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■ L'hiver
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- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - 2006-12-02 | |
Gitte Schäfer (née en 1972 à Stuttgart) expose au Frac Bourgogne un ensemble important d’œuvres, provenant de différentes collections, qu’elle a choisi d’associer à des réalisations spécifiques pour ce lieu. Elle a engagé depuis 2000 une observation attentive de l’effet du temps sur les images et objets produits, diffusés, oubliés, ressurgis, en imaginant des peintures et sculptures qui semblent tout à la fois hors d’âge et d’une étonnante proximité. Sa pratique se situe dans le domaine de l’insolite, de l’étrange et crée dans l’espace d’exposition un lieu qui oscille entre le cabinet de curiosités et le paysage fantastique. Les jeux d’association multiples sont pour beaucoup dans le plaisir de l’artiste mais aussi celui du visiteur.
* L’œuvre de Gitte Schäfer repose sur des principes que l’on peut associer dans un premier temps à la liberté de l’enfance, celle du jeu, de l’intuition et de l’émerveillement. Loin de toute naïveté cependant, l’artiste joue des multiples références artistiques et de la familiarité des éléments, pour nous emmener dans un univers très singulier et étrangement décalé. Gitte Schäfer collecte des images et objets, au gré de ses lectures de magazines d’hier ou d’aujourd’hui, de sa fréquentation des brocantes et vides greniers ou encore de ses trouvailles offertes par le hasard. Elle s’approprie ces accumulations de diverses manières. Dans certains cas, elle reproduit des détails d’images ou de tableaux trouvés qu’elle peint à l’acrylique, dessine à l’encre, au crayon de couleur ou encore au stylo bille. Pour d’autres, elle effectue des collages sur différents supports. Elle réalise également des sculptures pour lesquelles elle assemble les objets selon leur forme, leur matière ou leur couleur. Leurs structures verticales s’élèvent à différentes hauteurs, étranges totems ou mats de dévotion surmontés d’un globe terrestre, d’un voilier, d’une balance ou d’autres formes encore. A la manière dont l’Occident a pu regarder certains objets des cultures africaines, asiatiques ou océaniques comme de purs gestes esthétiques, allant même jusqu’à oublier leur valeur d’usage, Gitte Schäfer laisse en suspens l’interprétation de ces étranges mâts, non sans provoquer un certains trouble. S’agit-il de la présentation ostentatoire d’un objet signifiant ? Il manquerait alors l’origine tout autant que le destinataire pour en comprendre la portée. Ces sculptures se nomment Angelo, Jean, Vermer. Peut-être, comme le suggère ces titres, le choix des objets est-il lié à une personne, célèbre ou anonyme. L’artiste précise : « Certains de ces noms proviennent de mythes anciens ou d’autres langages et véhiculent, comme d’autres motifs, des clichés très communs, qui regroupent une infinité de lectures possibles. » La culture serait alors au centre de ses intérêts, « les cultures » serait plus exact tant les références se croisent au point d’en devenir caduques. Art ou artisanat, travaux manuels ou pratiques savantes, représentations figuratives ou abstraites, images « originales » ou maintes fois vues, tout se mêle sans distinction. Nombreux sont les artistes à avoir travaillé sur les imageries au cours du XX ème siècle, pour en saisir l’aspect sociologique ou par iconoclasme, pour en faire des emblèmes ou des pastiches. Ce n’est pas le propos de Gitte Schäfer qui, peut-être, cherche l’endroit où ces diverses pratiques peuvent entrer en résonance. Une part importante de l’œuvre de Gitte Schäfer réside dans la manière dont elle conçoit ses expositions. Les œuvres en deux ou trois dimensions sont regroupées dans des installations hétéroclites, mêlant tableaux et objets, qui dégagent une certaine désuétude. En effet les objets et les motifs semblent sortis d’un autre âge, difficiles à dater tant chacun, pris isolément, pourrait sortir tout aussi bien de n’importe quel bazar ou boutique touristique d’aujourd’hui. Leur présence familière lie immédiatement l’art à la vie, au mobilier, aux appartements dans lesquels s’accumulent les objets de toute nature au fil du temps, ce qui leur confère également une certaine dimension affective. Les objets sont inscrits dans un passé indistinct et une vague nostalgie pourrait flotter autour des œuvres. Pourtant, l’artiste prend garde de ne jamais laisser le spectateur là où il pourrait se glisser par confort ou convention et de le détourner vers des chemins moins sûrs. L’art de jouer avec les lieux communs et d’en démultiplier la portée. Les espaces sont ponctués régulièrement d’objets qui brouillent encore les pistes. A la manière du Surréalisme, une main sort du mur (exposition Magpies’Booty, New York, 2005), une biche en plastique est posée au sol (exposition The Raven is Dead, Copenhague, 2005) ou encore un hexagone en miroir est surmonté d’une patte de chevreuil ( Ernest, 2006). Par leur rupture d’échelle ou leur nature hétérogène, ces objets perdent un peu plus le regard. Les relations entre les œuvres, structures d’abord chaotiques, révèlent peu à peu leur savant ordonnancement. Celui-ci travaille avec beaucoup de complexité le lien à l’espace du lieu, sous les apparences très classiques d’un simple accrochage. Les jeux de lignes et les points de fuite, les perspectives et illusions, les axes en deux et trois dimensions composent une véritable polyphonie. « Dans la musique, les aspects disharmonieux peuvent, suivant un certain ordre, devenir de nouveau harmonieux. » souligne Gitte Schäfer qui recourt souvent à la métaphore musicale pour évoquer la manière dont procède son travail. Dans l’abondance des voies qu’ouvre l’œuvre de Gitte Schäfer, on pourrait souligner également la manière dont elle fait se rencontrer l’art de l’exposition avec celui plus prosaïque de la décoration d’intérieur. Les dimensions décoratives sont très présentes dans l’art du XX ème siècle et Gitte Schäfer joue avec elles à travers, par exemple, l’usage de nombreux motifs, l’évocation de l’objet mobilier ou l’inscription des œuvres dans un environnement quasi paysagé. Ainsi, loin de toute démonstration, Gitte Schäfer fait appel à l’ornement, en définit les contours là où il touche à de nombreuses pratiques artistiques ou non. Elle en conçoit des expositions pleine de générosité, envisageant l’œuvre comme un lieu du lien, soulignant ses dimensions culturelles tout autant qu’émotionnelles communément partagées. Claire Legrand responsable du service des publics *** Gitte SCHÄFER Du 25 11 2006 au 27 01 2007 Frac Bourgogne 49, Rue de Longvic - 21000 Dijon - Tél. 03 80 67 18 18 Exposition réalisée avec le soutien du Ministère de la Culture et de la Communication (Direction régionale des affaires culturelles de Bourgogne), du Conseil régional de Bourgogne, du Conseil général de Côte d’Or et de la Maison de Rhénanie-Palatinat (Dijon). *** Source internet et site à consulter : FRAC Bourgogne |
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