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■ L'hiver
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- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - 2010-08-21 | | Inscrit à la bibliotèque par Guy Rancourt J'ai caressé ma lyre avec mes mains lassées Et j'ai gravi la côte où j'ai souvent marché, Et j'ai baisé les fleurs des branches enlacées, Et j'ai suivi mon rêve, allant au but cherché. Le coeur battant à coups précipités, dans l'ombre; Un seul désir dans l'âme, une larme à mon cil, Voyant le ciel trop noir et la cité trop sombre, Je t'ai suivi, mon rêve angoissant et subtil! … Suivre son rêve, aller quand le sort vous appelle, Au crépuscule tendre errer seul et pensif, Et regarder le ciel quand le chagrin rebelle A meurtri le Coeur pur sanglote, passif… …Le ciel est noir, mais quelque chose, Un point à reflets chatouillants, Un semblant de prunelle rose, Un astre aux feux doux, ondoyants… Ainsi que l'étoile, naguère, Bethlehem aux Mages montrant, L'astre qui me guide m'attend À la porte du cimetière. Enfant depuis longtemps parti, Ô frère devenu bel ange, Pardonne à ma voix, mon petit, Ma triste voix qui te dérange! Que ta forme, sans s'attarder, Reprenne la robe éphémère De son enfance et de sa terre Et vienne un peu me regarder ! Te souvient-il de notre enfance ? Toi vieux de quelques mois, Mimi; Moi, fière de mon importance, J'avais bien deux ans et demi; Nous dormions souvent côte à côte Amusés de nos entretiens Composés de rire et de riens, À voir une mouche qui saute; Parfois nous nous battions bien fort, Et tu mordais ma main osée Qui touchait ta ceinture d'or Sur ton cher berceau déposée; Et moi je mordais à mon tour Ton doigt, ta main, ton bras, ta joue, Et tu te sentais bien, avoue ! Essoufflé de ma rude cour. Alors, conciliant comme un homme, Ton bras s'étendait, appelant; Et tu saisissais mon corps, comme Une mère apaise un enfant; Tu suçais ma lèvre sévère, Et moi sur le bout de ton nez Je posais mes doigts consternés D'avoir ainsi blessé mon frère. Puis vint un beau jour de printemps Mais son rayon semblait livide, Et depuis déjà bien longtemps Je pleurais sur le berceau vide Quand, craintive, j'ai vu s'ouvrir Un étrange écrin blanc et rose Où l'on a couché quelque chose… Et les échos semblaient gémir ! Depuis ont passé des années; J'ai grandi, souffert, embelli, Et de mes amours raffinées Le plus cher dort enseveli ! Souvent le doux appel de frère A brûlé ma lèvre et mon coeur… Ah! Trop cruelle est la douleur Qui remplit nos jours sur la terre! Ô mon frère, ô mon frère mort, Rien ne frissonne dans ta cendre ! Ne sens-tu rien de doux et fort Sur tout ce qui fut toi descendre… ? Car ta soeur vient pour te chanter De nos berceuses orientales, Nocturnes lentes, automnales… Ne pourrais-tu les répéter… ? Les morts oublient-ils les romances Qu'ils ont appris à bégayer, Et leurs compagnons de souffrances, Et tous leurs efforts d'essayer… ? Et de leur langue maternelle Oublient-ils les si chers accents, Et les visions d'attraits puissants Du pays, des campagnes belles… ? Ah! Dans mes bras, forme d'amour Qui doucement sur moi te penches, Viens! Reçois et donne en retour Le baiser d'un coeur qui s'épanche ! Il est las, aigri, chagriné De voir le vie un long mensonge; Frère, viens le baiser en songe ! ….Des pleurs sur mon front incliné… (May Ziadeh, Fleurs de Rêve, 1910, sous le pseudonyme d'Isis Copia)
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