Le cinéma afghan fait son retour depuis la chute du régime taliban dans les salles afghanes comme dans les festivals, de Cannes à Nantes où le Festival des 3 continents (F3C) lui rend hommage.

Au-delà de la salle prestigieuse de l'Ariana à Kaboul, rouverte en mai dernier, les salles de cinéma afghanes recommencent à fleurir après avoir complètement disparu sous le régime des Talibans.




"La plupart des acteurs et réalisateurs ont quitté le pays entre 1979 et 1992, pendant la guerre civile et sous le régime taliban, aujourd'hui certains reviennent pour voir comment ça se passe", a expliqué à l'AFP Sedhiq Barmak, réalisateur de "Osama", primé à Cannes en 2003 et dont l'intégrale (quatre films) est présentée à la 26e édition du F3C à Nantes, jusqu'au 30 novembre.

Sous "les talibans, le cinéma était interdit, inexistant", "aujourd'hui neuf salles de cinéma sont ouvertes à Kaboul", une quinzaine dans tout le pays, note le réalisateur.

Cette année, pas moins 43 films ont été réalisés en Afghanistan dont 12 à 13 longs métrages, selon le cinéaste.

"La fréquentation des salles est surtout masculine", relève-t-il en évoquant l'influence toujours présente des Talibans. "Les femmes étaient très nombreuses à aller voir ce genre de films il y a 22 ans, mais quand la guerre est arrivée la mentalité des gens a changé", constate le réalisateur.

Aujourd'hui, les films qui sont présentés dans les salles afghanes sont avant tout du "cinéma d'action, mélodramatique, ça ressemble beaucoup au cinéma indien", souligne Philippe Jalladeau, co-créateur et co-directeur du festival avec son frère Alain.

"Pour nous ces films sont à consommation interne, ce qu'on voit à l'étranger ce sont des films artistiques, de qualité, de création, et je ne vois que deux hommes pour ça, Sedhiq Barmak et Atiq Rahimi avec "Terre et Cendres" (primé à Cannes en 2004), qui sont deux réalisateurs phares et qui sont la vitrine du cinéma afghan à l'étranger", note Philippe Jalladeau.

"En dehors de ça il y a un grand mouvement d'ébullition et il y a 65 maisons de production en Afghanistan aujourd'hui", expliquent le réalisateur et le co-directeur.

Le financement des films reste cependant un problème. Si les réalisateurs trouvent des aides locales notamment à travers des collectifs culturels financés par des hommes d'affaires pour les courts métrages, le financement reste difficile pour les longs métrages.

Autre difficulté, celle du passage en Afghanistan d'un cinéma placé sous la coupe gouvernementale à un cinéma privé.

"Il est difficile de sauter d'un système à un autre, nous sommes à la croisée des chemins", affirme M. Barmak. Mais le réalisateur note que grâce au nouvel intérêt porté au cinéma afghan, des co-productions avec de nombreux pays étrangers sont en train de se mettre en place, que ce soit pour les courts ou longs métrages, avec notamment la France, l'Espagne, l'Allemagne ou encore le Japon. Une première pour le cinéma afghan, et "c'est un bon début", souligne le réalisateur.

jeudi 25 novembre 2004, AFP.