Biographie René Ghil
René François Ghilbert, dit René Ghil, né le 27 septembre 1862 à Tourcoing et mort le 15 septembre 1925 à Niort, est un poète "instrumentiste" et "scientifique" français.
Salué par Mallarmé en 1885 dès son "volume d'essai", il rompit avec lui en 1888 sur la question de l'Idéalisme, auquel il opposait un matérialisme métaphysique inspiré de Darwin et du bouddhisme : il apparaît dès lors comme l' "adversaire du symbolisme" et de la "poésie égotiste". De 1887 à 1892, il dirigea les Écrits pour l'Art, première revue et premier groupe d'avant-garde de l'histoire ; puis il poursuivit son œuvre en solitaire, proche autour de 1900 de certains milieux anarcho-syndicalistes, encourageant les débuts d'un auteur comme Charles Louis Philippe. En décembre 1913, quelques jours avant Apollinaire, il enregistra aux "Archives de la Parole" son "Chant dans l'Espace" qui contient ce vers résumant toute sa conception du monde et de la poésie :
Ma pensée est le monde en émoi de soi-même.
L'œuvre poétique de René Ghil débuta en 1885 par le recueil Légende d'Âmes et de Sangs:
Vie, et ride des eaux, depuis que hors l'amère
Navrure de ses Yeux son âme ne sourd plus,
De ses Yeux inlassés la Vieille aux os de pierre
Morne et roide regarde : et sa voix de prière
Très aigre, égrène au soir les avés des élus.
Elle se poursuivit, tout le reste de sa vie, sous forme de petits volumes successifs, et de livres qui en reprenaient le contenu plus ou moins remanié, sous le titre général d'Œuvre; mais si les deux premières parties : Dire du Mieux et Dire des Sangs furent achevés, on ne connaît que trois fragments du troisième: Dire de la Loi...
Poète ambitieux, féru de philosophie, soucieux de donner une assise philosophique et scientifique à son engagement poétique, René Ghil publia d'abord le Traité du verbe en 1886, avec un « avant-dire » de Stéphane Mallarmé, qui contient une citation devenue fort célèbre: « Je dis : une fleur ! et, hors de l'oubli où ma voix relègue aucun contour, en tant que quelque chose d'autre que les calices sus, musicalement se lève, idée rieuse ou altière, l'absente de tous bouquets. ». Mais il s'éloigna très vite de ce premier stade de sa pensée, comme on le voit dès En Méthode à l'Œuvre (1904) et plus encore avec De la Poésie scientifique (1909). Ses théories d'"instrumentation verbale" eurent une influence aussi durable que souterraine sur les futuristes russes et italiens, sur Breton et Aragon, sur Jean-Louis Brau et François Dufrêne, dissidents du lettrisme d'Isidore Isou...
Ouvrages
Éditions contemporaines de l'auteur
* Légende d'âmes et de sangs, Paris, L. Frinzine, 1885
* Traité du verbe, avec « Avant-dire » de Stéphane Mallarmé, Paris, Giraud, 1886
* Légendes de rêve et de sang, Livre II : Le Geste ingénu, Paris, L. Vanier, 1887
* Le Pantoun des pantoun, poème javanais, Paris et Batavia, 1902
* De la poésie scientifique, Paris, Gastein-Serge, 1909
* La Tradition de poésie scientifique, Paris, Société littéraire de France, 1920
* Les Dates et les Œuvres : symbolisme et poésie scientifique, Paris, G. Crès, 1922
Recueil
* Œuvre, Paris, Mercure de France - E. Figuière, 1889-1926, 9 tomes en 14 volumes, comprenant : I. Dire du mieux ; I. Le meilleur devenir ; II. Le geste ingénu ; III. La preuve égoïste ; IV. Le voeu de vivre ; V. L'ordre altruiste ; II. Dire des sangs ; I. Le pas humain ; II. Le toit des hommes ; III. Les images du monde ; IV. Les images de l'homme.
Rééditions
* Légende d'Âmes et de Sangs, Plein Chant, 1995.
* Le Vœu de Vivre & autres poèmes choisis par Jean-Pierre Bobillot, avec CD (lecture par R. Ghil en 1913), Presses universitaires de Rennes, 2004 (ISBN 978-2868479792).
* De la Poésie scientifique & autres écrits, textes choisis, présentés par Jean-Pierre Bobillot, Ellug, 2008 (ISBN 978-2843101151).
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