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Bonjour madame
personnelles [ ]

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par [IleanaPB ]

2017-01-15  |   

Literary Translation - Translations of classic and original poetry and other materials %Ce texte est une suite  | 



Cet hiver a les ailes vertes. Comme la mousse sur le toit des maisons. Poussant dans tous les sens. Sur la tuile rouge ou grise. Sur la tôle couleur de vent endormi, de place en place, sur les taillis. De place en place, sur les cheminées qui racontent (encore) un feu de bois. De place en place, dans les idées. De toutes couleurs et nations... De toutes... ce qu'on veut... idées douces ou amères!
Je parcours des rues apparemment identiques. Comme si un Bon Dieu spécial les avait illuminées de paix et de sécurité. Avec des regards chaleureux envers les passants. De toutes sortes. Jeunes ou vieux, élégants ou non, parlant, à des octaves différentes, une langue que l'on souhaiterait... «plus lentement, je vous prie». Un enfant me remercie de lui avoir permis de passer à toute vitesse à bicyclette; la vendeuse du point presse du coin me recommande une revue d'une façon extrêmement aimable; une dame m'offre un Freesia*** blanc, Dieu sait pourquoi. Peut-être parce que je lui ai souri de la même façon, discrète, mystérieuse, sereine. Dans les branchages d'un arbre, peu élevé, dans un boulevard sur lequel roulent quand même des voitures, j'aperçois un nid de paille, fait par des oiseaux qui l'ont abandonné, emblème de calme et de sécurité. Je hoche la tête d'admiration. Sans que je veuille faire un geste, sans pouvoir comprendre mon impuissance à tomber là où tout avait l'air limpide et installé. Cet endroit magique, créé par nous, en nous; j'y ai toujours pensé. Je n'en peux plus. Cet endroit-là n'existe plus maintenant. Annihilé. Je suis une structure, un genre de puzzle de fabrication ancestrale, ciselé par tout ce dont j'ai fait preuve dans ma réalité et celle de mes proches. Et j'ai toujours cru que eux, ces éléments, sont suffisants dans la formation d'un individu. J'ai éludé, consciemment ou pas, l'importance qu'à une société dans laquelle tu as la chance ou la malchance de naître. Je sais que la satisfaction de mes besoins dépend d'elle, la société. Mais je n'avais jamais réfléchi que l'âme, le sourire, la lumière dans le regard et l'assurance – oui, l'assurance -, sont gâchés par ce quelque chose qui se trouve au-dessus de toi. Une conscience suprême, une civilisation, un monde supérieur à notre monde de gens banalement normaux. Et le bras de cet «environnement» nous défend, nous protège du temps, des maladies, de la faim, des autres et même... de nous. Vivre dans la croyance que quelqu'un prend soin de toi, toujours, ce serait comme dire, de façon malfaisante, que tu n'as plus besoin de Dieu. Bien sûr, il y en a beaucoup qui diront la même chose. Mais il y en aura tout autant qui penseront que sans le Bon Dieu d'une nation, rien de ce que j'ai dit ne serait avéré...
…............................................ .
Je cours prendre un taxi. Le conducteur, en aucune façon irrité, rouvre les portes déjà fermées:
-Bonjour, madame! Plus lentement, je vous prie! Dit-il, et il incline la tête pour comprendre .
-Je suis très touchée, merci! Réponds-je, déguisant mon amertume autant que faire se peut.
…............................................ ..
Mes yeux humides s'illuminent au carrousel joyeux. Dans les vitrines. Chez les gens. Les autres gens. Heureusement. Au loin, on aperçoit la Cathédrale. Ma – gique! La France y couronnait ses rois. Moi j'y couronne... mon rêve. Et je me colle le front sur la vitre de la voiture... je ferme les yeux et je me retrouve dans la Grande Roue de mon enfance... et je m' agrippe aux chaînes... et je crie de toutes mes forces que ça ne s'arrête que lorsque je pourrai descendre dans un autre monde... un monde nouveau, mon chez-moi.

Ileana Popescu Bâldea
Reims - 25 janvier 2014

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