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■ L'hiver
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- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - 2010-04-08 | |
"Le conte, se situe toujours entre le miroir des mots et le reflet des jours"
Il y a toujours des « il était une fois … » dans les grimoires familiaux ; ainsi que des secrets de familles qui s’entremêlent les nœuds aux contes et légendes, toute une généalogie qui se fait mythologie au fil des tempes grisonnantes. Ici, Merlin et Mélusine se font génies dans la cuisine ! Sur la table des Grand-mamans trône un livre de magie pour fabriquer bonbons tendres, pâtisseries et philtres d’amour. C’est là que les odeurs et les couleurs les plus subtiles se changent en miracles, en charmes aux mille vertus divines. Il y a en ce lieu des cuillères de bois torsadées comme des baguettes de fée, et des marmites qui bouillonnent; des boules de cristal, des pierres précieuses ou philosophales et quelques alambics à distiller le chocolat et l’arc en ciel. « Il était une fois… la dernière peut-être ? » Des mots qui vous collaient ou vous encollent à la peau, à la rétine, à l’haleine comme du caramel mou, telles ces images fabuleuses qui vous apprêtent la mémoire et vous accompagnent depuis toujours sur les sentiers les plus épineux ; infatigables compagnons, légions d’anges gardiens, messagers d’un inconscient encore plus collectif que les grains de sable de la mer. Noir ou blancs, comme la magie des heures, chaque jour épaule et couche son grabat de merveilles, ses énigmes et puzzles perdus, ses rébus aux nids des labyrinthes obscurs des récits de la vie. Nulle fable n’est aussi vraie que la main qui touche l’invisible et que l’oreille qui porte son lot de légendes, de murmures, de non-dit, de rumeurs dans le vent. Il y a toujours des chats dans les placards et des cavernes au goulot des lits, sous le lit ou sous les draps des gouffres enfoncés ; derrière les portes au coucher de l’ombre, des bruits étranges, des souffles inquiétants…, et toujours des enfants pour se faire peur et jouer le jeu. « Il y avait, il y a … » des lieux saints et maudits où le temps semble s’arrêter sur un ordre des aiguilles trop pointues et l’ordonnance des espaces qui sont comme des dédales en nos jambes trop courtes, pour se clore et se déclore dans un silence glacé, dans le flux et le reflux des songes et le va-et-vient des chimères. « Il était mille fois … » La blanche neige et la nuit noire s’étranglent dans les petits cœurs serrés ! Entre racontars et raconté, il y a interminablement des conteurs pour tisser la trame des mots, des poètes pour recréer des mondes où la réalité dépasse la fiction, et se joue de nos sentiments comme autos tamponneuses. Il y a inlassablement, des sorciers et des spectres de nuits de pleines lunes ; des cris dans l’obscurité, des déménagements imprévus, des conflits parentaux, des maisons abandonnées au cœur de forêts étranges, des gnomes d’écoles, des adultes pour jeter des sorts et lancer des gros mots qui font mal, en des lieux hantés par des enchanteurs désenchantés aux allures de curé, de gendarmes et autres professeurs. Il y a régulièrement des châteaux en ruines, des vieux gentils et de vieux méchants comme la teigne, des orties partout, des puits sans fond et sans âge, des fées blondes et rousses, des elfes S.D.F., des nains sans papier et des géants de la taille des rêves, des dragons et des ogres qui mangent l’avenir. Et à côté de nous, dans l’ombre, des lions qui sont des Rois ou des Princes cachés …, des amis de magie totale. « Il y avait, il y a, et demain peut-être … » Des escaliers qui font peur aux petits enfants et aux adolescents ; des couteaux effilés, des lieux de mutilation, des passages à passer et repasser, du sang sur les poignées, des tiroirs et coffres confidentiels, des passages secrets, des piles de papiers à trier, des pièces et des chambres à perte de vue avec des armoires mystérieuses. « Il était … et qu’en est-il ? » Il y a partout des caves obscures et des greniers encombrés par mille vieux objets à l’usage mystérieux, de vieux livres et des miroirs avec leur au-delà , et des démons avec leur ici-bas ; et surtout les nuits, où nous sommes là , seuls dans la maison, en pyjama, dénudé face à nos propres démons, avec nos émotions vives, nos sensations pures, peau contre écailles, les doigts crispés, les yeux dans l'œil du monstre, qui sommeille en chacun de nous. Le terreux, le fangeux, le bourbeux, que nous sommes, l’homme en marche, est le fruit des rêves et des mythes qui le fond depuis la nuit des âges ; son enfance se perpétue ! Entre ses songes d’une nuit d’été et ses cauchemars d’un jour d’hiver, quelle expérience, quel conte à dormir debout l’a un jour dressé sur ses deux pattes ? Quel pain béni à t-il manger au fin fond de ses cavernes pour méditer ainsi devant l’horizon ? Quelle faille dans l’espace-temps s’est-elle un jour de printemps outre ouverte, pour que jaillisse au fond de son inconscient, fumées étincelles, génies et gnomes de tous les maux, toutes les formes et les couleurs ? Quelle incantation ? Quel sortilège, talisman, amulette d’os, écriture sacrée ? Quelles prières ou évocations ? Quelles blessures de l’âme et du corps ? Quelles apparitions d’esprits ? Quelle nuit de Sabbat ? Quelles formules magiques ou biologiques ? Quelle divinité a-t-elle envoyé ses anges, et quels démons ont-ils désirés le désir de l’homme à ce point là , pour qu’il peuple forêts et montagnes, mers et campagnes, avec les clans de Farfadets, de lutins et d’étrangers à marier ? Les miroirs de tout temps, le reflet des eaux, l’écho des falaises en racontent des histoires d’enfants ! Quelle complicité entre le Ciel et la Terre, l’eau et l’air, la glaise et le feu, pour que ces derniers se disposent en alphabets, pour ponctuer les besoins de l’être, virguler les fractures de l’âme et pointer de nouveaux horizons ? Quel conte ! À prendre le rêve pour la réalité, l’animal se fait homme, et la bête s’humanise entre ses angoisses et ses rêves ancestraux ; les souvenirs tissent leurs mots pour sculpter des histoires, tout comme le verbe se fait chair pour que la chair se conte, s’écrive, se dise aux vents et au bruit de la pluie ; que la chair offerte à la lumière s’invente des gestes et des arts nouveaux, se calligraphie sur la voute céleste, et se chorégraphie avec les étoiles. Quel conte ! À prendre ses rêves pour la réalité, l’animal se fait homme, et la bête s’humanise, se raconte, se tisse, tel un tissu de choses déjà réalisées et de vérité virtuelle en cours …, le temps souligne le lien tissé de nos histoires communes ; dans la nuit des contes, là où dans l’histoire avec un grand H.L.M l'existence est un monstre à mille têtes ! La main seule connait les mots que la bouche ignore ! C'est bien pourquoi elle autographe goutte-à -goutte les jours de mauvais temps, des larmes de pluie et dessine sur le papier de riz jaune, des soleils sans pareils dans des livres de merveilles, pleins de Bergères et de Ramoneurs, de Blanche-Neige et de sorcières. La vie est un superbe cadeau à déballer, un extraordinaire conte au quotidien, mais encore faut-il saisir que le véritable cadeau, le don, est dans l'emballage lui-même, dans le retournement, la torsion des mots et des rubans, dans les plis du papier de la peau, des rêves, dans les rides entre vides et pleins, intériorité et extériorité, et tout le reste n’est qu’illusion ! Dans les yeux des enfants, ce sont des étoiles déposées par quelques fées qui brillent comme les Habits neufs de l’empereur ou bien comme la robe bleue de la princesse Peau d'Âne. Entre mythe, contes et légendes, virtuel et réel …, les enfants savent tisser des fils, trouver le sens et tirer des ponts. L’essentiel consiste pour eux à transformer les peurs, à transfigurer les expériences, rêver la vie, vivre le jeu, par cette subtile alchimie du « Jeu » pour devenir « Je », en changeant le manque en eau, les poussières en étoiles, l’eau en vin, les images en miel et les maux en mots. Les enfants aiment nous parler à l’oreille, car ils savent d’instinct que même les murs nous écoutent ! Entre les lobes et les hélix, les mots circulent, d'un pavillon à l'autre, comme pour nous habiter d’une présence habitée ... Ici tout le monde, connait tout le monde ! Aladin à lampe merveilleuse connait Ali Baba et les Quarante Voleurs, ils habitent le même H.L.M. ; alors que Barbe bleue comme la Belle de la Bête logent aux châteaux, et non entre deux haies telle La Belle au bois dormant. Enfants d’aujourd’hui et d’hier, bouches ouvertes à boire les mots, à gober les images pour construire en soi, un soi, une terre d’accueil, et en faire un monde à part, où l’enfant est toujours « Roi », d’une cour où le Vaillant Petit Tailleur côtoie Hansel et Gretel, Jack et son Haricot magique, le Joueur de flûte et bien d’autres stoïques Soldats de plomb alchimique (…) |
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