Claude Renard : « le vide aide à voir ». C’est que les interstices, au creux même de la lumière et de ses ombres, entre couleurs, entre sons, entre mots, procurent, à finement les percevoir, une progressive vision, minutieuse, délicate qui permet peu à peu d’intégrer, d’intérioriser, une part de magie ou de mystère, ainsi mieux aperçus. « rouge au cœur du rouge/la chute feutrée/d’un pétale/détraquant les structures/de l’écoute/ralenti/voir/ralenti » Le sable et le désert, la flamme et les failles, sont, parmi d’autres, des images convoquées ; mais il n’est pas possible de restituer ici en peu de lignes, la substance même de ce texte qui, de façon singulière, pousse sa thématique difficile à la manière d’une initiation. « L’œil écoute » écrivait Claudel. Marlena Braester s’en souvient qui montre combien voir est aussi être à l’écoute, entendre. Par de riches allitérations elle travaille son texte poétique pour faire voir justement ce que nos oreilles auront d’abord capté par une magie sonore où la musique des mots prend naturellement une large part. Celle-ci n’est pas une habileté d’écriture, encore moins un maniérisme plus ou moins dissimulé, mais au contraire, laisse deviner comment, par homophonies, les mots portent aux essences des choses qu’ils désignent, comment, dans leur chair, passent quelque chose de la vision subtile que savent capter ceux qui se glissent, à la manière de peintres ou de poètes orientaux, justement dans le jeu de la lumière et de l’ombre, tel Tanizaki par exemple. Nous savons depuis Baudelaire que « les couleurs et les sons se répondent », mais au-delà de ces synesthésies désormais bien repérées, Marlena Braester aborde un autre plan, infiniment plus subtil et pour tout dire métaphysique, où la poésie touche à son socle, où sa justification –ou son inanité- se retrouvent posées. « un son se courbe/sous le poids du silence/un astre s’échappe/vers l’insonore » Il est plutôt rare de lire une poésie qui sache questionner la posture et le regard poétiques tout en écrivant le poème, et cela sans théoriser l’un, ni affaiblir l’autre, sans asservir l’un à l’autre. Il est donc rare d’entrer en si subtil questionnement avec autant de simplicité, et pour tout dire de « fraîcheur », puisque le poème porte ici profondément cette marque d’intimité tant impressive qu’intellectuelle. A l’énoncé de son titre l’enjeu de ce livre pouvait pourtant paraître impossible, ou naïf. Il y a dans les encres ombrées de Albert Woda quelque chose de très justement accordé à cette démarche : une révélation qui donne tout en dérobant, une incertitude qui rappelle l’ambivalence même du clair et de l’obscur, du son et du silence, frange à laquelle se tenir pour tout à la fois écouter, regarder, et comprendre, par cette perméabilité nécessaire pour traverser les « évidences », ainsi que les arcanes du langage, bref pour atteindre l’authentique, et multicolore, lumière. « tout à coup/je vois clair dans le noir/sur l’étendue d’avant regard//de noir en noir pousse la vue » Jean-Claude Villain
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