Graham Greene, dont on célèbre samedi le centième anniversaire de la naissance, est l'un des plus grands écrivains britanniques, en même temps que le témoin engagé des grandes batailles politiques du XXème siècle.

Complexe et mystérieuse, la personnalité de Graham Greene défie la compréhension. Son biographe officiel, Norman Sherry, un professeur britannique exerçant au Texas, a raconté récemment comment il avait consacré 27 ans de sa vie à son sujet, poursuivant sa tâche longtemps après la mort de l'écrivain, en 1991.

Catholique fervent mais homme à femmes, Graham Greene, journaliste et écrivain, a voyagé à travers le monde pour satisfaire sa soif d'aventures et trouver la matière de ses romans, n'hésitant pas à se rendre dans des pays en crise: le Vietnam durant la guerre d'Indochine, la Pologne au temps de la Guerre froide, le Kenya pendant la révolte des Mau-Mau.

Son univers littéraire, peuplé d'espions, de prêtres déchus, de prostituées, est un reflet de sa vie agitée et ses intrigues se déroulent dans les pays qu'il a visités: Haïti (Les comédiens), Cuba (Notre agent à La Havane), la Sierra Leone (Le Fond du problème)...

Très anti-Américain, il a été l'ami de Fidel Castro, de l'archévêque brésilien Dom Helder Camara, apôtre de la "théologie de la libération", du président nicaraguayen Daniel Ortega et du président-général panaméen Omar Torrijos, disparu dans un mystérieux accident d'avion en 1981, attribué par certains à la CIA.

Auteur prolifique d'une vingtaine de romans, il a également publié des pièces de théâtre, contes pour enfants, recueils de nouvelles ou de poésies, essais et autobiographies.

Graham Greene, passionné de cinéma, a lui-même écrit les scénarios de films tirés de ses romans, comme "Le Troisième Homme", "Notre homme à La Havane" (1958) ou "Le rocher de Brighton".

Né le 2 octobre 1904 dans une famille de six enfants, fils d'un directeur d'école, il n'a guère aimé ses années d'enfance à Berkhampsted (Hertfordshire, au nord de Londres), affirmant ultérieurement: "être enfant, c'est vivre sous la dictature".

Puis, au prestigieux Balliol College d'Oxford, il collabore activement au journal des étudiants. Il publie alors son premier livre, un recueil de poèmes, "Avril babillard".

Il commence sa carrière dans le journalisme et rejoint le Times en 1926. Il sera ensuite pendant de nombreuses années critique cinématographique et littéraire pour l'hebdomadaire The Spectator.

C'est à cette époque qu'il se convertit au catholicisme, en 1926, une étape fondamentale dans sa vie, sous l'influence de la femme qu'il épousera l'année suivante, Vivien Dayrell-Browning.

Après l'échec de son mariage, Graham Greene accumule les conquêtes, parmi lesquelles l'actrice suédoise Anita Bjork et l'épouse américaine d'un milliardaire britannique, Catherine Walston.

Il a avoué ultérieurement avoir eu également des relations avec une cinquantaine de prostituées.

Parmi ses amis, figurent de nombreux prêtres ou la "mafia littéraire catholique" britannique, comme Evelyn Waugh ou T.S. Eliot.

Le catholicisme présent dans ses livres, comme "Le Rocher de Brighton" en 1938, qui lui vaut pour la première fois un succès critique, ou "La puissance et la gloire" (1940), pour beaucoup son chef d'oeuvre, lui vaut le surnom de "Mauriac britannique".

Pendant la guerre, il devient "l'honorable correspondant" des services secrets britanniques à Freetown (Sierra Leone), poste qu'il trouve terriblement ennuyeux mais qui l'inspire pour ses romans d'espionnage.

Revenu à Londres, il continue de travailler pour les services secrets, notamment sous l'autorité de Kim Philby, qui fera défection pour l'Union soviétique mais dont il est resté toujours l'ami.

L'écrivain aux yeux bleus très clairs s'était installé dans le sud de la France, à Antibes, en 1967, puis en Suisse, à Corseaux, où se trouve sa tombe.

vendredi 1 octobre 2004, AFP .