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- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - 2005-10-25 | | la fête foraine Chaque premier dimanche de Février, la petite ville de Chamincourt connaît une animation exceptionnelle; c'est jour de fête. Les manèges et stands prennent possession de la grande place et de la rue principale. De tous côtés, des musiques à la mode hurlent et se chevauchent. Le froid et le vent glacial qui sévit en cette journée hivernale ne découragent pas les habitants de la région. Ils s'y retrouvent nombreux, tous chaudement vêtus et décidés à passer un agréable moment. Dès le début d'après-midi, les jeunes se précipitent dans les autos tamponnantes, tandis que les petits, sous le regard émerveillés de leurs parents, tournent et se dressent pour décrocher le fameux pompon. Ne perdant pas de temps, les plus gourmands, ont déjà le nez tout collant de barbe à papa. Laure, quatorze ans, habite une coquette maison à la sortie du village. Ce dimanche, elle ne traîne pas à table, elle a hâte de retrouver ses copines. Un passage obligé dans la salle de bain, un coup d’œil dans la glace pour vérifier tenue, maquillage, coiffure et en route... --- J'y vais M'man! --- Rentre pas trop tard, tu sais ce que ton père a dit! Et prend pas froid! --- Promis m'man, à ce soir! Bien emmitouflé dans son anorak, le nez face au vent du Nord, Laure traverse les ruelles glaciales qui l'amènent aux pieds des manèges. Les musiques fortes, les rires et les cris donnent à cette petite fête locale un accent joyeux et agréable. Laure est heureuse, elle se dirige vers les autos, monte sur le plancher surélevé qui entoure la piste et balaie la foule d'un regard circulaire, à la recherche de quelques copines. Hélas, les groupes de garçons et filles se sont déjà formés et Laure se retrouve seule. Elle se dirige alors vers un autre manège, une grande roue verticale équipée de petites cabines multicolores. Elle se place près d'une imposante baffle qui crache une musique de mauvaise qualité. De l'autre côté, près de l'autre baffle, un homme se tient debout et regarde les personnes qui montent et descendent des cabines. Il est corpulent, très grand, plutôt mal habillé et le cou enroulé dans un horrible cache-nez rouge. Le type d’individus, solitaire ou marginalisé et que l'on reconnaît à l’allure gauche et à l’accoutrement bizarre. l'homme semble appartenir à cette catégorie; il la regarde. La première fois, elle n'y prête pas garde, mais le surprenant une deuxième puis une troisième fois, elle s'interroge. " Qu'est-ce qu'il me veut, ce type"? Se dit-elle. Laure n'aime pas son regard, "encore un vicieux", pense-t-elle. Elle a l'impression qu'il la déshabille des yeux. Puis, elle se ravise, se dit qu'elle s'inquiète peut-être pour rien, que la fête est à tout le monde. La grande roue s'arrête, Marion, une copine du collège descend de la cabine. --- Salut, Laure! t'es toute seule? --- Oui, je devais prendre Anaïs, mais elle est malade. --- Moi, je suis seule aussi, dit Marion, tu viens faire un tour d'auto? Bousculant plusieurs personnes au passage, les deux copines courent vers les tamponnantes. Elles achètent plusieurs billets chacune, grimpent dans une auto, et c'est parti... La musique est forte, il faut presque crier pour se faire entendre. Les deux copines s'éclatent à fond, elles prennent plaisir à tamponner deux garçons du collège qui ricanent bêtement. Laure fonce sur eux, mais plus rapides les garçons réussissent à s'échapper et Laure vient cogner sa voiture contre le rebord de la piste. Elle tourne plusieurs fois le volant, mais la voiture ne bouge pas, elle est bloquée. Un homme, debout sur le bord de la piste, se baisse et la dégage avec force. Alors que Laure relève la tête pour le remercier, un cache-nez rouge glisse sur le capot de l'auto, c'est l'homme de la grande roue. Il regarde Laure, esquisse un léger sourire, détourne la tête et part. --- Encore lui! Lance Laure. Marion ne réagit pas et la voiture repart. Les garçons reviennent droit devant et percutent les filles de front. --- Mais ils sont c.o.n.s! Dit Marion, ça fait mal! Il y en a marre! Viens, Laure on s'arrache! Les deux filles quittent les autos, Laure regarde le bord de la piste, l'homme n'y est plus, il a disparu. --- Tu cherches quelqu'un? Demande Marion. --- Oh! Non, je croyais avoir vu un copain. --- Ca te dit, un tour de chenille? Dit Marion, paraît que c'est super! --- Pourquoi pas! OK! Le soleil a disparu derrière les hautes maisons bourgeoises qui entourent la place et le vent du Nord se renforce et glace les visages. Les deux filles pressent le pas pour se réchauffer. Passant devant un stand de tir, elles remarquent Bob, un garçon un peu grassouillet et pas trop futé, Marion le connaît bien, elle lui fait souvent des farces. Il a enfoncé son bonnet de laine bleu sur sa tête. La tentation est trop forte ! Marion tend son bras, arrache le bonnet et les deux filles déguerpissent à toutes jambes. Le temps que Bob réagisse, les deux filles ont disparu dans la foule compacte. --- Tu lui rends pas? Demande Laure, il va avoir froid. --- Bah! Un gros comme lui, ça n'a jamais froid, dit Marion, je lui rendrai demain au collège. Viens! On va aux chenilles. Les deux copines s'installent, Marion s'enfonce dans son siège pour se cacher au cas où Bob... et ça démarre...La moitié du circuit en plein air, l'autre moitié sous une sorte de tunnel où pendent des squelettes et des personnages aux visages terrifiants. --- Ouah! C’est génial! Dit Marion en agitant le bonnet de Bob… Et cet abruti qui se les gèle! --- Fait attention, tu vas l'accroch... Laure n'a pas le temps de finir sa phrase, le bonnet de Bob s' accroche à un morceau de plastique. Au tour suivant, Marion veut le récupérer, mais le bonnet n'y est plus. --- Il est pas perdu, dit Marion, il est tombé à terre, on le récupérera en partant. Le tour terminé, les deux filles descendent et commencent à chercher le fameux bonnet. --- Ca devrait se voir une couleur pareille! Dit Marion. Il peut pas être loin! Laure fait le tour du manège côté gauche, Marion côté droit, mais pas le moindre bonnet bleu. --- C'est ça que vous cherchez? Mademoiselle. Laure se retourne, sursaute et prend une bruyante inspiration. Devant elle, l'homme au cache-nez rouge se tient debout, immense, le bonnet bleu à la main. --- Je vous ai fait peur? Dit-il l'air étonné. --- Non! Non! Merci monsieur. L'homme s'éloigne, se perd dans la foule et Laure reste debout, tenant ce ridicule bonnet bleu à la main. --- Ah! Tu l'as retrouvé! Demande Marion, où il était? --- Là ! --- T'en fait une tête! Tu me fais la gueule ? --- Non! --- Oh !Je vois bien que tu me fais la gueule ! Si s’est ça, j’ me casse! Dit Marion. Laure se retrouve seule à nouveau, et cet homme qui l'intrigue. En plus, ça tombe mal, elle a remarqué qu'un beau gars, plus âgé qu'elle la suit et semble s'intéresser à elle. "S’il n’y avait cet homme qui me suit partout, j’amorcerais une conversation avec ce beau mec, se dit-elle, peut-être même qu'il m'aurait dragué? Qui sait? Je fais plus que mon âge" . Elle baisse la tête et regrette que son anorak fermé cache sa poitrine. "Oui, j'ai quatorze ans, mais j'en fais bien quinze, seize peut-être ? Puis, apercevant quelques copines du collège, Laure se joint à elles. Le groupe la rassure, "Comme cela, si l'homme m'importune, je ne serai pas seule", se dit-elle Par contre, pour le beau garçon, cela contrarie ses plans. C'est la première fois qu'un garçon de cet âge s'intéresse à elle. " Il est très beau! Si je pouvais le draguer, se dit-elle, mes copines en seraient malades de jalousie". Mais l'homme au cache nez rouge gêne considérablement la réalisation de son projet. Elle a l'impression qu'il la suit partout, qu'il épie ses moindres gestes. Justement, il est encore derrière elle! " Je le maudis ce type ! Et en plus il m'inquiète. La nuit est tombée, l'homme au cache-nez rouge a disparu. Ouf ! Quel soulagement pour Laure? D'ailleurs que faisait-il sur cette fête? Quant au beau gars, il vient encore de la regarder et de lui sourire, elle sent son petit cœur s'affoler et elle lui répond par un léger sourire. Déjà dix-neuf heures, le petit groupe de copines se réduit, elles ne sont plus que trois. Laure se regarde dans le reflet d'une vitrine, ses cheveux sont tout défaits, de la main elle les arrange grossièrement, en pensant à ce beau jeune homme, bien sûr. Mais, derrière elle à quelques mètres, l'imposante stature de l'homme au cache-nez rouge! Encore lui! Pour la première fois, Laure prend vraiment peur. "Quel dommage que je n'ai pas pu aborder ce beau gars plus tôt, se dit-elle ! Lui au moins, il m'aurait défendu "! Le froid est de plus en plus vif et bientôt Laure va rentrer, seule, évidemment; Ses deux autres copines habitent le centre ville. Ce qu'elle appréhende le plus, c'est le passage de ces ruelles, sorte de coupe-gorge moyenâgeuse. Mais, il faut bien rentrer... Laure regarde autour d'elle, Il n'est pas là ! C'est le moment se dit-elle, j'y vais. La première petite ruelle est bien éclairée et plusieurs personnes marchent par petits groupes, c'est rassurant. Par précaution, Laure presse le pas. Personne ne la suis. " Je ne serais pas un peu parano? Se dit-elle. Je suis jolie! Après tout, c'est normal que les hommes me regardent, on dit que certains aiment les jeunes filles! Tout en marchant, Laure essaie de se rassurer. La deuxième ruelle est déserte et les lampadaires ne sont pas tous allumés. Elle sent sa poitrine se serrer, la panique s'empare d'elle, elle se prépare à courir. Mais, subitement, devant elle, le beau gars sort d'une ruelle transversale et l'interpelle. --- Eh! pourquoi tu cours comme ça, t'as peur? dit-il --- Ah! c'est vous! Vous m'avez surpris, j'ai eu peur. --- C'est vrai que c'est pas prudent une belle fille comme toi, toute seule. Laure ne s'attendait pas à le rencontrer là , mais elle se sent rassurée! Voilà que ce beau garçon qui l'a fait rêver tout l'après-midi se retrouve devant elle! "Quelle heureux hasard" se dit-elle ? --- Tu veux que je te raccompagne? Demande le jeune homme. --- Si vous voulez, dit Laure émue. --- Si ça ne te dérange pas, je peux même te prendre par le cou, par ce temps, on aura plus chaud. --- Si vous voulez, dit Laure, surprise mais ravie de la proposition. --- Tu sais, t'es drôlement jolie, dit le jeune homme. La ruelle tourne à angle droit, aucune lumière, l'obscurité est presque totale. Le jeune homme parle de la fêtes, dit des banalités et tient des propos décousus. Laure l’écoute et rie, mais soudain d’un geste brutal et inattendu, le jeune homme saisit Laure par la tête, l'appuie contre le mur et tente de l'embrasser. --- Eh! Doucement dit Laure! Je ne vous connais même pas. --- Ca c'est pas grave dit le jeune homme on va faire connaissance. Mais Laure n'a pas le temps de répondre, profitant de l’espace d’une porte cochère en retrait, le jeune homme l'attrape par la taille, la pousse et la plaque au sol. Laure se débat et lui demande d’arrêter, mais le jeune homme continue, enfouit sa main dans sa poche et en sort un couteau. --- Tu vas être bien gentille dit-il, sinon je te balafre le visage. Et tu cries pas! --- Non! Laissez-moi, je ne veux pas! --- T'as pas compris? T'as pas le choix ma belle, aller laisse-toi faire. Laure tente de se débattre, mais que faire sous la menace de d’un couteau? --- Baisse ton pantalon! Aller, vite! Le jeune homme pose la lame de son couteau à plat sur le front de Laure. Laure ressent l'acier glacé sur sa peau. Le jeune homme s'énerve, s'excite, et ne se contrôle plus. Il pose son couteau sur le sol, soulève violemment le pull-over de Laure et s’acharne sur son pantalon avec fougue. --- Laissez-moi, ou j'appelle "au secours" dit Laure. --- La ferme petite salope, ou je te plante! Le jeune homme est comme fou, il tire de toutes ses forces sur le pantalon de Laure. Décuplant ses forces Laure résiste, le repousse, le frappe. Mais vite, le combat devient inégal, après quelques minutes de lutte, le jeune homme reprend le dessus. Laure est à bout de force, ses membres ne répondent plus et elle trouve à peine la force de crier. Elle réalise alors qu'elle n’échappera pas à cette brute, ce malade. Elle est arrivée au bout du possible, elle relâche tous ses muscles et se laisse choir sur le ciment glacé. Le jeune homme se positionne sur Laure, baisse la fermeture éclair de son pantalon, s'immobilise une ou deux secondes, puis…un bruit sec et lourd raisonne dans le porche. L’agresseur tombe sur Laure comme une masse. Il ne bouge plus. --- Je vais te soigner moi! Espèce d'ordure! La voix est puissante, elle raisonne dans la nuit froide comme une délivrance. Laure relève légèrement la tête et distingue l'ombre d'une masse humaine, énorme, immense. Le jeune homme tente de se relever, mais le colosse lui administre un violent coup de pied en pleine tête et il retombe sur le sol. --- Prends ça! Espèce de salop! Dit l'homme de sa voix puissante. Puis, l'homme se penche et son cache-nez traîne sur le visage de Laure. "C'est l'homme au cache-nez rouge"! Cet homme qu'elle croyait menaçant venait de la sortir des griffes de ce violeur. La pauvre fille est complètement perdue, ses nerfs lâchent, elle tremble et sanglote tout en remettant ses vêtements. --- Ca va aller? Demande l'homme, puis il ajoute: je crois que je suis arrivé à temps! Laure ne répond pas, jamais de sa vie elle n'a eu pareille peur! L'homme lui prend le bras, elle se relève doucement et lance un regard méprisant et plein de haine à son agresseur. Sans même le voir. Celui-ci reprend ses esprits, secoue la tête et tente de se relever, mais l'homme lui balance un violent coup de poing en pleine mâchoire. --- Ca c'est en plus, tu sais pourquoi? Dit-il. L'agresseur retombe lourdement, sa tête heurte le ciment. --- Venez! Je vais vous raccompagner chez vous, dit l'homme, avec cette ordure, c'est plus prudent! --- Heureusement que vous êtes arrivé! Quelques minutes de plus... Le vent glacial souffle dans la ruelle, Laure marche à côté de l'homme, elle a remonté le col de son anorak et s'efforce de contenir ses derniers sanglots. --- Je ne voudrais pas que mes parents.... --- Inspirez profondément, dit l'homme, ça apaise. --- Je vous dois vraiment beaucoup, quelle chance que vous n'étiez pas loin! --- Ce n'est pas de la chance, dit l'homme. --- Mais pour quelle raison vouliez-vous me protéger? Je ne vous connais pas! --- J’ai tout de suite remarqué la façon dont ce salop te regardait. J'ai une fille de ton âge qui a été victime de cette ordure, l’année dernière, dans les mêmes conditions, quand j'ai compris que tu serais sa prochaine victime, je ne pouvais pas le laisser faire. BOKAY Mes écrits et dessins : http://bokay.over-blog.org/ |
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