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Double vie N°10 FIN
prose [ ]

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par [BOKAY ]

2005-10-08  |     | 



Double vie N° 10 FIN

Myriam ouvre la porte. Par politesse et respect pour sa mère, je me lève de mon fauteuil.
---Bonjour M'man! Dit Myriam en sautant au cou de sa mère, je te présente Alex.
Je regarde la maman de Myriam, une jolie femme, taille moyenne et cheveux châtain. Mais les traits de son visage et son regard m'interpellent. Elle aussi, me regarde avec une certaine insistance, j'en suis presque gêné...
--- Excusez-moi, dit-elle j'ai l'impression de vous avoir déjà...Alex! Alex! Non, pas possible!
--- Lise? Tu es la mère de Myriam? Ca fait dix ou... non, plus, au moins douze ans qu'on s'est perdu de vu?
--- Non, plus, bientôt dix-sept! Le temps passe si vite! C'est donc chez toi qu'habite Myriam!
--- Oui, je lui prête le petit appart, à côté... Mais, assieds-toi. Quelle surprise!! Se retrouver après toutes ces années! Tu te souviens?
--- Oh Oui, je me souviens, comment pourrais-je oublier?
La réapparition soudaine de Lise me perturbe, tout s'emmêle dans ma tête et le sens de sa phrase m'échappe. Lise? Je l'ai aimée plus que tout au monde. Je nous croyais uni par un amour indestructible et plus fort que tout, quand subitement et sans raison apparente, elle s’est retirée de ma vie et a disparu sans me donner d'explication. Ne comprenant pas ce silence, j'imaginais plusieurs scenari: accident, maladie, où la rencontre d'un autre homme? Je cherchais une explication. j'en ai beaucoup souffert et je n'admettais pas ce silence qui pour moi était synonyme de torture. Et sans cesse, la même question m'obsédait: pourquoi ce silence? Quelle en est la cause ou la raison? Avais-je commis une erreur ? Et maintenant, alors que cette époque se noyait dans l'oubli, voici le passé qui revient et ses souvenirs, vieux de seize ans, qui se bousculent et se superposent. Le lieu de notre rencontre, dans une petite rue de Carnac; la plage et le soleil, si chaud qu'il nous brûlait la peau; le petit bar où nous avions notre place...Tout cela me revient, vivant, concret. Par le fait du hasard, Lise réapparaît seize ans après sa disparition. Que dois-je penser? Je ne sais pas, je ne sais plus, alors maladroitement, je me contente de dire des banalité.
--- Tu vis donc seule à présent? Dis-je
--- Oui, dit-elle, je me suis séparé de mon ami "Loïc" et Myriam préfère rester chez toi pour l'instant... C'est ce qu'elle m'a dit.
--- T'as bien fait de le virer ce fainéant, dit Myriam!
--- En tout cas, félicitations, tu as une jolie fille, dis-je. Elle t'a raconté notre rencontre au commissariat?
--- Oui, je sais tout, Myriam me dit tout.
Le portable de Myriam sonne.
--- excusez-moi, dit-elle, c'est un copain.
Pour être tranquille, Myriam se rend dans l'appart d'à côté. Lise la suit des yeux, puis me regarde avec cet air particulier qui précède l'annonce d'une nouvelle importante. Soudain, mon esprit à retardement se débloque.
--- Seize ans qu'on s'est quitté! Tu ne veux pas dire que Myriam...
--- Si !Et oui, Alex! Myriam est ta fille, ça ne fait aucun doute.
Cette révélation me fait l'effet d'un coup de massue sur la tête! Je me sens chavirer, abattu, anéanti et reste sans voix. Je ne sais même pas si je suis heureux ou en colère? En tout cas, je suis furieux que Lise me l'ait caché. Comment va-t-elle justifier son comportement? Mais Lise ne dit rien, elle semble éviter mon regard, je la sens gênée. Elle sait qu'elle va devoir affronter mes questions.
--- Et pourquoi ne m' as-tu rien dit?
--- Je pensais que c’était mieux. Je sais que j'aurais dû te le dire, mais j'étais jeune. Je me rends compte que j'ai commis une erreur, mais que puis-je faire à présent? Ressasser le passé ne sert à rien.
--- Et Myriam, que lui as-tu dit de son père?
--- Rien. L'idée qu'elle se fait de son père est un assemblage de souvenirs que j'ai gardé de toi, mais rien de précis. Je me demande comment elle va le prendre quand elle apprendra la vérité? J'appréhende sa réaction.
--- Moi aussi je l'appréhende, dis-je, les choses auraient étés si simples si tu m'en avais parlé, on l'aurait élevé ensemble... Quel gâchis!
--- Justement, dit-elle, si j'ai agi de la sorte, c'est pour ne pas gâcher ta vie. Je me sentais responsable de ce cette grossesse et je voulais en assumer seule les conséquences.
--- Nous sommes responsables tous les deux, dis-je, moi autant que toi
Myriam revient dans le salon et nous mettons un terme à notre discussion.
--- Oh! Vous discutez bien tous les deux!, Dit Myriam... Vous vous connaissez depuis longtemps?
--- Oui, dit Lise nous nous connaissons depuis très longtemps, nous avons passé des vacances ensemble, en Bretagne.
--- Décidément, la Bretagne ça te réussit! Dit Myriam. C'est pas là que tu avais rencontré mon père... Tu sais m'man, j'ai eu de la chance de rencontrer Alex, quelquefois on s’engueule, mais je crois que sans lui, je m’ennuierais ou alors, je ferais des bêtises.
--- J'ai rencontré Alex en Bretagne il y a dix-sept ans, dit Lise.
--- Ah! il devait être mignon à cette époque! Dit Myriam en me regardant.
--- Pourquoi? Tu me trouves moche Aujourd'hui? Dis-je.
--- Mais? J'y pense! Dit Myriam, tu pourrais être mon père alors?
Myriam lance cela comme une boutade, une sorte de phrase toute faite. Mais la question va droit au cœur de sa mère qui ne réussit pas à cacher son émotion. Lise me regarde, son visage se cristallise, son teint blanchit. Je la regarde avec la même intensité et un long silence s'installe.
--- Ben, alors! J'ai dit une connerie? Dit Myriam. Qu'est-ce que vous avez tous les deux? Vous me cachez quelque chose?
Myriam nous regarde à tour de rôle. Ses yeux cherchent une réponse, l'expression de son visage devient grave, se fige et nous écrasent. Notre silence répond à la question qui lui brûle les lèvres.
--- Oui! Dit Lise, Alex est ton père!
Jamais Je n'ai vu Myriam avec de tels yeux. J’ai l'impression d'avoir une étrangère en face de moi. Pendant quelques secondes elle reste de marbre, puis les commissures de ses lèvres se relèvent lentement, son visage s’illumine, ses yeux pétillent et un immense sourire envahit son visage. Alors, d'un bond, elle s'élance et plonge dans mes bras. Elle se cale dans le creux de mon épaule et éclate en sanglots.
--- J'ai un père! J'y crois pas, je rêve! Toute ma vie je t'ai attendu. Mais tu es là! Tu ne peux savoir comme je suis heureuse, je suis comme tout le monde maintenant, j'ai un père! Mais depuis combien de temps sais-tu que je suis ta fille?
--- Oh! Depuis très peu de temps, cinq minutes tout au plus, je n'en reviens pas non plus! J'ai une fille! Allez, champagne!
Je vais chercher une bouteille et je pose trois coupes sur la table de salon. Myriam ne maîtrise plus ses émotions, elle pleure et rit en même temps avant de disparaître dans les bras de sa mère. Cette émotion extrême s'évacue peu à peu dans les larmes qui coulent sur nos joues. Que d'événements en une journée! Comment la vie peut-elle réserver de pareilles surprises alors qu'on se croit installé dans une éternelle routine! Moi aussi, je me sens heureux, je m'y étais attaché à cette gamine! j'étais déjà un peu son père adoptif. Un jour, elle m'a même dit: " c'est con la vie"! Surpris, je lui ai demandé: "pourquoi"? Parce que je suis trop jeune pour être ta femme et je ne peux pas être ta fille" m'a-t-elle répondu! Ce jour-là, elle m'avait vraiment touché.
--- Aller! on passe à table, dit Myriam. Pour la première fois de ma vie, j'invite mon père à manger! On est comme une vraie famille! Je peux t'appeler Papa?

trois semaines plus tard. En octobre
Nous profitons des derniers beaux jours pour faire une promenade au parc, tous les trois. Les arbres se dépouillent de leurs parures automnales et les feuilles mordorées virevoltent, puis tourbillonnent sur le sol. Nous sommes assis sur un banc, juste en face d’un bassin. Le soleil se faufile entre les arbres partiellement dénudés et lance de longues ombres sur les pelouses tachées. Près de nous, des gamins ramassent des marrons et les lancent en direction du bassin. Ils visent un petit bateau qu'ils font naviguer sur l'eau, entre les feuilles mortes et les brindilles. Est-ce cela le bonheur? Autour du bassin, une petite fille promène son bébé dans son landau. Lise et moi la regardons. Nous avons certainement la même pensée: dans cette enfant, nous imaginons Myriam petite. Tout ce bonheur perdu à jamais... toutes ces joies que nous aurions pu partagées ensemble.
--- Tu te souviens, Lise de ce petit café à Carnac où nous prenions toujours notre café, comment s'appelait-il déjà?
--- Il s'appelait: "Chez Myriam".
Mais tout en parlant, Lise me tient la main, de la même façon qu'autrefois, juste le bout des doigts, comme en Bretagne.
--- Eh! Eh! dit Myriam, je vous y prends vous deux!
--- Et tu n'es pas au bout de tes surprises, ma fille, à partir de demain, nous habitons ensemble, tous les trois, dit Lise.
--- Bientôt, vous parlerez mariage à ce rythme! Qu'est-ce que vous voulez comme cadeau de noce? Demande ironiquement Myriam.
--- Oh! ca, nous l'avons déjà, dis-je, notre cadeau c'est toi.
http://bokay.over-blog.org/ BOKAY

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