Ah ! Ce qu’un homme peut être las
De ne penser qu’à lui tout le temps ;
Ce qu’il peut être las le mégalomane
Qui n’a que vingt-ans
Et qui ne voit dans le temps qu’une urne d’ennui,
De jours longs et boîteux à s’échiner sous les soleils gris ;
Ce qu’il peut avoir de rêves douteux dans sa vierge caboche
D’idioties, de grandeurs vaines, de rimes non-écrites ;
Ce qu’il peut y avoir d’envies de partir vers l’Afrique.

Partir pour trouver quoi ?
Partir pour satisfaire quel obscur besoin malsain
De se remplir de souvenirs
Pour se réveiller un matin avec la pire
Gueule de bois du siècle,
Pas une pièce dans les poches
Et le reste de la vie pour se traîner
Tout croche dans la rue
À travers la cohue des gens pressés ?

La grande attitude Mahamudra
Viendra et répondra à ce que tu cherches,
Me dit alors Milarépa quand j’interrompis mes recherches.
La grande attitude Mahamudra, simple comme bonjour,
Simple comme le jour et les fleurs écloses,
Les oiseaux qui ricanent quand le marcheur morose
Marche dans les bois avec sa canne, quand
L’heureux en soi de soi investit l’être.
La vie est suffisante : Mahamudra,
Foisonnante autour de toi, petit gars :
Regarde et tu verras, regarde et tu verras,
Et tout ça s’arrêtera quand on t’entererra.
Alors là, tu ne pourras plus dire rien du tout,
Et ça sera pas pire ou mieux que c’était.
Laisse en toi venir la joie !
Fais ce que tu attends de toi
Calmement cheminant. Il n’y a pas plus de gloire
À boire tous les soirs dans une camionnette
Qu’à lire tous les livres de la planète
Ou à être ivre de révolution :
La joie commence en toi avec toi
Et le reste importe peu arrive quoi que ce soit
La joie peut vivre en toi :
Mahamudra.