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- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - 2010-10-20 | | Le berger de rochers ou une hermeneia mondo-mioritique Je ne sais pas comment sonne la poésie de Djamal Mahmoud en arabe, mais dans son expression roumaine c’est une poésie vibrante et imprégnée de culture poétique, intégrant des énoncés philosophiques. Ce que le poète nous transmet dans un langage post-moderniste, faisant penser à la revue Echinox de Cluj et possédant certaines connexions avec l’expérience du lyrisme des années 2000 et suivantes en Roumanie, provient de la profondeur stratifiée dans la mémoire culturelle de l’Orient, mais aussi des assimilations de la «deuxième patrie» comme dirait le critique Dieter Schlesak. Nichita Stănescu avait également parlé d’une telle «patrie», dans l’acception de l’humanité unitaire, quand il écrivait que „ sa patrie est la langue roumaine”... Djamal Mahmoud, comme tous les poètes du monde actuel, a sa patrie dans le langage poétique, dans le logos universel. Le syntagme „ berger de rochers” définit un „ars poetica” suggestif, commutatif, de la syntaxe dans le discours lyrique de Djamal, un discours fortement auto-référentiel, d’une personne - lyrique et morale qui se prononce avec une vigueur imaginative et un sens esthétisant accentué,- où dans cette poésie pastorale nous sous entendons une sorte de transhumance de l’homme contemplatif sur le Mont mythologique, où les rochers peuvent devenir des troupeaux figés ... Il est intéressant d’aborder sous l’aspect linguistique le talent qu’il a d’écrire en roumain, et je serais curieux de savoir en quelle langue le poète réfléchit (!). Mais c’est peut-être pour cela que nous ressentons dans son livre un arta compositorum spécial, un „ goût” parfumé des vers...Dans le laboratoire de ce dictionnaire mental unique, Djamal Mahmoud réussit de mémorables suspens, parfois exotiques, à l’oreille du lecteur roumain. Alors pourquoi cette démarche apparemment surréaliste du berger d’un „rocher”, représenterait-elle de possibles graphèmes sur des „ tablettes- poèmes” qui se veulent être des codes, paraboles, allégories d’une personne prophétique? L’art poétique est „ la poésie pastorale” des idées et des affects, une „mesure” de la durée spirituelle, trans-moderniste, agonisante. Le berger de rochers – ces idées- affects comptent, prennent des notes, cultivent et développent dans la modernité cette aptitude visionnaire transcendantale post- sumérienne (...) où par étrange manière nous retrouvons le mythe carpatique du „ troupeau figé”, du mioritisme ...Le genre de la ballade n’est pas un genre prosodique dans son livre mais il est transparent dans la sémiotique visionnaire.... 7 Djamal Mahmoud a une Réflexion Poétique du monde, de l’Humain et je considère que cette réflexion est également Initiatique: voilà le sens impérissable de l’écriture - poésie pastorale! La réflexion poétique - re-créatrice, c’est la patrie intérieure et dans le cas de la lyrique du syrien ( et pourquoi pas du roumain aussi?) c’est cette même patrie – Mot-Idée, c’est une allégorie superbe: celle de retrouver le langage qui unit l’Être selon le stigma élohimique du « mélange des langues » de Babylone....Peut-être que le langage a d’abord été le langage primordial , un tronc –bûche de bois vigoureux, dans lequel l’Arbre de Vie était un Logos magique, et c’est pourquoi illo tempore, la poésie était incantation, divination et depuis lors nous avons cette « poésie pastorale » dans l’écriture littéraire, que les grecs avaient nommée cathartique, à effet thaumaturgique... Le poète est herméneutique et ses mots „ paissent” dans les champs élysées ou en enfer en une Vision qui nous est transférée nouvellement, qui nous est communiquée magiquement... Mener paître c’est désenchanter : des rochers pétrifiés revivent sous la formule mantra du Verbe. La patrie est à la fois Matrie, le Logos ressuscité et la mythologie roumaine a également un féminin du Logos: Logostea ! Dans l’Antiquité, les Latins écrivaient „ ubi patria, ubi bene”...Le syrien possède la patrie syrienne dans son sentiment, dans les révélations de la dimension poétique de l’existence et le fait qu’il écrive également dans sa langue d’adoption représente une expérience utile, bénéfique parce que « être contemporain des papillons , de Dieu” comme le définit de manière splendide Lucian Blaga, c’est être tout au long de sa vie, pourtant, grâce à l’énonciation poétique, dans le Temps continuel du passage et de l’Eternel Retour, telle une Mémoire en perpétuel devenir. Il n’est pas question ici de citer mais de laisser le lecteur recevoir. C’est le livre de la poésie pastorale des rochers, donc de la méditation sur la Montagne, de la poésie pastorale des pensées dans les prairies sémantiques…La violence fruste de plusieurs poèmes n’est autre que la sincérité d’un pathos unique balançant entre Eros et Thanatos. Différencier l’entité poieion par la langue dans laquelle elle s’exprime, unitairement humaine, comme écrivait Borges, en tant qu’Entitate Unica (de fait), serait une erreur : le roumain de Djamal résonne plus joliment et plus noblement que celui de bien des poètes roumains! La stylistique de Djamal Mahmoud contient également un souffle hiératique- psychédélique, oraculaire, prémonitoire. L’offrande de la poésie est restituée à la famille, il a le culte de la femme-mère, femme-amoureuse, de l’union comme acte génésique que les sages 8 et les théosophes en Orient nommaient „ la chair comme tapis de prière” Ce volume est construit de manière circulaire, avec un sens aigu de l’auto critique et il se peut que l’austérité, l’acuité plasticienne du poète constitue le signe le plus révélateur d’un sentiment qui ne baisse jamais sous la flamme blanche de sa nature: d’où la prégnance terrifiante de la révélation, du prophétisme au sens actuel. Le fait que le poète syrien édite en roumain, qu’il ressent et embellit, est déjà une joie et un régal du coeur. Djamal Mahmoud sent et réfléchit sur un mode lyrique le mouvement de l’esprit créateur et manifeste, surtout quand il écrit sur l’amour, avec l’empathie d’une âme généreuse, mais aussi grave et sans hypocrisie. Dans cette sélection mature et critique, j’en déduis qu’il possède le contour suffisamment clair d’un homme des Muses, un chevalier de la séduction et d’un fin calligraphe des états humains fondamentaux. Mais il a surtout les traits d’un Poète ayant un héritage gigantesque parmi la grande poésie, la poésie arabe. La fusion avec nos lettres, avec nos arts et notre culture paraît un greffage des plus heureux, original avec un air de nouveauté étonnant. L’itinéraire de cette création est en fait un long chemin vers le Soi, une redécouverte par soi-même, de la condition humaine. Le registre préféré est parfois finement ironique, parfois sceptique, mais le plus souvent sérieux cultivant les mots comme des semences. Un livre est un séminaire, et le monologue devient dialogue et transfert de l’émotion, de l’esthétique, et un geste cathartique. Voilà qui est Djamal Mahmoud, qui a déjà des admirateurs en Roumanie. Eugen Evu traduit par Nicole Pottier |
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