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Éloge du dénouement (extraits)
essai [ ]
Approche poétique des sens, non sens et contresens

- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -
par [Reumond ]

2012-08-20  |     | 



Dédicace :

À Carl von Linné, naturaliste suédois et père de la taxinomie ; et à Ronald Laing. Psychiatre, poète et décrypteur de nœuds.





















Avant-propos :

Comme il aurait été intéressant de disposer d’un Littré des paradoxes !

De même, un Linne des nœuds en 24 volumes, aurait-il pu nous éclairer au sujet du "dénouement"; mais l’affaire en question n’est-elle pas trop noueuse ? Et les questions ne sont-elles pas toutes tordues ? Les chemins ne sont-ils pas trop courbes et les lignes trop brisées ?

Aidé des anges, de son côté du miroir, von Linné, rêve peut-être de parfaire cette nomenclature exhaustive des nœuds de l’être, qui sait ! Et savoure, après l’heure, tout le plaisir qu’il aurait eu à les classer par taille, poids, difficulté, ordre naturel ou surnaturel, selon les différentes espèces à plumes ou à poils. Car c’est bien connu des nerfs et des chairs, les nœuds peuvent prendre toutes les formes, selon leurs états d’âme et de conscience.

Table :

- Avant propos.
- Introduction.
- Quelques définitions et fragments de taxinomie nodale.
- Du concept de nœud aux nœuds conceptuels.
- Petite topologie des nœuds.
- NÅ“uds et lieux.
- Le jeu des nœuds et le nœud des jeux -
imbrication des lieux et des noms.
- Les nœuds de la vie comme matrice des maux et les nœuds
des maux comme matrice des mots.
- Morts ou vivants, de la nature des nœuds ordonnés
selon leur rang.
- Les nœuds ne devraient jamais s’écrire au singulier,
mais toujours au pluriel
- Du dénouement primal au dénouement extrême.
- Le cas particulier du nœud gordien
- Nodus et bouche cousue.
- graphes et graphie
- Petite prière surréaliste à Marie qui défait les nœuds.
- Les paradoxes de la communication et des rapports humains.
- Hommage à Ronald D. Laing.
- De la poésie et des chiasmes
- Comment s’entrelacent et communiquent les êtres et les
univers, en tissant entre eux des formes nodales.
- Le ruban de Möbius, comme prototype d’une topologie nodale
- Le nœud comme histoire sans fin
- Conclusion.
- Bibliographie


Extrait de l’introduction, suivi de quelques fragments des chapitres sur la

- Petite topologie des nœuds, et
- NÅ“uds et lieux.


Introduction

Beaucoup de nous sont passés par cette étape qui consistait à apprendre à faire des nœuds comme de bons éclaireurs ; mais, parole de scout, combien de nous ont appris sur le bout des doigts et des neurones à défaire les nœuds les plus difficiles, à s’en défaire, pour s’en débarrasser comme de vieilles peaux noueuses, tel le lézard qui mue au soleil ?

Même le Grand Alexandre n’y parvint pas, car le nœud doit-être dénoué de sens, dénoué de l’intérieur, là où se trouve le bout de l’être dont il faut se saisir avec mille précautions.

Les mauvais nœuds ne peuvent-ils se faire qu’à contresens, et le non-sens lui-même, mathématiquement, mène-t-il forcément au nœud serrant ? Quel est le sens du nœud ? Et y a-t-il forcément de bons et de mauvais nœuds ? Face aux significations différenciées du sens des nœuds, comment pouvons-nous être sûrs qu’il existe un faux sens, comme il y a de faux débats ?

Les dénouements ne peuvent se défaire qu’en dénuements, des plus simples aux extrêmes, mais encore faut-il vivre de cette expérience qui sublime tout en dévouement et en renoncement sans sacrifice, c’est-à-dire en cette vie qui est une véritable spirale de créativité.

Ce dénouement, c’est un ouvrage qui débouche nécessairement sur le travail d’une vie entière, c’est le grand œuvre qui se déploie en une alchimie de l’instant présent et du quotidien.

L’harmonie intérieure passe nécessairement par le dénouement comme l’humilité passe obligatoirement par un véritable dépouillement.

Car, avant même la naissance, nous étions déjà noués de partout !
De toutes parts hypothéqués par nos ancêtres, par nos propres parents notre milieu social, notre environnement éducatif et religieux…

Quand l’enlacement des tissus et l’entrecroisement des nerfs nous parlent, quels liens pouvons-nous découvrir entre les nodules minéraux et les nodules thyroïdiens, entre l’Homme Vitrusien de Vinci et le Verbe en croix ?

Quels rapports nodaux pouvons-nous observer entre la théorie des cordes en astrophysique et celle des graphes en informatique ?

Quelles attaches entre l’imbécilité caractérisée et les nœuds en mathématiques ou en biologie ?

C’est le nœud même des réponses que d’être nouées de questions comme l’être est roué d’assemblages.

Car les nœuds participent des structures qui nous encrent dans la réalité et donc dans la vie. Il y a des structures nodales qui sont socioculturelles, psychiques, relationnelles, physiques… et même des structures de structures qui enveloppent le tout comme des matrices.

Tels des univers en pleine expansion, il y a des liens qui s’ouvrent comme des fleurs, qui libèrent pour élargir notre conscience à des dimensions universelles, et qui nous poussent toujours plus loin à être plus humains. Ces nœuds vitaux nous permettent de rester en lien avec le monde, dans une relation à l’autre et à l’environnement bien souvent empathique, ce qui donne bien sûr du sens à la vie et au partage de cette vie.

Et puis par malheur, c’est le revers des nœuds, il y a aussi des liens qui nous enferment sur nous-mêmes, nous coupent de cette belle altérité qui est le propre de l’humain. Dans ce dernier cas, nous dirons qu’il s’agit de nœuds dont il faudrait mieux se défaire.

L’affection ou l’attachement peuvent aussi se faire dans un sens comme dans l’autre, alors nous parlerons soit d’amour oblatif, soit d’amour captatif, de nœuds serrant ou bien de nœud libre.

Comment nouer les choses pour donner du sens aux choses comme on noue les mots pour donner de l’harmonie ou du sens au texte ?

Comment nouer les deux bouts quand c’est la crise et que l’on mange la vie sur la corde raide ?

Quel est le « lieu commun » et le « nom propre » des nœuds ?


Nodules telluriques ou noeuds dans le bois ?

Les nœuds de bois et de pierre se souviennent parfaitement de ce croisement vif entre la chair et l’os, de cet étrange étranglement entre le ciel et la terre qui donna naissance un jour de printemps à l’homme en boutons, dans la grande douleur des mutations.

Depuis cette belle journée printanière, les nœuds sont au cœur de l’homme comme l’homme réside lui-même au cœur des nœuds, c’est le contexte qui veut ça, le nœud est l’hôte du neuf !

Les nœuds concourent à cette incroyable alchimie de l’esprit dans la matière, et à cette subtile osmose des jeux entre le dedans et l’extérieur ; les nœuds sont déjà au cœur de l’itinérance des primates, quand ils tournent en rond, et de la transhumance des peuplades d’humanoïdes marchant plutôt debout, pour trouver leur axe ou leur centre de gravité, c'est-à-dire leur place dans la création.

(…)

Quelle macédoine de fils noués que ce nœud gordien !
Quel nœud débile, quelle tête de nœud que cet Alexandre !

Pouvoir, savoir, avoir, vouloir, tels sont les armes des Alexandre que nous sommes tous, un peu, beaucoup, passionnément ou même parfois à la folie !

Alex, c’est Andros, c’est l’homme dans toute sa splendeur et chacun de nous dans toute sa pauvreté ; c’est celui qui se protège de la réalité, et repousse cette même réalité en l’agressant plus ou moins violemment ; c’est-à-dire indirectement, en se faisant du mal à soi-même et en faisant violence au monde, car toute attente, toute prise de pouvoir sont un véritable attentat !

Quel est « le lien » entre la littérature, l'art et les mathématiques ?

Les nodules y sont comme des liens ténus, des nouures de l’être et des
Liaisons grasses entre des choses qui sont elles-mêmes plus ou moins nouées entre elles.

Comme nous l’avons déjà dit, par nature et donc par culture, dès avant notre enfantement, nous étions déjà liés, liés aux autres, liés au monde et même aux univers dans leurs immensités. Dès avant notre conception, nous étions déjà des nœuds vivants !

(…)


PETITE TOPOLOGIE DES NOEUDS

Comme tous les amateurs de rubans de Möbius, je me suis très tôt intéressé à la topologie des nœuds. Et je suis loin d’être le seul !

Des écoles de la sagesse aux réflexions les plus modernes de Palo Alto, le nœud est au centre des préoccupations de multiples disciplines. De la théorie des Cordes aux nouvelles approches de la communication, en passant par les arts au sens large, la psychologie, l’anthropologie, l’ethnologie et la science des religions, toutes ses disciplines s’intéressent de près ou de loin aux nœuds dans tous leurs états.

Au commencement… et au cœur du débat, le nœud était.

En ma qualité de psychothérapeute, et comme collaborateur de quelques exorcistes, j’ai acquis quelques expériences dans le domaine du dénouement.

Quand on approche l’homme de tout près, ce qui saute aux nœuds c’est les yeux, les yeux de l’homme parlent de son histoire, de ses peurs, de ses rêves, mais surtout de ses nœuds.

Nous l’avons déjà dit, les significations du nœud sont fort diverses, il n’y a pas que les marins de hautes mers qui s’intéressent à la structure des nœuds, j’ai moi-même fait il y a plus de vingt ans un nœud à mon mouchoir, je ne sais plus pourquoi, mais ça prouve bien que même les mouchoirs se nouent !

Les marins d’eaux douces, d’oratoire et de laboratoire se passionnent eux aussi pour les nœuds.

En rubans, en anneaux, en boucles d’univers, les nœuds semblent souvent n’avoir ni commencement ni fin ; les nœuds sont dans le monde comme le monde semble lui-même être un amalgame de nœuds, un assemblage infini de modules de nodules.

Les nœuds palpitent au cœur du temps, telles des nébuleuses de chanvre indien, ou l’entrelacement des cordes et des fils signifie l’entrelacs infini des cercles de la vie.

Dans les miroirs brisés de nos âmes nouées de contradictions, et dans ces nœuds entrelacés, je vois tout l’art de la schizophrénie, les nœuds de la folie et les nœuds du génie tout mêlés, ils font lien, tels les liens sacrés du mariage, ils joignent et s’emmêlent comme pour l’éternité.

(…)

Nous connaissons tous par cœur, ces désirs compulsifs qui ficellent nos corps, et ces nœuds dans la gorge qui empêche de parler… Le dénouement, c’est la solution et la délivrance !

Mais il y a ces ambigus tortillements et ces entortillements des paradoxes, c’est équivocité des choses et des sens, car tous les liens et les nœuds sont « ambivalents », symbole de mortalité, tel le nœud d’Isis, ou d’immortalité.
Autant leur symbolisme est riche, autant leur langage est pluriel.

Le récit des Upanishad ne dit-il pas qu’il faut défaire le Granthi, le nœud du cœur, pour atteindre l’immortalité de l’âme ?

On peut lire aussi la célèbre « parabole du dénouement », développée dans le Surangama-sûtra, n’est-elle pas selon le dire du Bouddha, un processus de libération ! D’après le sage, défaire les nœuds de l’être nous permet d’accéder à notre vraie nature, à notre moi authentique, car défaire c’est résoudre, c’est traverser le voir et le voile des apparences, et traverser ainsi, les uns après les autres, les nœuds au-delà du moi, et le moi au-delà des nœuds.

Comme les chiasmes, il y a des règles, des lois naturelles à respecter. Il existe un sens à tout, un sens giratoire à ne pas contrarier ; parlant d’Alexandre nous l’avons déjà dit, il ne s’agit pas de trancher dans le vif comme avec le nœud gordien, mais il s’agit de réaliser le sens pour le rendre réel, de franchir torrents et sommets comme la boucle des choses, là où le passage est permis.

Les nœuds faits dans un certain ordre ne peuvent être défaits que dans un ordre inverse (précepte Tantrique)

Les Knoten (nœuds) de Dürer, les labyrinthes à parcourir jusqu’au centre de soi, les mandalas tracés avec patience, toutes ces figurent géométriques et topologiques, nous parlent des nodosités à traverser comme des pèlerins de Compostelle, afin de retrouver notre essentiel, notre axe ou notre centre de gravité, la résolution des nœuds, n'est-ce pas la délivrance assurée !


Nodosité

Une expérience essentielle de la vie ne consiste-t-elle pas à percer le nœud des illusions de l’intérieur ! Percer le voir, c’est la percée des Granthi, nœuds des nodosités de l’humain et nœuds yoguiques par excellence,

Car le but de l’existence est de desceller et de libérer les âmes de leur purgatoire, de dénouer un à un les différents liens qui enserrent le cœur et nous retiennent ainsi prisonniers.

Comme nous avons en occident la spiritualité du Carmel qui vise au même dépouillement ; le bouddhisme tibétain possède un Livre du dénouement des nœuds.

Le nœud, c’est essentiellement ce qui nous rattache aux illusions de la vie, telle la tumeur ou le kyste s’attachent à nos chairs pour nous garder dans quelque chose, c’est la seule réponse que le corps est trouvé à l’énigme pour répondre à un conflit.

Défaire le nœud, revient alors à réaliser le processus de libération, de guérison…

Se dénouer des liens signifie sur le plan de la topologie humaine, se jouer des nœuds et se libérer des attaches erronées et de ces attachements qui nous gâtent la vie, pour vivre à un autre niveau de conscience plus humaine.

Dans Le Rameau d’Or, selon Frazer, il est bien écrit que tout doit être ouvert et défait pour faciliter la naissance ou l’accouchement ; il en est de même de toutes les formes de libération des noeuds.

Nouer, dénouer, lier, délier, sont les symboles d’une équivalence et d’une même ambivalence. Le nœud contient en lui-même ce double langage, le double aspect de la vie et de la mort, les aspects bénéfiques et les lieux maléfiques, les lieux d’influences positives et des liens d’influences pernicieuses, tel un bout de corde, pour y attacher quelques sortilèges.

(…)

Il existe au Royaume de Liens, des lieux de nœuds que nul saint homme ne pourrait délier, des nœuds tellement compliqués que pas un seul thérapeute ou prêtre ne peut aider à défaire.

C’est que les nœuds des illusions ne peuvent être tranchés que dans la vérité, comme le mirage ne peut être résolu que par un miracle ; la réalité du nœud et de ses enchevêtrements cache son propre mystère, c’est pour cette raison qu’il nous faut bien discerner entre un nœud cosmique et un nœud coulant !

Peut-être bien que la brutalité et la force dénoueront le lien quelque temps, mais ce dernier, tel le phénix renaîtra plus serré encore ; coupé, il repousse, se reconstruit sans cesse ; tranché, il se refermera bien vite sur vous, comme la terre ou la neige après une avalanche et se resserrera avec autant de vigueur que vous aurez donné de coups de hache ou d’épée.

Nos blocages en cul-de-sac, nos idées fixes, nos impairs et nos impasses, nos croyances en accroche-cœur, nous enserrent, ils nous claustrent en nous-mêmes, ils sont nos nœuds de mal, c'est-à-dire, nos lieux de mort !

(…)

Ce que vous voyez poindre à l’horizon comme un soleil, c’est l’ouroboros qui se fait mouvement sans début et sans fin, c’est le lever et le coucher qui s’harmonisent, c’est le nœud parfait, celui de l’unité perdue, chère à Léonard de Vinci et à tous les chercheurs d’absolu.

Tels des arcs et des cordes, des vagues bordées d’écumes, des enluminures de parchemin ou de belles figures celtiques, en spirales ou en disques, en entrelacs ou en rosaces, dans toute la nature, les nœuds participent de la vie et de la vie.

Même si les plus beaux entrelacs ornent les œuvres d’art, et si certains beaux nœuds décorent de leurs chevauchements l’architecture, ou les plus belles formes du corps humain, il faut se méfier quelque peu de ses ondulations noueuses.

Que les nœuds s’expriment sous forme de difficultés rencontrées, de souffrances vécues ou de quête pénible, tant que ces nœuds véritablement « existentiels » ne sont pas défaits, nous gardons en nous cette désagréable impression d’être mis dans une situation de claustration, comme exclue ou envahie, avec ce sentiment d’exister sans réel devenir.

(…)

NÅ’UDS ET LIEUX


Le Bon Lieu serait-il un lieu sans nœud ?

"Je vous le dis en vérité, tout ce que (tu lieras) vous lierez sur la terre sera lié aux cieux (dans le ciel), et tout ce que (tu délieras) vous délierez sur la terre sera délié dans le ciel.»

Comment nommer ces ligatures ou ces attachements autrement que par des lieux : Le Ciel, la Terre, L’Homme, Dieu…

En une multitude de noms de lieux communs pour faire de l’Unique !
Il y a des lieux clos, fermés sur eux-mêmes comme des portes closes qui ne laisseraient rien passer, personne, ni l’air, ni la lumière.

Et des lieux ouverts sur les quatre horizons, entrouverts au vent de l’esprit, entrebâillés sur l’avenir.

(…)

Parfois ce sont de lourdes chaînes familiales qui nous attachent les uns aux autres, qui nous retiennent à notre terre, au sol de nos ancêtres ; d’autres fois, ce sont des fers rougis au feu des émotions qui brulent comme des cordes trop serrées ; ou des courroies que l’on croit « de transmission », mais qui en réalité, tournent folles comme des vis dans la chair ou des boulons dans le regard.

Sur nos cordes plus ou moins raides, nous pensons marcher droit, mais dans l’invisible, des laisses de nylon solide, nous tiennent animal, là où en nous l’être aspire à devenir plus homme.

Les nœuds, telles des brides usées de vieux cuir nous orientent et guident notre pas, nous mettent sur un chemin que des mémoires ancestrales ont choisi pour nous, car nous nous croyons libres, comme affranchis, émancipés de toutes contraintes, fiers et dignes de nos choix les plus intimes, de nos goûts et couleurs les plus raffinés et d’une sexualité sans équivoque.

Mais nous ne sommes que le résultat de nos multiples nœuds, de nos conditionnements divers, de nos différentes rencontres ; nous sommes bien la somme complexe de nos multiples imprégnations, le montant payé en nature de nos hypothèques les plus différenciées ; de toutes ces habitudes et petites manies qui nous sanglent.

Nos consommations culturelles nous bandent, et nous ne tenons debout que par ces jeux de bretelles, par ces cordelettes qui nous tirent d’en haut, et par ces tiges qui nous tournent d’en bas, marionnettes de fils mélangés d’influences plurielles.

Au « Je » de la société, nous nous la jouons la vie !

Et ça serre, là où une ceinture de croyances nous cerne jour et nuit, là où un corset d’idées fixes nous rigidifie, où un lasso de clichés tout fait nous étouffe.

Nous croyons libre d’écrire comme un jeune Rimbaud, mais des ancres tiennent nos plumes au fond du papier, des amarres nous rivent au quai, des mors limitent nos marges et des carcans éducatifs barrent la route.

Nous nous croyons libres comme le vent, mais nous sommes des vents en bouteille, des mots en cartouche, des pensées de grandes surfaces, des sujets garrottés, entravés jusqu’au croupion des pages.

En nos propres mots, nous nous pensions délivrés du verbe « menotter », mais nous en avons perdu jusqu’à la clé des mains ; nous sommes attachés intellectuellement, affectivement liés, mains et corps liés et maintenus par des opinions puériles ou superstitieuses, par des nœuds inconnus qui nous serrent davantage à chaque tentative de mouvement d’autonomie ; oui, nous sommes bien ficelés de vie, et de partout, comme ligotés jusqu’en des terres d’esclavages, enchaînés au bateau qui nous mène on ne sait où, forçats de nous-mêmes forcés par nous-mêmes, en cette galère de forcenés, comme condamnés à ramer, plus vite, plus fort, mis « au faire » du stress et au banc du « vouloir », tressés et bardés de cordages sans fin, amarrés par des brins bien plus solides que l’acier le plus dur.

Et il faut le savoir, le déni bloque tout déliement, et d’autre part, le renoncement aux liens n’est pas possible dans le défi, car nous « agissons » et « causons » toujours du lieu de nos symptômes, nous sommes par nature incapables de parler d’un autre lieu que du lieu de nos liens. Lien de lieu et lieu de lien, sont les mamelles du nouement.

D’où la nécessité presque surnaturelle, de parler du bon Lieu !

Comme le chicon dans son casier à légume ou le délinquant dans son casier judiciaire, il nous arrive bien trop souvent, que pressés par le temps ou par l’espace, nous soyons de nous-mêmes comme pressés de connaître le dénouement des choses, comme le conclusion d’un film ou la fin d’un roman. Tentés que nous sommes, d’en retourner la couverture pour regarder les dernières images ou en lire les dernières lignes, ne dit-on pas, « qui veut la fin veut les moyens ! »

Mais le dénouement n'a pas de fin, il n’est pas la fin, il n’est que le début d'une épreuve sur le chemin de la preuve ...

Avec l’aide de Carl von Linné, au-dedans de nous, les nœuds gardiens veillent sur nous, ils sont comme des anges éponymes, des messagers entre le ciel et la terre qui tissent à coups de plumes des réseaux sans début et sans fin pour nous laisser le temps et nous donner l’espace.

(…)

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