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■ Magnolia
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- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - 2015-03-10 | | Inscrit à la bibliotèque par Guy Rancourt Nous sommes debout Debout et nus et droits Coulant à pic tous les deux Aux profondeurs marines Sa longue chevelure flottant Au-dessus de nos têtes Comme des milliers de serpents frémissants Nous sommes droits et debout Liés par nos chevilles nos poignets Liés par nos bouches confondues Liés par nos flancs soudés Scandant chaque battement du coeur Nous plongeons nous plongeons à pic Dans les abîmes de la mer Franchissant chaque palier glauque Lentement avec la plus grande régularité Certains poissons déjà tournent Dans un sillage d'or trouble De longues algues se courbent Sous le souffle invisible et vert Des grandes annonciations Nous nous enfonçons droits et purs Dans l'ombre de la pénombre originelle Des lueurs s'éteignent et jaillissent Avec la plus grande rapidité Des communications électriques Crépitent comme des feux chinois autour de nous Des secrets définitifs Nous pénètrent insidieusement Par ces blessures phosphorescentes Notre plongée toujours défiant Le sang rouge du coeur vivant Nous roulons nous roulons Elle et moi seuls Aux lourds songes de la mer Comme des géants transparents Sous la grande lueur éternelle Des fleurs lunaires s’allongent Gravissant autour de nous Nous sommes tendus droits Le pied pointant vers les fonds Comme celui du plongeur renversé Déchirant les aurores spectrales L’absolu nous guette Comme un loup dévorant Parfois une proue de galère Avec ses mâts fantômes de bras Parfois de courts soleils pâles Soudain déchirent les méduses Nous plongeons au fond des âges Nous plongeons au fond d’une mer incalculable Forgeant rivant davantage L’implacable destin de nos chaînes Ah plus de ténèbres Plus de ténèbres encore Il y a trop de poulpes pourpres Trop d’anémones trop crépusculaires Laissons le jour infernal Laissons les cycles de haine Laissons les dieux du glaive Les voiles d’en haut sont perdues Dans l’arrachement des étoiles Avec les derniers sables Des rivages désertés Par les dieux décédés Rigides et lisses comme deux morts Ma chair inerte dans son flanc creux Nos yeux clos comme pour toujours Ses bras mes bras n’existent plus Nous descendons comme un plomb Aux prodigieuses cavernes de la mer Nous atteindrons bientôt Les couches d’ombre parfaite Ah noir et total cristal Prunelles éternelles Vain frissonnement des jours Signes de la terre au ciel Nous plongeons à la mort du monde Nous plongeons à la naissance du monde (Alain Grandbois, L’étoile pourpre, 1957)
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