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Poezii Românesti - Romanian Poetry

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C'est Moza qu'on assassine ! (extraits)
prose [ ]
Un chapitre de ZOOM

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par [Reumond ]

2011-10-08  |     | 





« Moça engendra Binéa, Refayo son fils, Eléasa son fils, Acel son fils. Acel eut six fils dont voici les noms : Azriqam, Bokrou, Yishmaël, Shéarya, Ovadya et Hanân. Ce sont les fils d’Acel »

(1 Chroniques 9,43-44)


Mon grand-père Warcisław TOTSKY, engendra Joseph qui engendra à son tour Alexandre.


Et même s’il n’existe pas de connivence entre les deux institutions, selon le Bureau International des poids et mesures, situé au Pavillon de Breteuil, près de Paris, dans le Parc de Saint-Cloud, et La Cour internationale de justice de La Haye, en Hollande, je peux en déduire qu’entre mes ascendants et moi, entre le camp de Treblinka et Charleville-Mézières, il y a 1 455 000 mètres ; à la vitesse de la lumière, dans le plein d’émotion, il me faut exactement …

Depuis des heures, Alexandre, en bon obsessionnel compulsif, tournait et retournait dans sa tête les chiffres de sa chronique personnelle ; son pauvre crâne de descendant de Juif polonais étant prêt à éclater comme un fruit mur, comme ces grenades mûres, ouvertes à la clarté, exposant leurs arilles rouges vif, comme des perles de sang...

Ce qui me fait à parcourir, plus ou moins, 1 mètre 60 cm, pour chacun des 900 000 morts de Treblinka ; c’est-à-dire enjamber, franchir dans le sens de la longueur, la taille d’un enfant, fille ou garçon entre quinze et seize ans.

Tel un rabbin Kabbaliste, recherchant dans les mesures exactes de l'arbre, et les données secrètes de la lumière de vie, Alexandre se tourmentait lui-même les méninges.

Hauteur, âge, tour de poitrine, de taille ou de bassin, à la vitesse de 299 792 458 mètres à la seconde …

C’est de l'ordre des mots et des racines, des causes et des grâces, par le nombre d’or et la racine carrée de règles immuables, déterminées depuis la nuit des temps, par le créateur, pour chacune de ses créatures ; parce que les chiffres, à nombres confondus, seraient la dimension intérieure de la Parole.

Combien de temps faudra-t-il à mon zoom pour franchir ces 1 455 kilomètres à la vitesse de la lumière ?

Il n’est pas possible de raconter n’importe quoi ? Étant donné que les murs des anciens baraquements ont des tempes et des oreilles intemporelles ?

Ce que les zooms connurent à travers la moelle de l’espace et la substance molle du temps n’est pas concevable en mots ! C’est peut-être pour cela que les chiffres parlent !

Même quand les maux sont inavouables, que la réalité est terrifiante, la pellicule se doit de dire quand même la vérité !

Mais là où les flous artistiques ne sont plus de mise, là où cette réalité dépasse tous les effets spéciaux, comment doit-on l’exprimer ?

Dans quel langage doit-on dire la vérité tout entière sans la déformer ?

En son temps, Jésus de Nazareth parlait en paraboles, afin que les intelligents ne voient pas, n'entendent pas, ne comprennent pas. Que veut dire cela ? Torah, Coran ou Bible, tous les Livres Saints ne sont-ils pas en définitive des paraboles ?

Alexandre était là, face à cette situation inextricable, au cœur même du livre et du mystère de l’horreur incarnée.

Face à ces séances de bastonnade qui procèdent la mort, il comptait les coups, et recomptait sans cesse …

Pourquoi tous ces crimes contre l’humanité sont-ils accomplis par des animaux déchainés ?

Pourquoi tous les forfaits contre les animaux sont-ils consommés par des humains ?

Le spectateur et le lecteur de ces extrêmes de la déshumanisation, doivent tout savoir, tout connaître ! Rien ne sert de baisser les yeux ou de détourner son regard ; il ne sert à rien de serrer les poings sur des oreilles gercées, ou de se boucher le nez au comble de l’asphyxie, c’est bien Mosa qu’on brûle !

De Sachsenhausen à Bergen-Belsen, c’est bien l’odeur de la moelle bouillie des os de Sara et de ses enfants que vous respirez !

Même si Rimbaud et Ezéchiel se font visionnaires en des illuminations et des livres intelligibles, ce qui calcine l’âme, carbonise les regards, incinère les souvenirs de bonheur et grille ce qui reste de l’amour, n’ont pas de nom !
C’est ainsi que le nom de Dieu, s’il est la vie même, en ses ombres et lumières n’est pas nommable ! Dieu c’est l’innocent innommable !

Alex est là, comme tétanisé derrière son appareil photo ; aucun filtre ne peut protéger des éclaboussures, quand l’irrationnel prend chair et que le cœur vous chavire.

Sous le joug de la mort, entre les mors des nazis, de dévivification en vivisection, quel est l’esprit qui permet à ces êtres de tenir, de faire face, de survivre à toutes ces atrocités ?

Dans le continuum espace-temps, entre Charleville et le camp nº 2, le temps saigne à mort, rien n’existe de plus affreux au monde, cent fois plus horrible que l’enfer de Dante, une véritable industrie de la mort.

C’est alors que la main d’IHVH fut sur Alexandre

De son magasin de Charleville, Il l’emmena par l'esprit, et le déposa au milieu de la vallée de la mort, une vallée pleine d'ossements. En tous sens, Il lui fit parcourir des yeux le paysage pour le fixer à tout jamais sur la pellicule.

Or les ossements étaient très nombreux sur le sol de la vallée, et ils étaient complètement desséchés. Alexandre se souvenait du prophète Ezechiel et de sa vision, et des paroles mêmes du prophète de Dieu :


" Fils d'homme, ces ossements vivront-ils ? "

Je dis :

" Seigneur Yahvé, c'est toi qui le sais. "

Il me dit :

" Ézéchiel, prophétise sur ces ossements. Tu leur diras

Poussière de poussière, ossements tout desséchés, écoutez la parole de Yahvé. Ainsi parle le Seigneur Yahvé à ces ossements. Voici que je vais faire entrer en vous l'esprit et vous vivrez. Je mettrai sur vous des nerfs, je ferai pousser sur vous de la chair, je tendrai sur vous de la peau, je vous donnerai un esprit et vous vivrez, et vous saurez que je suis Yahvé. "

Alors, suivant l’ordre de IHVH, je prophétisai.

Or il se fit un grand bruit au moment où je prophétisais; il y eut un frémissement et les os se rapprochèrent les uns des autres. Je regardai : ils étaient recouverts de nerfs, la chair avait poussé et la peau s'était tendue par-dessus, mais il n'y avait pas d'esprit en eux.

Il me dit :

" Prophétise à l'esprit, prophétise, fils d'homme. Tu diras à l'esprit : ainsi parle le Seigneur Yahvé. Viens des quatre vents, esprit, souffle sur ces morts, et qu'ils vivent. "

Du bruissement des os, une complainte semblait sortir.

Dans le lointain, de toute la vallée montait une mélodie.

La petite musique de nuit n’a jamais été aussi ténébreuse, pensais-je, la chambre noire n’a jamais été aussi rouge !

Ce cri dans la pestilence des chairs marbrées, C’est Woody Allen, Bergson, Blum ou Chouraqui qu'on assassine.

Et progressivement, s’élèvent les notes d’un requiem en ré mineur, comme un appel, une grande déchirure dans le ciel.


Lux Æterna:Lux æterna luceat eis, Domine, cum sanctis tuis in æternum,

quia pius es. Requiem æternam dona eis,

Criaient des anges piétinés et déchiré par de cruelles mains, des femmes violentées en des formes étranges ; la nuit tombait sur Treblinka, la nuit tombait sur Charleville…

Domine, et lux perpetua luceat eis,cum sanctis tuis in æternum, quia pius es...

De cette grande communion des chairs brulées et des cendres incandescentes,

Montait un chant plus fort que la mort, une lumière plus brillante que la poussière grise…

Lux Æterna:

(Soprano, puis le chœur des persécutés)

Que la lumière éternelle luise pour eux, Seigneur, au milieu de vos Saints et à jamais, car vous êtes miséricordieux.

(Chœur des indignés)


Seigneur, donnez-leur le repos éternel faites luire pour eux la lumière sans déclin. Au milieu de vos Saints et à jamais, Seigneur, car vous êtes miséricordieux.

Il pleut sur Treblinka et dans les yeux de Sara, il pleut, c’est la gorge nouée des jeunes vierges consumées, la voix déchirée des anges et des jeunes castrats qui montent comme des relents d’encens.

Croix roses, rouges ou jaunes, ce sont toutes les couleurs fondamentales que l’on piétine, c’est l’humanité qui se fait égorgée, c’est bien Mosa qu’on assassine à coups de pieds.

Sous les potences gisent les mots de l’horreur et les questions sans réponse !

Pourquoi les pendaisons ont-elles lieu le soir ?

Les rayés de la vie, le termensh, qu’il soit communiste ou noir abattu comme des chiens,

toutes les inquisitions, tous les grands génocides perpétrés au fil des siècles, c’est mon apocalypse !

La tête entre les mains, Alexandre pleure sur ses ancêtres ! Il regarde sur son bureau le portrait d’Arthur Rimbaud par Carjat, pour revenir à lui, mais le vertige des vestiges du pire le reprend.

De Buchenwald à Paris, c’est l’ami homosexuel que l’on castre à main nue, le handicapé que l’on dissèque pour rien, c’est pour chacun de nous, tous les assassinés pour leurs différences que l’on porte démembrés vers les fours tout brûlants.

C’est l’éternel massacre des Innocents !

Alexandre est là, courbé par le poids des images, le zoom taché d’un sang trop rouge et de cette boue qui crotte les visages. C’est la grande abomination,

Les mains pleines de rage, il zoom encore, puisqu’il est là, transporté en ces lieux par quelques mirages, pour photographier de ses propres objectifs, les mains coupées du poète et les mains écrasées du musicien ; car c’est bien Mosa qu’on assassine ici et maintenant, là où vous êtes !

Nuit et brouillard sur Treblinka, quintette des corps dans les zones barbelées, jeux des cordes en mi bémol majeur, pour des pendaisons sans raison.

Les cheminées sont noires de suie, comme les tuyaux ténébreux des grandes orgues en de morbides cathédrales ; c’est Wolfgang que l’on brule, Amadeus que l’on pend aux cordes d’un violon.

Aucun négationnisme, aucune désinformation, ne pourra jamais taire le cri des enfants de Gaza, ou ceux de n’importe quel lieu ou souffre quelqu’un.

À bout de souffle, les crématoires crachent le feu ; c’est la célébration d’un culte sordide !

Ce n’est pas à l’heure un chant de bénédiction, des accents de joie, de louange ou de reconnaissance qui montent avec les fumées noires d’un grand cérémonial de mort, mais c’est un culte à Baal qu’aucune justification théologique, sociale ou culturelle ne peut idéaliser ou innocenter,


(…)

Extrait de ZOOM

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