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La vie à cloche-pied
prose [ ]
Extrait de Veilleurs de Dhuis

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par [Reumond ]

2011-12-19  |     | 



En poète inspiré plutôt qu’en pédagogue appliqué, ou bien en physicien averti plutôt qu’en éducateur circonspect, observez attentivement les Veilleurs de Dhuis quand ils sautent à cloche-pied, quand ils tournoient follement, dansent avec tout leur corps souple et grimpent avec agilité aux arbres comme des écureuils. Ils ont en eux les pieds de l’existence et les ailes de l’être, comme ce grand Chêne pointu qu’ils vénèrent à grands cris, de cœurs gravés et de leurs initiales.

Ce dieu des chênaies leur rend bien ! De ses basses racines qui vont jusqu’en terre, et de ses hautes branches affilées qui grimpent vers le ciel, comme les zaricots magiques de Jack ; les Veilleurs fragiles, le Maître des Aulnaies les protège !

Avec émoi, de vous za moi, entre quat'z'yeux, branchez-vous sur vos propres souvenirs, regarder vous-même tels des Veilleurs ! Nul pataquès de jardin d’enfants, nulle liaison mal-t'à-propos de bac à sable ne viendra éteindre ces souvenirs inoubliables !

Entre la pulsion et l'idée; l’impulsion et l’intuition, l’enfant est un ressort sauvage qui trouve sa vitalité dans la nonchalance apparente d’un jeune corps et la pétulance d’une pensée toujours en éveil. Les Veilleurs sont donc des éveillés, toujours à l’affut d’un nouveau défi, d’une autre belle aventure à vivre à pleines mains.

Même si dans tous les cas de figure, il se casse la figure, le Veilleur se relève toujours ! Il se remet sur pied, pour marcher victorieux vers d’autres horizons. Ses genoux écorchés, ses cicatrices, avoisinant quelques ecchymoses bleutées, témoignent à petits corps et à grands cris, des multiples engagements avec la vie. Ses traces et contusions sont, genoux dépliés, ses cartes d’état-major, à lire avec enthousiasme entre copains, et à faire soigner par les sœurs et cousines.

La chair n’est-elle pas un sincère testament tracé à fleur de peau, un pur parchemin avec ses écorchures et ratures plus ou moins profondes ; des chemins à même le cuir chevelu, qui racontent de multiples combats sur les champs de bataille d'une enfance Clichoise.

Pas grave !

Car bien souvent, les gestes et regards désapprobateurs des Grands, tracent des sillons bien plus profonds et plus sanguinolents que toutes les traces physiques de ces expéditions guerrières.

Sans être provocateur ou bagarreur, défiant le jour dès l’aube, jusqu’au crépuscule des jeux, nous allions de l’avant, cherchant du bout du regard une autre dimension à vivre, malgré tous les dangers, un nouveau terrain à tester, des lieux neufs à explorer avec toute notre perspicace naïveté.

Petits gros et grands maigres, nous attirions la sympathie, on rigolait de tout, goûtant à cette gourmandise de vie, comme d’une bonne chose que l’on suce à pleine langue avant de la mordre à pleines dents.

Oui, dans les vents des événements, l’enfant à cette instabilité et cette même fragilité que ses cabanes en construction. À cloche-pied ou en équilibre sur la tête, pile ou face, recto-verso, côté hirondelle ou côté scarabée, les Veilleurs ont cette double nature qui vacille sans cesse entre les motions spontanées et les pensées profondes, l’émotion pure et le raisonnement en chicane.

Quête de sens, de place, de lieux à cloche-pied…, C’est tout jeu ! Dans l’équilibre instable du petit d’homme, qui négocie ses premiers pas entre le ciel et la terre, inscrivant sa marche dans l’espace, pour répondre à l’ouverture au Monde.

Qu’il grimpe à l’arbre, saute ou se roule à terre, le Veilleur est toujours en mouvement et en même temps, comme en suspension entre le Monde des idées et celui de la matière, ce matériau qu’il incarne corps et âme, et qu’il devra apprendre à maitriser.

Pile ou face, recto-verso, côté hirondelle ou côté scarabée, les Veilleurs ont cette double nature qui se cherche un centre de gravité, un vrai moi, entre pesanteur et apesanteur, dans l’entre-deux des entre jeux et des entre lieux qu’il explore. Car c’est le propre du jeu, de la vitalité, d’être toujours entre quelque chose et autre chose, entre deux rives, le JE et l’ENJEU, afin d’éviter l’ennui et la vie stagnante, pour mieux porter du fruit.
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Les poètes comme les enfants, en narration comme en action, sont tiraillés les uns comme les autres, entre l’un et l’autre, dans cette collatéralité de JE qui s’expriment, de JE en JEUX, d’ENJEUX en JE, dans une même représentation.

C.Q.F.D., de tout ça ?

Tout ça, c’est que, comme toujours, il faut une certaine quantité d’énergie requise pour atteindre le but, la vie ne se suffisant pas à elle-même !

Q.S.P., car il faut suffisamment de jeu pour diluer la vie !

Chez les enfants comme chez les Grands, la vie est en définitive un subtil mélange entre les jeux et les enjeux, pour aller toujours plus loin, toujours plus haut. Le rêve, en étant le jeu par excellence de nos nuits, pour nous préparer à aller jusqu’au bout de nos rêves en plein jour.

Ainsi s’expriment l’enfance de l’art et l’art de l’enfance, la vie n’est-elle pas donnée gratuitement à ceux qui jouent la vie ? L’avenir n’appartient-il pas à ceux qui croient en cette grandeur de leurs rêves et en cette beauté de l'existence ?

C’est bien pourquoi, au nom de cette grandeur, les Veilleurs d’hier vous prient de venir à eux aujourd'hui, pour franchir le pas de la Dhuis. Et moi, je vous y invite cordialement à mon tour, de tout mon cœur ; car le jeu en vaut la chandelle !

Les jeux comme les paroles, sont précisément à la frontière sensible et immédiate des choses, dans un entre-deux toujours en creux ; parce que « la parole » comme « le jeu », sont des invitations, ils vous convient à participer davantage, l’un et l’autre, l’un dans l’autre, se faisant des hôtes hospitaliers, évidés d’eux-mêmes pour se laisser remplir d’humanité, concaves, pour mieux vous offrir ce vide qui vous fait place.





« Se voyant seul contre cent, il avait sonné de son cor pour appeler l’empereur à son secours, et cela avec une telle force, que, quoiqu’il fût à plus d’une lieue et demie, l’empereur avait voulu retourner ; mais Ganelon l’en avait empêché, et le bruit du cor s’en était allé mourant, car c’était le dernier effort du héros. » (Extrait de Roland, après Roncevaux, d’Alexandre Dumas).

En vainqueurs inventifs, curieux de tout…, les Veilleurs veillaient vaillamment sur la Dhuis, comme on fait le gué au col de Roncevaux, à l’entrée de la légendaire Brèche de Roland.

Subjugués par le jeu, en nos courses insensées, épiques et pique et colle et gramme boure et boure et ratatam !
Nous ne voyions pas le temps passer, et pourtant ! Les Vascons de Montfermeil ou de Gagny sont déjà là, peuples très sauvages, qui sans cesse nous bravent, jusqu’à la lie des jeux ils nous affronte sur notre propre terrain.

C’est là que Roland sonna de son cor, mais « C’est crop tard ! », en cette expression qui était mienne dans les années 50, l’ennemi déjà brûle et embrase, crache et cri, échange les coups, saigne les coudes et pille partout ; il démolit nos cabanes, écrase nos barrages, renverse nos totems, brise nos tabous…,

C’est l’hécatombe comme en Sa Majesté des mouches de William Golding, et c’est tout pareil à la Guerre des boutons, décrite avec talent dans le roman de Louis Pergaud ; c’est la préfiguration de cette même Guerre qui sera mise en scène par Yves Robert quelques années plus tard, en forêt de Fontainebleau, l’année même de mes 16 ans, quand le cor de Roland fut oublié dans les oubliettes d’un corps déjà adolescent.

Il en est ainsi du fleuve de la vie, des usures de l’âge, ils étouffent les messages de l’enfance, refoulent le jeu, étiolent les images, troublent l’eau limpide du regard et gomment ces histoires et cadeaux d’une rare qualité que le fleuve des jours emporte avec lui dans son élan.

En toutes ces péripéties qui ne peuvent inverser le rapport de force entre les heures et les mètres qui les éloignent de la Dhuis, les Veilleurs tombent dans le sommeil. Car en cette révolution entre le passé et l’avenir, nul cri, nulle liberté d’expression ne peut arrêter la réalité

En cette perspective de la Dhuis qui se fait dialectique entre le passé et l’avenir, nul cor ou sifflet ne peut contrecarrer la vérité qui vient comme viennent les années. C’est là que Roland, conduisant l'arrière-garde des Veilleurs, dans ce rapport musclé entre l’espace vif qui se détend et le temps cru qui passe, tomba de tout son âge.

Trahi par Ganelon, symbole du temps qui défile au grand défilé des événements ; en ces périodes de la vie qui tendent de multiples guets-apens aux coins des cadrans, en cette quadrature du cercle que l’on nomme le couronnement de la durée, les Veilleurs se meurent !

À cloche-pied, les cloches semblent sonner le glas !

Progressivement, l’air de rien, les Vascons d’horloges furent leurs occupants, ceux que l’on célèbre en courant, en courant après les trains, l'amour, le travail, les loisirs…, sous la main d’un Dieu qui configure les corps, accompagne l’oubli, et trace des sillons que l’on nomme avec précaution des rides ; en une alliance unique qui donne tout son sens à cette vie qui passe pour chacun de nous sans exception aucune.

Mais, c'est en même temps dans le miroir patiné des eaux de la Dhuis, que l’on peut voir que la croissance infinie du temps et celle de l’espace, là où se meuvent les personnes et les lieux oubliés, n’est qu’une illusion qu'il nous faut dépasser !

Comme tourne l’horloge, comme l’anneau n’a ni commencement ni fin, la mémoire tourne ainsi sur elle-même ; malgré les apparences et les trous de mémoire, rien n’est jamais terminé, rien n’est jamais oublié ! La matière garde en elle l’ombre et toute la lumière de ces événements, c'est un grand tourbillon sans origine et sans bout, sans limite et sans frontière.

Nous pensons, là où rien n’a réellement commencé, nous pensons là où tout existe déjà et pas encore, la conscience n’est-elle pas un long ruban replié sur lui-même, ruban de Möbius ou nœud gordien de la mémoire, une mémoire engagée dans l’espace-temps pour une seule et même raison, une seule et même réalité conjointe, la vie et le rêve, afin de pouvoir développer, hier, aujourd’hui comme demain, toutes nos promesses d’amour.

À cloche-pied, les cloches sonnent de nouveau, mais cette fois à la volée, pour l’envolée de nouveaux Veilleurs dont nous n’étions que les premiers éclaireurs.


(Extrait de Veilleurs de Dhuis)

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