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■ L'hiver
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- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - 2009-11-27 | | À peine utilisés, les mots sont déjà avariés, à varier sans cesse aux arrêts pour trouver les meilleurs, les bons mots, les plus justes, le plus … ; mais à grande peine écrits, criés ou dits aux saillies de l’aurore, ils sont déjà trop vieux, trop rances, moisis à vomir , écœurants et nauséabonds. Entre la déception des mots trop pleins de sémiotique, et l’amertume des merdes littéraires trop vides ; entre l’artifice et l’abîme abîmé des lexiques, le temps d’une métaphore ou l’espace d’un vers, et les mots dépassés et sentent déjà mauvais ! Pourquoi sont-ils déjà avariés ? Attente aux bonnes mœurs ? Atteinte aux gros et bons mots ? Plagiat ? Avarie sémantique ou bien avarice du Verbe ? Qui sait ce qui se passe entre les pages, dans le mystère des feuillets taris, quand les mots y manquent de folie - quand ils y font les morts, immobiles, tout raides et glacés. Il faut se méfier des mots avariés quand la main n’est plus fébrile, quand l’écriture ne fait plus saliver, là où le désir s’estompe en mal de dopamine, et quand le frisson se fait mou ou trop dur, la gourmandise tiède, la lecture gâteuse, l’œil trouble …, alors il faut se méfier des mots avariés ! Pourquoi cette détérioration, cette usure, ce péché véniel des rimes se transformant en pourriture de mauvais goût ? Pourquoi ces dommages causés à la lettre même par l’infection, ou à la poésie par affliction : mauvais choix, illusion, trop de mièvrerie, pas assez de rêverie … ? Qui sait pourquoi les mots s’oxydent, rouillent, s’altèrent au contact du papier ? Blessures, écritures, rognures, nouures, tout n’est que pourriture à l’ombre triste des porteplumes, des Bics tout tendus comme des drapeaux en peine, dans l’attente stressante d’un mot, d’une idée, d’un espoir, d’un passage … Il faut bien se méfier des mots avariés, des hypocrisies, des discours académiques …, que de phrases gâtées aux dits du réel, que de gâchis dans cet espace en expansion qui cherche mots, beauté, fraîcheur, nouveauté … ; mais à l’horizon des marges, il ne subsiste rien, rien d’autre que des mots creux, des mots sans saveur qui ne disent plus rien du tout; des mots qui sont comme des bidons secs et des bubons vides, qui à terme, à la fin d’un contrat tacite, ont vidé tout leur contenu, ou ont été asséchés de tous leurs sens. Il faut se méfier des mots avariés quand la main n’est plus fébrile et quand l’écriture ne fait plus saliver, quand le cœur ne palpite plus et que la pupille reste petite. Il faut se méfier des mots avariés quand au lieu de l’écriture, c’est-à -dire au lieu de gravité de l’être, il ne reste que des expressions stériles aux fonds de leur vase molle ; des varons pustuleux perçant jusqu’au papier. Il faut nous méfier des mots avariés, quand nos neurones ne produisent plus assez d’endorphines, et que l’élan ne connait plus cette attirance toute physique pour l’écrit ; quand les effets euphorisants de la graphie diminuent, et que les couleurs se font ternes, les horizons flous et les lignes nauséeuses. Quand les mots nous semblent avariés, il nous faut ouvrir les yeux, regagner une force de vigilance, et en nous-mêmes puiser à la source du bien-être. Il nous faut rejoindre ce temple béni et sacré où l’esprit et le cœur de l’écriture se font calligraphie entre le ciel et l’eau. Retourner sur cette île où l’écriture se fait besoin essentiel, reconquérir à la force du poignet cette fraicheur de l’enfance de l’art, et le rythme tumultueux de la vie, qui réduit votre appétit et votre besoin de sommeil. À la nage, dans l’encre houleuse regagner ces plages où règne une certaine euphorie, un optimisme béat, une hyperactivité graphique qui fait travailler le corps et l’âme, comme dans le chant de l’amour, faisant œuvrer les articulations de l’âme et des chairs transpirantes. Coup de main à Bic rompu, levant les images et les inhibitions. Comme une bonne drogue qui suscite de l’humeur et de l’humus, de la bonne ou de la mauvaise humeur, qu’importe, ce qui compte, c’est l’euphorie du trait, le mouvement et l’être, la vie et l’optimisme de la marge, l’hyperactivité des porteplumes en route pour de grands voyages. L’écriture est mue par les hormones de l’être, qui ont le mérite de faire baisser le niveau de stress et d’angoisse et d’élever des pans entiers d’écriture. Mais, à grand-peine transcrits, au papier gavé et gravé d’encres, ils ne sont déjà plus bons, déjà plus frais, insipides ou bien trop froids, pour dire quelque chose de l’essentiel. Ainsi, sur les billots de la vie, à l’étal des vitrines, aux crochets des librairies et des salons de lecture, à l’écran où ruissellent les génériques et les publicités, producteurs, auteurs, éditeurs ou bouquinistes peu scrupuleux commercialisent leurs mots avariés ; pour gagner quoi ? Mettre un peu de leurre dans les canards ? Un peu de réalité ou d’imaginaire au fond des purgatoires ? Un zeste de gloire ? Gravir les stalles et publier des mémoriaux ? Attirer beaucoup de mouches à mots ? Comment savoir ! À peine usagés, les mots sont déjà trop lourds, avariés jusqu’à l’os. Quand la mouche vous Bic, à peine écrits, dits ou criés aux creux de la nuit, ils sont déjà trop anciens, trop pisseux, et blettes à mourir ou à s’abêtir encore. |
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