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■ L'hiver
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- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - 2011-10-18 | | Entre corps et graphies, observez attentivement la chorégraphie des cendres et voyez comment pirouette la poussière des crématoires ; distinguez au bal des cendres, ses tourbillons circulaires et ses gracieux mouvements de danse ; et considérez aussi comment elle se soumet aux girations aux méandres des airs chauds, et aux jeux exaltés des cerceaux de vents forts. Elles dansent ! Elles volent, comme les sables aux déserts de l’âme, comme au sommet des hautes montagnes du Sinaï, ou dans les grands espaces arides d’Arabie, de Libye ou du brulant Kalahari. Elles ressemblent à de légers cerfs-volants gris, à des confettis poudreux, parfois flocons légers, d’autres fois, tels des encens lourds, embruns trop chargés de souvenirs… comme des chemins de chansons douces qui remontent du cœur, et redescendent comme des rosées de cendres froides sur le sol congelé. Ani af, je vole ! Je virevolte, je tourne comme toupies derviches, je danse comme ballerines aux bastringues des cendrées. Ani af, je vole dans la nuit noire ! Prenons exemple sur elles ! Oui, c’est le vendredi au calendrier du crépuscule, allons danser, sautiller et nous souvenir des mélodies du bonheur qui touchaient nos cœurs, quand nous étions les enfants de la liberté. Nos yeux éteints d’aujourd'hui étaient hier encore des étoiles de bougies sur la table pleine de lumière et de bons mets; papa bénissait de sa voix tendre et glorifiait l’Éternel pour sa grande Miséricorde ; et maman, le foulard sur la tête et les yeux pétillants d’amour pour chacun de nous, servait les plats les plus savoureux ; toute la fratrie était là , chantant et priant, alors réjouissons-nous de ces cendres qui se souviennent et montent en un nuage de cris, une nuée de gris qui s’élèvent dans l’opacité comme un altostratus plein d'exhortations. Mosa, Mosa ! Magpiash ? Pourquoi tue-t-on les papillons détrempés, pour les clouer ensuite au pilotis de leurs couleurs ? Pourquoi pendre à l’aurore alors que l’on pourrait s’aimer en plein jour ? Adam, adama admati ! Terre, ma terre, où es-tu ? Telle que je te vois des altitudes de cendrées, là où les poussières de poussières, en nuages gris, haussez les mots à la hauteur des maux. Vous qui poussières des poussières, vous élevez dociles jusqu’au ciel, avec la flagrance des brulures acres et rances, et la fragrance de la suie tiède ; avec la confiance aveugle des enfants en bas âge, montrez-nous votre chemin d’ombres vers la lumière de l’aube ; vous qui avez acquis la grâce et la légèreté et la vivacité des sons, des chants et des danses, de ces danses macabres qui se perdent dans la nuit des temps et les bruits de la vie, comme dans l’agilité molle des résidus de peaux. C’est Mosa que l’on tue ! Maarath en ce lieu où l’homme est dénudé de son humanité ; maaca, en ce lieu d’os pressés et d’oppression, madmanna, manne terrible des charniers comme fumier répandus en terre, en ces lieux de terribles tremblements. C’est Mosa qu’on incinère ! Mara, Maroth, au lieu d’amertume comme le sont les goûts amers en bouche, tels les vieux laits de mère morte et les sources insipides, telles les chairs consumées sur le grill des fours anthropophages, et les viandes désossées des enfants abattues dans les abattoirs intensifs d'un abîme ténébreux. (...) Entre poivre et sel, l’ombre et la lumière, il y a ceux que j’aime et ceux que je n’aimais pas assez ; il y a les pluies battantes qui battent le tambour, la nuit et le jour, les loups et les anges ; entre les barbelés, sous la pluie froide, il y a ceux qui sont battus à nu, à vif et à sang. Même si s’envolent les vœux, même si les rêves se dissipent, la vie continue de plus belle ! Vol aux vents des chairs lésées, comme des chapelets de confettis moites, dans le charme des vents ; les poussières d’humains s'assemblent et se ressemblent, à les confondre à des moineaux chétifs, délavés et brisés ; à des oiseaux migrateurs en partance pour quelques ailleurs... Après le trépas, le pas de danse ! Après le dernier souffle, l’âpre souffle du vent ; après la mort subite, le papillonnement des âmes ; l’expiration se fait envol, l’esprit prend la main, la cendre tressaille, au néant succède des lumières d’allégresse. Comme des mèches de cheveux d’enfants, collées à ceux des vieillards grisonnants, la cendrée quitte les quais de la mort, pour partir en voyage, à la rencontre de quelque étoile, dans les turbulences de l’air chaud de cannibales crématoires. Après la chute, elles cabriolent pour gravir de nouveaux sommets, reviennent à leur point de départ, escaladent les gibets, grimpent sur les miradors, se logent dans le coin des yeux, assèchent les gorges, pénètrent les narines et les oreilles pour y semer le cri. Petits ballons de baudruche, elles s'envolent à l'air libre, s’exposent à l’air instable, éphémères, mobiles, pour virevolter de nouveau, elles se déploient de nouveau, retombent mouillées de pluies, sur les toitures suintantes de cris. (…) C'est l’évolution, après le flux, le reflux… Après la course et les coups, elles dansent ! Zeh Tov Zeh Tov ! Oui, qu’il est bon d’être libéré de l’oppression, qu’il est bon de prendre l’air ! Après les convulsions et les spasmes douloureux, place aux chansons et aux remous de l’ascension ; on ne peut enfermer les cendres dans des urnes closes et enclore les urnes dans des coffres, on ne peut barrer la route aux transmutations comme on ne peut contenir les révolutions dans des livres fermés ! (...) Comment ça ! J’ai joué, j’ai joué et rejoué le jeu, j’ai sauté, dansé, et vous n’avez pas participé au bal de cendre, sans même vous émouvoir vous m'avez regardé avec dédain ! Et de toutes mes énergies, j’ai continué à danser comme David sautait et tournoyait dénudé devant l’Éternel, après avoir ceint un pagne de lin, comme les prêtres de jadis. J’ai joué, joué de tout mon coeur dans le son des instruments à os, et rejoué sur les cordes raides des nerfs les plus à vif ; comme David jouait de la cymbale, et les prêtres aux osselets pour voir à l’avenir, j’ai joué le jeu de la vie et je maintenant je danse ! La danse a remplacé nos deuils, la pluie complète nos larmes, car entre le baraquement et le gibet, il y a un temple pour pleurer et un temple pour danser. On n’échappe pas à ses cendres ! On peut échapper à ce qui existe, mais pas à ce que l’on est ! On ne peut réduire ce qui reste des cendres à ce qui est artificiel : identité, métier, études, talents… ce qui relève de l’esthétique, de notre affectivité, des croyances et valeurs. (…) Comme elles, le cœur lourd, mais l’âme légère, je tourbillonne comme poussière aux vents, car s'envoler pour connaitre l'infini et l'éternité, n’est-ce pas là le rêve de chaque poussière d’homme ? Toutes les théories racistes sont naturellement absurdes et n’empêcheront pas les cendres de tous les peuples de se mélanger dans l’amour mystérieux de la matière brute. Les pires crimes ne peuvent détourner la matière de son sens ! Malades mentaux, handicapés, communistes, Juifs et Tsiganes, vous qui souillez dit-on la race des SS, en ces lieux maudits, vos cendres se mêlent à des vents qui viennent toujours d’ailleurs, pour ne former qu'un seul corps ! Les hordes nazies ont beau hanter les villes et les steppes; les dragons d’acier ont beau cracher une multitude d’obus; les gardes-chiourme tisser le barbelé à travers les regards, et construire des murs plus hauts que leur courte conscience, nulle séparation, nulle exclusion, aucune extermination ou autre génocide, ne pourra venir à bout de l’amour qui nous tend vers l’autre, et de la conscience qui se déploie sans frontière, sans langue et sans race aucune. Mort où est ta victoire quand l’amour est plus fort que la mort ? C'est ainsi, que Dieu traçât de ses doigts brûlants, dans la cendre tiède des holocaustes qu’il ne désirait pas, la sainte calligraphie d’une histoire infinie, sans clôture culturelle ou sociale ; c'est de même que le christ, aux portes de Jérusalem, traça de ses doigts des liens entre les peuples et les religions. Les bouches s'ouvrent, les mâchoires se crispent, les dents grincent, les yeux se ferment…, le plasma des humains comme un fumier bourgeonne ; les mors se resserrent, les rangs de soldats épouvantés s'agglutinent de sang en un seul tissu de chair animale, qui même morte n’arrête pas de muer en devenir. Guerre après guerre, le terreau se renouvelle sans cesse, les gentils démons et les mauvais anges s’emmêlent les ailes et les griffes ; ordre et désordre, l'équilibre est fragile, cette impuissance d’être nous révélant peu à peu le destin fragile de larve d'homme en notre condition de terreux. Mort où est ta victoire quand l’amour est plus fort que la mort ? Tous les éléments sont à l’unisson, un seul cri, un seul baptême de vie et de mort, une seule mémoire comme une conscience unique ; l’amour, c'est la rencontre de la terre et du sang, du bois et de la chair, du fer et de l’os, du verre et du papier sur lequel je vous écris; dans l’entre-temps et les ailleurs, pour le bonheur de tous, chacun trouvant une résonance en l'autre. Calciner le bois et l’os, enfumer l’air et la terre, travailler les regards et les consciences par l’alchimie des horreurs, créant par là même d’abominables scénographies et des histoires ignobles, où l’humain, le végétal et le minéral se mélangent en un bourbier infect, pour modeler l’homme nouveau en une épreuve sans nom. Mort où est ta victoire quand l’amour est plus fort que la mort ? C’est le feu des crématoriums et celui des enfers qui brulent ensemble l’amour ; interviennent d’un même creuset pour fondre la pensée en une pensée unique, et réaliser ainsi, selon les théories nazies, la tragédie du rêve Arien. Vous tous, bons à rien de la race des saigneurs, pleurez sur votre pesanteur, il neige sur Treblinka des flocons de Mosa, des poussières de mémoire. Mort où est ta victoire quand l’amour est plus fort que la mort ? Alors, allons et réjouissons-nous… elles volent ! (…) Extrait de C'est Mosa qu'on assassine ! Un chapitre de "ZOOM" http://www.facebook.com/note.php?note_id=10150341837247337 |
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