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■ L'hiver
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- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - 2004-05-12 | | Inscrit à la bibliotèque par Mariana Cardas
« Monseigneur le duc de Bretagne
A, pour les combats meurtriers, Convoqué de Nante à Mortagne, Dans la plaine et sur la montagne, L'arrière-ban de ses guerriers. « Ce sont des barons dont les armes Ornent des forts ceints d'un fossé ; Des preux vieillis dans les alarmes, Des écuyers, des hommes d'armes ; L'un d'entre eux est mon fiancé. « Il est parti pour l'Aquitaine Comme timbalier, et pourtant On le prend pour un capitaine, Rien qu'à voir sa mine hautaine, Et son pourpoint, d'or éclatant! « Depuis ce jour, l'effroi m'agite. J'ai dit, joignant son sort au mien: Ma patronne, sainte Brigitte, Pour que jamais il ne le quitte, Surveillez son ange gardien! « J'ai dit à notre abbé: - Messire, Priez bien pour tous nos soldats! Et, comme on sait qu'il le désire, J'ai brûlé trois cierges de cire Sur la châsse de saint Gildas. « A Notre-Dame de Lorette J'ai promis, dans mon noir chagrin, D'attacher sur ma gorgerette, Fermée à la vue indiscrète, Les coquilles du pèlerin. « Il n'a pu, par d'amoureux gages, Absent, consoler mes foyers; Pour porter les tendres messages, La vassale n'a point de pages, Le vassal n'a point d'écuyers. « Il doit aujourd'hui de la guerre Revenir avec monseigneur; Ce n'est plus un amant vulgaire; Je lève un front baissé naguère, Et mon orgueil est du bonheur! « Le duc triomphant nous rapporte Son drapeau dans les camps froissé, Venez tous sous la vieille porte Voir passer la brillante escorte, Et le prince, et mon fiancé! « Venez voir pour ce jour de fête Son cheval caparaçonné, Qui sous son poids hennit, s'arrête, Et marche en secouant la tête De plumes rouges couronné! « Mes soeurs, à vous parer si lentes, Venez voir près de mon vainqueur, Ces timbales étincelantes Qui, sous sa main toujours tremblantes, Sonnent et font bondir le coeur! « Venez surtout le voir lui-même Sous le manteau que j'ai brodé. Qu'il sera beau ! c'est lui que j'aime! Il porte comme un diadème Son casque de crins inondé! « L'égyptienne sacrilège, M'attirant derrière un pilier, M'a dit hier (Dieu nous protège!) Qu'à la fanfare du cortège Il manquerait un timbalier. « Mais j'ai tant prié, que j'espère! Quoique, me montrant de la main Un sépulcre, son noir repaire, La vieille aux regards de vipère M'ait dit : - Je t'attends là demain! « Volons ! plus de noires pensées ! Ce sont les tambours que j'entend. Voici les dames entassées, Les tentes de pourpre dressées, Les fleurs et les drapeaux flottants. « Sur deux rangs le cortège ondoie. D'abord les piquiers aux pas lourds; Puis, sous l'étendard qu'on déploie, Les barons, en robe de soie, Avec leurs toques de velours. « Voici les chasubles des prêtres; Les hérauts sur un blanc coursier. Tous, en souvenir des ancêtres, Portent l'écusson de leurs maîtres, Peint sur leur corselet d'acier. « Admirez l'armure persane Des templiers, craints de l'enfer; Et, sous la longue pertuisane, Les archers venus de Lausanne, Vêtus de buffle, armés de fer. « Le duc n'est pas loin: ses bannières Flottent parmi les chevaliers; Quelques enseignes prisonnières, Honteuses, passent les dernières... Mes sueurs ! voici les timbaliers l... » Elle dit, et sa vue errante Plonge, hélas ! dans les rangs pressés; Puis dans la foule indifférente, Elle tomba froide et mourante... Les timbaliers étaient passés. Octobre 1825.
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