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Ce qui fait obstacle à la réalité, c’est l’évidence !
prose [ ]

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par [Reumond ]

2012-10-23  |     | 






Il nous est bien difficile de nous défaire de nos préjugés, de nos représentations et de nos connaissances innées ou acquises !

Ce qui fait obstacle à la réalité, ce sont donc les apparences ; pire que le pire des anthropomorphismes, qui nous fait voir des pensées et des sentiments humains chez les dieux et chez les bêtes, il existe chez nous tous une forme de « cosmomorphisme », qui nous fait percevoir le passé, saisir le présent et distinguer l’avenir, en généralisant les choses du monde à l’image de tous les « clichés » que nous possédons déjà …

C’est « ça » qui trompe énormément ! les apparences apparaissent, c’est normal dans un univers « normalisé » !

Tour de passe-passe, illusions d’optique, prestidigitation médiatique, mirage au cœur du miracle, miracle dans le mirage… Comme la TV, l’erreur est grossière, mais elle reste humaine ; le leurre c’est de vouloir le leurre et l’argent du leurre, être la réalité et l’agent du Réel, tout à la fois, être dans la foi et dans le doute !

C’est « ça », l’aberration concrète des choses ordinaires, c’est encore « ça », la chimère qui s’oppose à la réalité de nos petites réalités quotidiennes, c'est-à-dire qui oppose dans un duel titanesque notre imaginaire à « la réalité de la réalité » comme l’écrivait Paul Watzlawick.

C'est bien pourquoi la transfiguration du réel passe nécessairement par le dépassement des apparences, par une forme de distorsion des images, par l’effacement des clichés tout faits, par la dépossession de nos hypothèques de tête et nos certitudes de coeur, par la mise en transfert des apparences, par l’enlèvement des convictions et l’évidement des évidences, tel Magritte qui évide la question de la pomme, ou la théologie négative qui nous dit : Ceci n’est pas Dieu.

Chacun connaît ces histoires de pommes, entre autres, la pomme fatale d’Adam et celle de Newton.

C’est l’erreur intestine d’Adam qui mord la pomme à pleine dent, la croyant « vraie », et qui après ça, transfère sur Eve sa culpabilité, mâchonne sa honte, transforme autrui en bouc émissaire (encore un tour de passe-passe !), et qui malgré tout continue à ne pas digérer la réalité du manque.

Quant au jeune savant Newton, il n’a jamais reçu une pomme sur la tête, il a seulement halluciné la chute, il l’a théorisée (theoria), c’est-à-dire « contemplée », il a examiné le fruit mûr dans la lumière blanche de Lune, et conséquemment, en a déduit la grande loi, celle de la gravitation universelle.

Oui, autour de nous et en nous, tout est gravitation, caricature de caricatures ; alors que la Lune brille dans le ciel, Isaac observe la chute d'une pomme, la pomme de la concorde et de la discorde.

Et pourquoi la Lune ne tombe-t-elle pas aussi, se demande-t-il ? Oui, pourquoi l’homme tarde-t-il autant à devenir lui-même ? Pourquoi tarde-t-il autant à mûrir ? Pourquoi les pensées attirent les pensées et les questions d’autres questions ? (...)

Comme les Satires séduisent les Bacchantes, les pensées attirent les corps de façon proportionnelle au produit de leur masse (c’est aussi la loi de la psychosomatique), et inversement proportionnelle au carré de la distance qui les sépare...

Entre Eve et Adam, c’est l'attraction universelle qui fit tourner leur petit monde, le monde du « On » (on pense que, qu’en pensera-t-on ? ), et ce sont leurs pensées erronées qui firent graviter l’amour, retenu sur son orbite par un fil de tendresse fragile, une force sans support physique, c’est là que la palpitation des chairs, la sueur des peaux, la pelure des pommes, la faille dans nos questions, la sève et la salive se mêlent aux mots pour faire de la poésie. Là encore, la pensée justifie les moyens, le besoin crée la fonction, et cette dernière crée l’organe et toutes les formes de la métaphore.

Qu'est-ce que le réel sinon la somme de nos courtes réalités éclatées, fragmentées dans le miroir brisé de nos hologrammes. La somme de nos métaphores mise bout à bout comme dans un grand rosaire cosmique.

Existe-t-elle vraiment cette « Réalité » qui nous tient aux sens ? Nous porte à parler ou à écrire, et nous colle au sexe, nous noue les tripes comme la nostalgie d’une éternelle Nounou? Et si elle existe vraiment, c'est peut-être par confort, le confort des conformistes !

Si elle existe est-elle plurielles cette Réalité comme toutes les Ève du monde ou est-elle Unique avec un grand qu’U ?

N’est-elle que la dernière représentante d'une génération de gens réels ? peut-être la dernière version téléchargée d’une réalité aussi passagère que personnelle ? Ou un effet virtuel c'est à dire comme la vertu, une réalité qui se réalise ?

(...)

Est-elle le produit d’une consommation psychosociale ou socioculturelle, ou la résultante de milliards d’accommodements mondains, laissés entre les mains gantées des grands prestidigitateurs du pouvoir, ou sous le chapeau noir des fameux illusionnistes du savoir ; derrière le rideau de ces as de l’information, virtuoses de l’image et du langage.

La réalité est-elle un objet fermé à tout jamais, ou à jamais fini et défini entre la dextre experte et patentée des grands manipulateurs ?

La réalité poil au nez, est-elle le sujet de prédilection des gardiens bien penseurs, bien senseurs, et des valets de pied de la morale courante ? La sainte relique des serviteurs de l’Institution et de la conservation des saintes espèces ?

La réalité est-elle le jeu préféré des maîtres de la désinformation et des éducastreurs de liberté surveillée, de toutes les formes de déviance et de tous les arts . Par le vasistas aménagé dans ma tête, à la hauteur de mes pensées, les multiples garants de la contradiction, les surveillants psychiatres et les flics de la normalité me surveillent ; comme Damoclès, j’écris ces mots sous l’épée académique des grands inquisiteurs et des fonctionnaires de la réalité, je tremble et je transpire ; suis-je paranoïaque ?

Pourtant, les traits de la réalité, les mots, les jeux de lumière et d’ombres, les effets de style comme les couleurs de mille réalités bariolées permettent de faire surgir sur scène ce qui n’est pas, ce qui n’est plus, ce qui ne sera jamais ou ce qui n’est pas en corps, c’est en quoi ils sont « scénographique » autant que « calligraphique ».

Existe-t-elle vraiment cette « Réalité » ?

Et si elle existe, comment est-elle, elle qui nous tient aux sens ?
Rive nos regard, nous porte à la contemplation, qui invite à peindre, à parler ou à écrire, elle qui nous colle au pinceau ou au stylo, comme une glue métaphorique.

Comme durant l’Inquisition, au Commencement était « La Question » ; avec la souffrance d’être, l’angoisse, le cri était dans la vie et la douleur dans la nuit, la gestation dans l’Évolution, à l’origine était la quête, le principe même … les problèmes survinrent avec les réponses !

(…)

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