Natacha Belova, c’est tout un univers de poésie, et des spectacles vivants où le spectateur devient malgré lui l’acteur d’une rencontre improbable avec lui-même, pantins amusé ou déconcerté, c’est un déconcertant spectacle de notre condition humaine.

Car toute marionnette qui est, renvoie toujours à notre image, comme l’image et la ressemblance dans le monde judéo-chrétien renvoient au Créateur, c’est-à-dire au Réel grand R qui dépasse nos convictions de papier mâché et toutes nos petites et mesquines réalités.

L’image de la marionnette est toujours de l’ordre de la confrontation ! Même pour un habitué du Festival mondial des théâtres de marionnettes de Charleville, le résultat des réalisations de Natacha Belova est toujours bluffant !

Ici même, la fiction sculpte la réalité, la mystification est totale et en observateurs ou spectateurs abusés, nous sommes nous-mêmes introduits dans cette scénographie, dans un monde absolument fantasmagorique, burlesque même et insolite autant qu’il peut se montrer sarcastique à outrance.

C’est un voyage au pays de l’extraordinaire, est le résultat d’une osmose, comme l’attraction d’une image dans le miroir, une osmose qui me fait penser aux masques de James Ensor. Et puis, il y a l’aboutissement entre le jeu du marionnettiste manipulateur et le jeu de la marionnette qui n’en est que plus « Ensor – celant », dans une forme de symbiose entre l’opérateur (l’être humain) est son extension, sa prothèse, sa création.

C’est incroyable ; comme un surcroît de vie où Pinocchio et ses pairs deviennent eux-mêmes des escamoteurs rieurs, qui, en un tour de main nous métamorphosent carrément en pantins, nous qui en vérité, comme dans un tableau ensorien ne sommes faits que de masque saugrenu sur un squelette bien fragile.

Comme l’animal de compagnie fini toujours par ressembler à son maître ou comme tel visage fixant un paysage fini par le refléter,la marionnette achevée finie par nous correspondre, dans une fascinante magie, faite de métamorphose vestimentaire, d’alchimie du langage qui vient gommer la relation traditionnelle « manipulateur – manipulé ».

Des réalisations et des spectacles qui interpellent, car au-delà des apparences et de nous-mêmes, ne sommes-nous pas des marionnettes pathétiques, des Golems qui ne sont que les Clones de clowns savants ; ne sommes-nous pas tous, sans acception de pauvres créatures sans nom cherchant la reconnaissance et l’amour, des êtres hybrides préfabriqués entre les mains de jeunes savants fous, docteurs en frankensteineries dans les laboratoires de la société et de la culture ?

Nous-mêmes, ne sommes-nous pas de pauvres créatures faites de terre et de sens, de chairs et d’idées fixes et d’eau, recouvert d’un tissu plus ou moins façonné et cousu selon des critères sociétaux ou culturels ?

En fait, ne sommes-nous pas tous des marionnettes burlesques, pendue entre le ciel et la terre, tels des êtres inachevés, en suspens au bout d’un fragile fil d’Ariane toujours prêt à casser ?

Lien internet vers le site de Natacha Belova http://www.belova.be