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■ Magnolia
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- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - 2021-08-10 | | Inscrit à la bibliotèque par Guy Rancourt
j’habite une blessure sacrée
j’habite des ancêtres imaginaires j’habite un vouloir obscur j’habite un long silence j’habite une soif irrémédiable j’habite un voyage de mille ans j’habite une guerre de trois cent ans j’habite un culte désaffecté entre bulbe et caïeu j’habite l’espace inexploité j’habite du basalte non une coulée mais de la lave le mascaret qui remonte la valleuse à toute allure et brûle toutes les mosquées je m’accommode de mon mieux de cet avatar d’une version du paradis absurdement ratée -c’est bien pire qu’un enfer- j’habite de temps en temps une de mes plaies chaque minute je change d’appartement et toute paix m’effraie tourbillon de feu ascidie comme nulle autre pour poussières de mondes égarés ayant crachés volcan mes entrailles d’eau vive je reste avec mes pains de mots et mes minerais secrets j’habite donc une vaste pensée mais le plus souvent je préfère me confiner dans la plus petite de mes idées ou bien j’habite une formule magique les seuls premiers mots tout le reste étant oublié j’habite l’embâcle j’habite la débâcle j’habite le pan d’un grand désastre j’habite souvent le pis le plus sec du piton le plus efflanqué-la louve de ces nuages- j’habite l’auréole des cactacées j’habite un troupeau de chèvres tirant sur la tétine de l’arganier le plus désolé à vrai dire je ne sais plus mon adresse exacte bathyale ou abyssale j’habite le trou des poulpes je me bats avec un poulpe pour un trou de poulpe frères n’insistez pas vrac de varech m’accrochant en cuscute ou me déployant en porana c’est tout un et que le flot roule et que ventouse le soleil et que flagelle le vent ronde bosse de mon néant la pression atmosphérique ou plutôt l’historique agrandit démesurément mes maux même si elle rend somptueux certains de mes mots (Aimé Césaire, Moi, laminaire…, 1982)
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