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Remember -Mateiu Caragiale
poèmes [ ]
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par [Nadja ]

2008-07-02  |     | 



Nous nous sommes mis à parler un beau jour, comme si nous nous étions connus depuis toujours. Son nom d’origine normande - je ne sais même pas à présent si c’était son vrai nom, - ne m’était pas tout à fait étranger, étant le nom originaire des comtes frivoles d’Oxford, repris et joint après leur disparition à celui de Beauclerk, par les Stuarts de gauche, ducs de Saint-Albans. Même s’il descendait de cette lignée, cela aurait pu faire plus d’honneur à eux qu’à lui. Bien qu’Anglais jusqu’à la moelle des os, il se servait habituellement du français, pour parler et cela avec une élégance que j’ai rarement entendue. Parlé par le timbre grave de sa voix mélodieuse et pure, le français était pour lui plus qu’un moyen de compréhension, il gagnait également le don de la séduction.
En apprenant ce qu’il était je l’ai entièrement compris ; la coutume à laquelle Brumel avait ajouté le cachet de son nom survivait brillamment en Aubrey de Vere. Je trouvais une explication jusque dans son plaisir de se farder ; les premiers habitants d’Albion dont on fait encore allusion ne peignaient-ils de bleu tout leur corps ?
Cette couleur surtout était particulièrement chère à mon nouvel ami ; il la portait dans tout son être, dans ses yeux et sous la peau extrêmement transparente de ses mains dont les doigts faisaient briller tantôt à la main droite, tantôt à la gauche sept bagues jumelles - sept saphirs de Ceylan.
Les bagues, un bracelet et le parfum, cette inoubliable odeur d’oeillet rouge étaient les seules choses auxquelles il restait fidèle. Au reste, je ne me rappelle pas l’avoir vu deux fois porter les mêmes habits. Or tout ce méticuleux atour n’était chez lui que le détail d’un tout achevé par une parfaite harmonie
Aubrey de Vere avait un cerveau merveilleusement constitué et un esprit brillant. Il eût pu faire la gloire du club le plus ésotérique sans se sentir nullement mal à l’aise dans une réunion d’hommes de lettres car s’il avouait se faire laver le linge à Londres, il ajoutait qu’en 1800 les jeunes nobles de Paris envoyaient le leur en Flandres et ceux de Bordeaux à Curaçao.
Il savait s’entretenir sur n’importe quel sujet, faisant des allusions au passé, des rapprochements et des détails charmants chaque fois qu’il lui arrivait de raconter ses voyages à travers les sites anciens du Levant ou dans les îles perdues sur l’océan paisible où règne un éternel printemps.
C’est là tout ce que je réussis à apprendre de sa vie ; qu’il avait vu beaucoup de pays, qu’il avait beaucoup lu, même trop lu pour son âge car il lui arrivait de mêler ce qu’il avait vu à ce qu’il avait lu. Ou bien il lui arrivait de regarder ce qu’il avait vu à travers la vitre illusoire de la lecture. Tous ces faits ajoutés à sa richesse lui avaient un peu tourné la tête en dépit de sa nature douée d’un jugement clair et froid.
Ainsi ai-je compris qu’il s’appliquait à d’audacieuses recherches occultes envers lesquelles il prouvait un rare penchant inné, y compris une des plus étonnantes instructions. Il donnait même l’impression d’avoir plus de liaisons avec les revenants qu’avec les vivants parce que, dans ses histoires il ne faisait jamais allusion à des créatures humaines. Il ne rappelait pas les occasions, les circonstances dans lesquelles jeune encore, il avait fait de si merveilleux voyages, comme il ne révélait pas non plus, qui il était et d’où il venait, s’il avait des parents ou des amis, ni même où il habitait, rien, absolument rien.
Quelle maîtrise de soi pour cacher ainsi sa vie, à son âge, sans rien en trahir ! Mais s’il ne s’ouvrait en rien, de mon côté je le questionnais moins encore et je me doute bien que ce fut là une raison de notre amitié. S’était-on rencontré une éternité que je ne lui aurais posé aucune question ; c’est lui plutôt qui aurait pu échapper quelque aveu. D’ailleurs je ne tenais à rien savoir ; est-ce que sa vie me regardait, moi ?
Un jour je l’ai vu par hasard et sans qu’il s’en aperçoive acheter des fleurs de quelque quatre ou cinq cents marks, des oeillets et des orchidées rares, une folle dépense.
Comme je connaissais la jeune fleuriste, il m’aurait suffi d’y entrer après le départ de mon ami, mettre un oeillet à ma boutonnière et, apprenant ainsi la destination des fleurs saisir un fil et pousser plus loin mes investigations. Mais à quoi bon ?
Le fait qu’il cachait avec obstination sous un voile son bref passé aussi bien que sa vie quotidienne pouvait avoir un certain but, c’était très possible, mais je le répète : il y avait tant de fierté dans son regard qui, éternellement impassible sur les choses terrestres semblait voguer ailleurs, dans les lointains d’un monde de rêve, que cela aurait pu faire s’envoler toute trace de doute ou de soupçon.
Et pourtant j’avais omis un détail : souvent il était sur le point de dire encore quelque chose mais se ravisait brusquement, étouffant sa parole sur les lèvres. Rougissait-il en ces moments sous le fard, ses yeux s’embuaient-ils vraiment comme ils me donnaient l’impression pendant un bref instant de laisser voir un trouble caché? Je ne pourrais pas le jurer mais ce que je sais au juste c’est que pendant son récit son regard devenait plus profond, se fixant longuement et tendrement sur ses bagues inséparables comme si ces pierres avaient renfermé le mystère de sa vie et qu’elles eussent reflété dans leur glace bleue et limpide toutes ses pensées et tous ses souvenirs.
Au bout de quelque temps, sans que notre liaison devienne plus serrée, on se voyait plus souvent, le matin parfois, dans l’après midi la plupart du temps, mais jamais le soir. Nous avions quitté la taverne hollandaise à cause de la chaleur et nous nous rencontrions à Grünewald sur la terrasse d’un café, à la lisière d’une pinède - terrasse idylliquement envahie de roses de toutes les espèces qui s’effeuillaient laissant tomber leurs pétales dans nos verres.
Il arrivait toujours à l’heure, sans se presser. Et pourtant, un jour je l’ai vainement attendu jusqu’au dîner. De retour chez moi j’ai trouvé une lettre dans laquelle il me priait en peu de mots de lui pardonner pour n’avoir pu venir et il signait sir Aubrey de Vere. J’ai minutieusement étudié la fière ortographe en majuscules et le cachet de cire bleue : un sfinx couché au milieu du ruban d’une jarretière pareille à celle qui entoure le bouclier en forme d’étoile de la Grande Bretagne. Sur le ruban je lus le mot “Remember” En héraldiste, je n’en fus pas du tout content ; je m’attendais à y trouver de vraies armes et non pas une simple emblème.
Après cette lettre sir Aubrey n’a plus donné aucun signe de vie. D’ailleurs je n’en étais pas étonné ; une terrible chaleur humide couvait sur la ville, nid immense d’ignominies et de méchancetés. On ne pouvait sortir que le soir quand sir Aubrey ne s’y montrait pas. Mais les nuits étaient tellement belles que j’avais du mal à me décider de
rentrer chez moi.

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