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■ Voir son épouse pleurer
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- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - 2006-11-11 | | Inscrit à la bibliotèque par Guy Rancourt
Larme argentine, humide et distillante
Des beaux yeux clairs, descendant coye et lente Dessus la face, et de là dans les seins, Lieux prohibés comme sacrés et saints. Larme qui est une petite perle Ronde d’en bas, d’en haut menue et grêle En aiguisant sa queue un peu tortue Pour démontrer qu’elle lors s’évertue Quand par ardeur de deuil, ou de pitié Elle nous montre en soi quelque amitié, Car quand le cœur ne se peut décharger Du deuil qu’il a pour le tôt soulager Elle est contente issir hors de son centre, Où en son lieu joie après douleur entre. Larme qui peut ire, courroux, dédain, Pacifier et mitiguer soudain, Et amollir le cœur des inhumains, Ce que ne peut faire force de mains. Humeur piteuse, humble, douce et bénigne, De qui le nom tant excellent et digne Ne se devrait qu’en honneur proférer, Vu que la mort elle peut différer, Et prolonger le terme de la vie, Comme l’on dit au livre d’Isaïe. Ô liqueur sainte, ô petite larmette, Digne qu’aux cieux – au plus haut – on te mette, Qui l’homme à Dieu peut réconcilier, Quand il se veut par toi humilier. Larme qui apaise et adoucit les dieux, Voire éblouit et baigne leurs beaux yeux Ayant povoir encor sus plus grand-chose, Et si ne peut la flamme en mon cœur close Diminuer, et tant soit peu éteindre : Et toutefois elle pourrait bien teindre La joue blanche et vermeille de celle Qui son vouloir jusques ici me cèle. Ô larme épaisse ou compagne secrète Qui sais assez comment amour me traite Sors de mes yeux, non pas à grands pleins seaux, Mais bien descends à gros bruyants ruisseaux, Et tellement excite ton povoir Que par pitié tu puisses émouvoir Celle qui n’a commisération De ma tant grande et longue passion. (Blason de Maurice Scève, 1536)
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