L'île de Ouessant accueille à partir de jeudi une soixantaine d'écrivains amoureux de la mer et des îles pour célébrer la littérature haïtienne, invitée d'honneur du sixième salon du livre insulaire qui se tient jusqu'à dimanche.

Le jury, présidé par l'écrivain tahitien Jean-Jo Scemla, décernera dès le premier jour son Grand Prix à bord d'un navire de la Marine nationale ancré au large.

Avec 12.000 visiteurs l'an dernier, le pari des fondateurs de ce salon hors norme compte tenu des difficultés d'organisation dues à l'insularité semble désormais gagné.

"C'est une véritable épopée logistique", confie Isabelle Le Bal, créatrice de la manifestation, citant les quelque 5.000 ouvrages qu'il a fallu entreposer dans une dizaine de conteneurs pour être acheminés par la Penn Ar Bed, compagnie maritime départementale. "Il y a six ans, beaucoup pensaient qu'il n'y aurait pas de seconde édition", raconte cette Ouessantine de souche qui travaille toute l'année avec une équipe de quatre personnes pour réunir, sur son île, une production littéraire de tous les continents.

L'an dernier, les écrivains des îles Marquises avaient été invités, succédant à ceux de Nouvelle-Calédonie. La première année avait réuni des auteurs de Mayotte, de la Réunion, de Corse et de la Guadeloupe.

Aujourd'hui, Mme Le Bal espère avoir atteint son but: "casser les préjugés sur ce que certains appelaient la littérature de cocotiers et montrer que ces écrivains appartiennent à la littérature universelle". Chaque année, le salon recense 500 nouveaux titres avec, pour sujet, des îles ou pour auteurs des écrivains insulaires, l'une ou l'autre condition étant exigée pour faire partie de la sélection.

La venue de 17 écrivains haïtiens l'année du bicentenaire de l'indépendance est un événement préparé depuis trois ans. Les violents soubresauts précédant la chute du président Aristide n'ont pas compromis l'invitation, mais ils n'ont pas facilité les contacts.

"Je me souviens d'un auteur expliquant qu'avec une demi-heure d'électricité par jour, il recevait difficilement ses e-mails, et d'un autre indiquant qu'il était sur une liste noire", raconte Isabelle Le Bal.

Pour la plupart des îliens, le salon constitue "une grande respiration", souligne Maryvonne, l'une des bénévoles indispensables au salon.

De l'avocat d'affaires parisien au retraité de la marine, une centaine d'îliens de souche ou d'adoption ont rejoint le clan des bénévoles.

"Au delà de la littérature, des liens étroits se tissent avec les écrivains et éditeurs logés chez l'habitant. Certains envoient des nouvelles dans l'année", poursuit Maryvonne, Brestoise résidant sur l'île depuis treize ans.

"C'est une ouverture extraordinaire vers l'extérieur, c'est amusant de retrouver nos escales à travers les invités", ajoute Marc, retraité de la Royale et de la marine marchande, qui sera chauffeur pendant quatre jours.

Le salon est également un "moyen de prolonger la saison touristique", reconnaît Denis Paluel, le maire de l'île. "C'est aussi l'occasion de montrer qu'on ne vit pas renfermés sur nous", ajoute-t-il.

Preuve de cette volonté d'ouverture, une quarantaine d'enfants de l'île Nuku Hiva, ont débarqué mardi à Ouessant dans le cadre d'un jumelage avec l'école de l'île. C'est la première fois qu'ils quittaient leur archipel des Marquises.

mercredi 18 aout 2004, AFP.