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■ Magnolia
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- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - 2015-05-28 | | Inscrit à la bibliotèque par Guy Rancourt C’est l’heure où je descends t’attendre sur la grève Tu disais : « Je viendrai quand me voudra ton rêve » ; Viens, mes bras étendus t’adjurent frissonnants, Ma voix impérieuse et magique t’évoque, La réalité meurt dans le soir équivoque Nous nous retrouverons, l’heure est aux revenants. Me vois-tu, me vois-tu debout sur la terrasse ? Oh ! moi j’ai deviné déjà ton ombre lasse, Avant mes yeux mon cœur plus prompt t’a reconnu, Mon cœur avide goûte enivré ton approche Et j’ai dit seulement sans remords ni reproche : « C’est toi ! je savais bien que tu serais venu ! » Déjà tes lèvres sont à mes lèvres scellées Nous allons défaillants par les blanches allées Où les pavots d’argent bercent leur encensoir, Viens, faisons souvenir les troènes, les roses De ces temps au-delà de leurs métempsycoses Où comme nous, amants, ils s’étreignaient le soir. Quand vous vous abreuviez d’amour au bord des couches Ô fleurs, quand vous tendiez toutes vos frêles bouches Vers la source aux baisers que vous n’épuisiez pas – Vois, le tamaris cède au vent qui l’assiège ; Et vaincue elle aussi par notre sortilège Daphné dans les lauriers entrouvre ses doux bras. Laisse-moi reposer le front sur ton épaule, Emmène, emporte-moi, muette au bout du môle Donnons à notre amour la double immensité Du ciel nocturne empli de notre nostalgie Et de la mer qu’émeut notre humaine magie Autour des rochers lourds de notre volupté. Appareillons ensemble aux épars sourds des phares ; Une invisible main détache nos amarres, Voguons au fil de l’eau, voguons au fil du vent, Voguons à l’infini le front couronné d’astres Sous la lune qui jette en lumineux pilastres Ses rayons sur la mer, notre palais mouvant. Ô vertige divin ! voguons à la dérive… La vie est sans raison, notre rêve sans rive, Notre voile est de brume, un étrange jardin Fait à nos yeux d’extase irradier la flore Des algues de safran de soufre et de phosphore Entre le flux subit et le reflux soudain. Viens ! Je sais quelque part sur la mer ignorée Une île de bonheur fabuleuse et dorée Que les souples embruns cachent sous leur toison. Viens ! d’une voix lointaine, ivre, surnaturelle Le cortège divin des amants nous appelle, Viens éternellement ! l’île est à l’horizon ! À l’horizon ! à l’avenir ! à l’aventure ! Viens ! nous aurons du moins vu la cité future Si nous n’abordons pas à son port radieux ; Nous aurons deviné dans les nuits vaporeuses Ses temples transparents, ses âmes bien heureuses Et sa chimère d’or aura séduit nos yeux. Mais pourquoi ton visage est-il pâle, si pâle ! Nos doigts sont désunis par la brusque rafale, Notre barque chavire au milieu des récifs… Nos cadavres meurtris ont roulé sur la grève. Tu disais : « Je viendrai quand me voudra ton rêve…» ; …………………………………………………………. Je suis seule et les vents se sont levés plaintifs (Jeanne Neis-Nabert, « Carnets d’une morte » in Silences brisés, 1908, pp. 99-102)
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