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- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - 2010-02-16 | |
Gheorghe LATES
Maître de conférences Université Danubius, Galati ENFIN, LE TRADUCTEUR DE IL CARAGIALE VINT ! Dans la littérature roumaine, le syntagme « grand classique » s’applique à des écrivains nés et consacrés comme valeurs dès le XIX – e siècle, la carrière de certains d’entre eux continuant même au XX –e siècle. Dans une perspective axiologique, différente d’un exégète à l’autre, leurs noms seraient : MIHAI EMINESCU, ION LUCA CARAGIALE, ION CREANGA et IOAN SLAVICI. Les critères d’évaluation dans une telle hiérarchie sont esthétiques, nuancés par préférences d’ordre subjectif ou idéologique : c’est ainsi que, dans certaines histoires ou synthèses littéraires, CREANGA et CARAGIALE se disputent la seconde place, la première étant occupée, de droit, par MIHAI EMINESCU. Indifféremment des fluctuations de l’idéologique, Caragiale aura trouvé une place significatif dans ce canon littéraire sui generis, entrant ainsi dans la conscience publique comme un satirique impitoyable des mœurs de tout temps et de partout. Celui qui a eu l’intuition de sa valeur absolue, fut un critique contemporain à Caragiale : Titu Maiorescu, celui qui le consacra définitivement comme une certitude de la littérature roumaine, un gain évident pour le groupe dont il était le mentor (Junimea/la Jeunesse). Il est significatif que ce critique de direction littéraire a consacré à Caragiale et à Eminescu - bien évidemment, une étude de référence, incontournable dans toute approche critique (tout en expédiant les deux autres classiques : Creanga et Slavici, avec une formule douteuse : écrivains « poporani »/populistes, id est issus du peuple et écrivant pour le peuple. Pour Caragiale, les arguments du critique étaient d’ordre général, ce qui signifie qu’il eu l’intuition de leur universalisation dès les premiers textes dramatiques, suites logiques d’une tradition européenne qui commence par le théâtre grec et passe, inévitablement, par le classicisme français. D’où la valeur implicite de traductibilité en toute langue. Le potentiel d’universalisation d’un écrivain dépend de plusieurs facteurs, tous à effet direct sur sa traductibilité en une langue affine ou des plus différentes. Dans le cas concret de Caragiale, sa remarquable traductibilité vient, avant tout, par filière génétique. Il est né dans une famille grecque, qui rejoignit les Principautés dès l’époque phanariote. Même son nom est dérivé de celui du Prince Caragea, dans la suite de qui son grand père vint sur les terres roumaines. Cependant, vivant dans un milieu roumain pour la plupart, il fit son instruction élémentaire dans la langue de l’endroit, son bilinguisme primaire se constituant en une matrice communicationnelle apte à recevoir ultérieurement d’autres langues, de souches différentes. Sa famille d’artistes (son oncle, Iorgu, ancien acteur et organisateur d’une troupe de théâtre réputée à l’époque) lui facilita l’accès à la langue et à la civilisation française, puisque, dans le répertoire dramatique de l’époque, les écrivains français étaient préférés, voire certains spectacles étaient donnés en français. Ce qui explique le détail que le dramaturge –effigie de la littérature roumaine - deviendra un redoutable traducteur du français. Charles Perrault, E. Scribe, Al. Parodi, P. Déroulède, même Charles Baudelaire, grâce à qui il a accès aux textes de E. A. Poe, sont des noms que Caragiale fréquente avec assiduité. Vers la fin de sa vie, pendant l’auto exil berlinois (1904 – 1912), bien que vivant quelque peu isolé dans un milieu roumain pour la plupart, il s’adapte assez facilement au nouveau environnement culturel, y compris apprend la langue du pays – ce qu’il lui fallait pour se débrouiller lors d’une communication usuelle. Tous ceux-ci sont des éléments qui confèrent à l’écrivain roumain un potentiel d’universalisation des plus évidents. Citoyen de la Tour de Babel, Caragiale mit à profit le français pour accéder les valeurs de la culture française et, par son intermédiaire, de celle universelle. Un tel modèle catalyseur a laissé des traces significatives dans la fine texture de sa création, le patron culturel français étant celui qui a permis et permet des équivalences de l’imaginaire, de l’idéation et de l’atmosphère, sans trop de pertes. Qui plus est, un tel modèle illustre peut être le prétexte d’un texte second qui ne perd pas, par la traduction, le ton et la saveur originaux. La pensée du dramaturge et prosateur roumain est une de type multiculturel, ce qui suppose une autre manière de penser le mot et sa contextualisation. Une note supplémentaire : la francophilie de l’auteur, locuteur, lecteur et traducteur des textes littéraires français est évidente, tant et si bien que le potentiel de traductibilité en cette langue est maximum. L’intuition de l’affinité de Caragiale avec la culture française remonte à l’époque où il était encore en vie (1854 – 1912) étant due, en première instance, à des allogènes, locuteurs de leur langue, du roumain, par l’intermédiaire duquel ils communiquaient avec les majoritaires, et du français, où plus d’un avait fait son instruction. Les similarités de statut linguistique ne sont jamais à ignorer, les équivalences et les adaptations à l’horizon d’attente des lecteurs de diverses époques, leur étant plus accessibles qu’à ceux qui font de la langue étrangère un possible correspondant sémantique. En ce sens, nous signalons quelques-uns des noms des traducteurs et des textes traduits déjà pendant que l’auteur était en vie, et à ce jour. Ainsi, en 1891, B. Souffrir, « réputé talmudiste et professeur de Craiova » traduit, pas du tout par hasard, Un cierge de Pâques. Quatre ans après (1895), dans la presse roumaine du temps, le bruit court sur une possible mise en scène du drame Napasta/Le Malheur (traduit par Oswald Neuchotz) sur la scène du Théâtre Mondaine de Paris. Le projet échoua, mais le même traducteur revient à la charge et obtient la mise en scène du spectacle Fausses accusations sur la scène du Théâtre Œuvre de Paris, inclus dans le répertoire courant dès l’année suivante. Fin 1897, paraît le premier volume incluant le texte du drame Napasta en français, aux éditions l’Institut d’édition Ralian et Ignat Samitca de Craiova. De la même série des allogènes, il faut encore retenir le nom d’Adolphe Clarnet, dans la traduction duquel paraît aux Editions du Feu, en 1912, Le Cierge de Pâques. Sous un autre titre : Un Cierge Pascal, cette traduction avait été incluse dans le recueil Les Milles Nouvelles, paru à Paris en 1909. A ceux-ci, il faut ajouter Edmond Bernard, le traducteur de la dramaturgie de Caragiale de 1943 (Théâtre) et celui d’Eugène Ionesco, coauteur de la traduction réalisée avec Monica Lovinescu. Une autre catégorie de traducteurs est représentée par les bilingues, locuteurs et utilisateurs du roumain et du français couramment, à qui l’on doit plusieurs versions, éditées et rééditées à plusieurs reprises. Le premier nom est celui de Hortense Pasquier (mariée au journaliste français Léon Pasquier), l’autrice d’une version française du drame Napasta (Fatale Injustice) et des nouvelles Un cierge de Pâques et Péché. Inventorier tous les traducteurs roumains ou français du XX –e siècle serait une démarche inutile, notre intention étant de faire signaler un événement éditorial récent (le volume Contes et Nouvelles, paru aux éditions Aparis-Edifree de Paris, vers la fin de 2009), dans la traduction du fameux traducteur Constantin FROSIN, un bilingue qui pense majoritairement en français et vit la francophonie comme un état d’esprit. Les près de 140 volumes traduits en français (9 seulement du français en roumain), sa revue : Le Courrier international de la Francophilie, dont il est l’unique Directeur et éditeur, ainsi que son implication dans le mouvement francophone mondial, le recommande comme le plus performant traducteur, à ce jour, des textes de Caragiale en français. La réunion entre les couvertures d’un volume élégant des 11 textes de contes et nouvelles, publiés antérieurement en revue de prestige en France et en Roumanie, met en exergue plus qu’un auteur à un potentiel maximal de traductibilité. Nous avons en vue surtout la rigueur traductologique, que l’auteur de la récente version a eue en vue, d’autant plus que la disponibilité de ses contemporains est manifestement en baisse. La traduction à une distance de plus d’un siècle soulève des problèmes d’adaptation de la langue du texte originaire à l’usage du français contemporain, le potentiel lecteur français n’étant nullement intéressé par l’aspect historique de la langue de l’auteur, mais plutôt par la manière dont le texte second le fait résonner à l’idée épique. Cette obnubilation des sens porteurs de la patine historique du temps, est une forme de la commodité du lecteur contemporain, mais que le traducteur ne saurait ignorer. Néanmoins, le résultat de cette démarche interprétative (mise en équivalence, synchronisation, adaptation) est à la mesure de la performance maximale que seul un traducteur bilingue chevronné (fort d’une expérience de plusieurs décennies) et doué d’un sens aigu du français, peut se permettre. Aussi souscrivons-nous à l’idée énoncée dans le titre : l’auteur de la Lettre perdue a enfin, trouvé le traducteur qui a compris Caragiale, mais aussi et surtout le lecteur français contemporain. |
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