Avec ses tirages monstres, "Da Vinci Code", polar ésotérico-religieux de l'Américain Dan Brown, est devenu le nouveau Graal de l'édition en France, où il caracole en tête des ventes depuis quatre mois.

Tiré à huit millions d'exemplaires dans le monde -- dont 6 aux Etats-Unis et 2 dans une quarantaine de pays --, ce pavé de 574 pages (22 euros), publié au printemps par les éditions J.C Lattès s'est déjà vendu à 380.000 exemplaires dans l'Hexagone.

Le fait que l'essentiel de cette intrigue rocambolesque -- en forme de jeu de piste émaillé de meurtres, sur fond de sociétés secrètes -- se déroule en France -- notamment au Musée du Louvre -- devrait encore accroître son succès.

Chez son éditeur, on note une "forte augmentation des ventes depuis le début de l'été". "Certains l'ont surnommé le +Harry Potter des adultes+, note Laurent Laffont, mais +Da Vinci Code+ séduit de plus en plus d'adolescents".

L'ouvrage, qui devrait être porté prochainement à l'écran, avec Russel Crowe dans le rôle principal, paraîtra en format de poche au printemps prochain.

Dans "Da Vinci Code", tout commence au Louvre dans la Grande Galerie de l'aile Denon, consacrée à la peinture italienne, où l'on découvre un soir le cadavre nu du conservateur en chef du département des peintures, tué par un moine albinos.

Or la victime était un des grands maîtres du Prieuré de Sion, improbable société secrète, adoratrice de Marie-Madeleine et détentrice de documents susceptibles de remettre en cause certains dogmes des pères de l'Eglise.

D'où une quête effrénée du Graal et une lutte à mort entre les membres les plus traditionalistes de l'Opus Dei défendant une lecture stricte des Ecritures et les adeptes du Prieuré de Sion, prêts à d'étranges révélations.

La plus stupéfiante étant que Marie-Madeleine et Jésus, tous deux issus de sang royal, furent mariés et eurent une descendance. Léonard de Vinci, qui aurait appartenu à la confrérie en question, aurait truffé ses peintures d'indices en ce sens, et notamment "La Cène" à Milan.

Si les ingrédients de Dan Brown empruntent à d'autres ouvrages, sa manière de les accommoder -- en dosant histoire de l'art, ésotérisme et suspense -- a fait recette. Anagrammes, culte d'Isis, rites initiatiques sexuels, séquences chiffrées, mortifications, courses-poursuites, assassinats, rien n'y manque.

Un bon filon pour les voyagistes américains qui organisent des visites en petits groupes au Louvre, moyennant 110 € par personne. Sur le thème "décrypter le Code da Vinci", Ellen McBreen de Paris Muse a déjà dépêché plus de 300 visiteurs au musée, sous la houlette de six guides.

D'autres organisent depuis les Etats-Unis -- et pour 2.299 dollars -- un circuit de 8 jours en Europe sur les traces de Robert Langdon, un des héros du livre. Certains voulaient baptiser de son nom une des chambres du Ritz à Paris, mais l'hôtel n'a pas donné suite.

Tous les jours, les "vincimaniaques" échangent leurs points de vue sur la réalité et la fiction du récit. "Y a-t-il réellement une herse dans la grande galerie du Louvre?" (la réponde est non). "La Vierge aux Rochers" peut-elle être éventrée d'un coup de genou? (la réponse est également non, car il ne s'agit pas d'une toile, mais d'un panneau en bois).

Le dernier avatar de ce livre-graal est la parution prochaine d'un guide intitulé "Le Code da Vinci décrypté" (Ed. Le Pré aux Clercs). L'auteur, Simon Cox, rédacteur en chef d'un magazine consacré à l'étude des dogmes et demi-vérités, s'adresse à "tous les fans du Da Vinci Code qui cherchent des réponses aux inquiétantes questions posées par ce best-seller".

vendredi 20 août 2004, AFP.