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certains jours
prose [ ]

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par [erableamots ]

2005-02-16  |     | 



CERTAINS JOURS



Certains jours mon cri est si petit qu’il remplit l’univers. Quand je parle trop fort, c’est l’écho du silence qui prend toute la place. L’horizon dort avec les yeux tournés vers l’ombre. Il ne veut pas qu’on voit ses larmes d’arc-en-ciel. Quand je touche la terre je caresse le ciel. Les fleurs échangent leurs odeurs lorsque tombe la pluie. Après l’ondée, le soleil se lève comme un dessin d’enfant. Il faut parler à l’eau pour comprendre le feu. Quand nous pointons du doigt tout se dresse devant nous. Il faut caresser l’air pour ouvrir l’horizon.

J’ai mis des mots à grignoter sur le comptoir immense du désir, un vin d’espoir, un pain d’images. Le lait monte dans les seins de l’été, l’écume à la bouche du vent. L’eau des regards fait des vagues. Les arbres retroussent leurs feuilles. On voit le trou des écureuils bouger comme un nombril. Les caresses d’oiseaux font bander le ciel. La verdure est en rut.

Bien après la venue des pompiers, je brûle encore dans l’incendie. La mer laisse à la plage de vagues souvenirs. Les étoiles mortes à des années-lumière clignotent jusqu’à nous. Je n’ai jamais pu lire qu’entre les lignes, entre les os. L’hiver j’imagine les feuilles entre les branches nues. La peau des cicatrices est une mémoire de chair et l’appeau des oiseaux n’est qu’un leurre du vent. Je n’ai jamais pu lire qu’entre les mots oubliés sur la marge. Je sculpte des bateaux dans le bois des épaves.

Les chemins de la peur ne mènent jamais nulle part. Je traîne toujours une soif où roulent des cailloux. Ma faim est comme du sable entre les dents. J’écoute aux portes. Je tends un fil jusqu’à l’aube. Une lointaine argile fait battre notre pouls. Sur le masque des jours, le temps remonte une à une ses rides. Malgré ma peur de l’eau et des îles fragiles, je le savais que je viens de la mer. Je le savais déjà. Il a fallu qu’en témoignent les vagues et ce trou de lumière où le soleil chavire, le flux et le reflux jaillissant de la chair. Je suis un fils de la mer. Je suis un fleuve et j’ai quitté mon lit. Je coule en marge de mes veines. Sur le comptoir du désir je servirai la soif et j’offrirai la faim à ceux qui se croient morts.

Quand la tête est trop lourde, elle écrase la plume. Il faut que l’encre coule comme un léger ruisseau. J’écris la tête en mongolfière, le printemps sous le bras. Le sourire du matin a des chaussettes roses. La joue du soir a des fossettes. Mille roues tournent entre les deux, mille mots, mille gestes. Finis les mauvaises langues, le mauvais œil et les oreilles dans le crin. Je regarde avec les yeux en porte-cœur. Je mets des fleurs au ventre des zéros. J’écris comme la vague fait son métier de marin. N’ayant pas de maison, j’ouvre les mots pour accueillir les autres. Quand je pense à la mort, c’est la vie qui répond.

De caillou en brindille j’avance dans la terre. Mes lèvres bougent comme des insectes. Mon sang coule comme un arbre inversé. J’ai la voix du chiendent, la peau nomade des ruisseaux, de la cerise dans l’herbe sous les dents de la pluie. Regarder l’autre, c’est déjà se voir. Une même ligne de vie traverse nos caresses. Ce ne sont pas vraiment des mots qu’on entend mais des paroles invisibles. Dans le ventre de l’arbre le fruit agite ses racines. Les branches font des signes en forme de moineau. On danse comme on peut. On se fraye un chemin entre la lumière qui aveugle et le silence qui effraie. On donne à boire au soleil emmuré.

Je ne prie jamais Dieu mais les bêtes crevées par le chagrin, les araignées dans le plafond, les craques dans le plancher, les gouttes d’eau qui retardent la flamme. Je ne suis pas de la race des balais. J’ai des notes de musique à la place des cheveux, un goût de terre dans la bouche. Quand la lumière se fait musique, c’est l’œil qui entend. Tous les tessons du temps ne refont pas la cruche ni les plumes égarées le vol d’un oiseau. J’érige entre la mort et moi une cloison de papier. J’attends la vie chaque matin avec mon cœur entre les mains.

Il manque toujours une chaise à la table du cœur, une feuille à la branche, une plume à l’oiseau. Il manque toujours une main au bras du fleuve, une vague à la soif pour remplir les verres. Je suis du côté gauche des choses, du côté des échardes, la terre en salopette au milieu des étoiles, une fleur de cambouis dans les bras d’un smoking, une moustache de chat dans un bol de lait sur, l’âme de l’homme qui aboie dans la musique des cuisines, le train du temps qui passe sur les rails des os sans remarquer les gares d’herbe verte. Je traîne la mer au bout des mots comme un ballon au bout d’un fil, la goutte du regard faisant déborder l’œil.

J’ai remisé depuis longtemps le clavier du cerveau. Je tape avec des mots sur les battements du cœur. Les oiseaux font leurs gammes sur les touches du ciel. Sous les pins parasol je ramasse le temps dans une poignée d’aiguilles. La mer replie ses vagues dans un placard en bois de femme. Je flotte sur mon ombre dans une ombre plus grande. Seules quelques images surnagent pour éclairer l’avant. Appuyé sur un mur, ce sont mes propres pas que j’entends s’éloigner. Chaque pas brise une chaîne mais l’autre la ressoude. Je suis resté petit, ce sont les mots qui ont grandi. Ils se creusent un nid entre les chiffres et les racines. Les fleurs s’étirent pour regarder le ciel. J’écoute les loups pousser des hurlements de lune, les nuages ronfler en bêlements de laine. La réalité se change en poussière mais le landau du rêve se fait pousser des ailes.

Il y aura bientôt des bébés qui vont naître avec des têtes de banquier, de greffier, de notaire. Ils auront déjà le cordon ombilical en forme de cravate et un attaché-case à la place d’une couche. Je suis comme les vieux aux appétits d’oiseau qui volent en mangeant. Je n’ai jamais été aussi absent qu’à l’école. J’étais là mais très très loin, les yeux dans les étoiles et les mains sur le rêve. J’étais las de toutes ces mains levées pour répondre aux questions. J’ai toujours préféré ce que j’ignorais. Si je me lève le matin, c’est pour poser ma tête sur la taie du soleil, faire des rêves de tournesol, des voyages de pierre, des danses de luciole. Il y en a qui porte un parapluie. Les jours de grand soleil j’emporte avec moi des averses. Quand j’attache mes souliers, je détache mes pas. Quand j’écris, je détache mes mots et les laissent courir à la belle épouvante. Il ne faut pas de pont pour traverser la vie mais des vagues. Il faut quelques naufrages pour connaître la mer.

Je bégaie, je bafouille et je mange mes phrases. Les choses une fois pensées ne m’intéressent plus. Je n’ose pas ronfler de peur de réveiller les meubles. Je passe la journée à écouter les arbres, à tracer un chemin comme un trait sur l’horreur.
Traînant des wagons d’images entre les parallèles des marges, tirées par une majuscule, de grandes phrases bringuebalent sur les rails des pages. Il faut bien opposer quelque chose, la sagesse des fous, l’intelligence des racines, le sourire des fleurs, la naïveté de l’œuf, à la bêtise ambiante.

11 février 2005


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