Le danseur et chorégraphe espagnol Antonio Gades est décédé mardi à Madrid à l'âge de 67 ans des suites d'un cancer, ont annoncé les médias espagnols en citant la famille du danseur.

Grande figure du flamenco, Antonio Esteve Rodenas, dit "Antonio Gades" était hospitalisé depuis plusieurs semaines à l'hôpital Gregorio Maranon de Madrid.

Danseur reconnu dans le milieu flamenco dès les années 1960, il était devenu mondialement célèbre grâce notamment aux films de Carlos Saura dont il a souvent été le héros et notamment dans "Noces de Sang" (1981), "Carmen" (1983) ou "Amor Brujo" (1986) sa dernière oeuvre au cinéma.

"Je ne sais pas ce que je suis, mais je sais que je suis un travailleur, un travailleur en profondeur", affirmait Antonio Gades.

Issu d'une famille très modeste d'Elda près d'Alicante, Antonio Esteve Rodenas commence à travailler dès l'âge de 11 ans, exerçant de petits métiers avant de découvrir la danse lors d'une tournée de Pilar Lopez, danseuse et chorégraphe, considérée comme une des maîtresses du flamenco à travers l'histoire. C'est elle qui le baptise "Gades".

Après l'avoir admirée, le jeune danseur la rejoint, puis la quitte pour danser de ses propres ailes dès le début des années 1960. Doué, travailleur et méticuleux, Gades brûle les planches pour devenir une des références de la danse, créant déjà ses propres chorégraphies.

Et en 1963, il tourne avec le cinéaste catalan Francisco Rovira Beleta et l'auteur Alfredo Manas "La historia de Los Tarantos", genre de "Roméo et Juliette" dansé et filmé.

Le succès est au rendez-vous et Gades est appelé aux quatre coins de la planète et notamment à la Scala de Milan et à New York. Il joue même aux côtés de Gene Tierney dans "The Pleasure Seekers" de Jean Negulesco en 1964.

Toutefois, revenu en Espagne, ce militant anti-franquiste, communiste convaincu, essuie quelques revers avec ses ballets. Mais il se relance avec une chorégraphie qui fait date: "Amor brujo", son oeuvre majeure, qu'il montre à travers le monde et fait porter une première fois à l'écran avec son complice Rovira Beleta (1967).

Le succès ne devait plus le quitter, et Gades enchaîne des tournées qui l'emmènent de l'Amérique du Sud à l'Asie, de l'Afrique à l'Europe, de l'Espagne à l'Amérique du nord en passant par Cuba, pays dont il sera un admirateur fervent jusqu'à sa mort.

Mais après avoir écrit "Noces de sang" en 1974 à partir de l'oeuvre de Federico Garcia Lorca, il annonce sa retraite et dissout en 1975 la compagnie qu'il avait fondée en 1961. Il remonte occasionnellement sur les planches avant d'accepter en 1978, trois ans après la mort du général Francisco Franco, de diriger le Ballet national espagnol.

Au début des années 1980, il quitte le Ballet national et rencontre Carlos Saura, qui transforme le danseur reconnu en star mondiale en filmant ses chorégraphies et prestations dans les films "Noces de Sang" (1981), "Carmen" (1983) et un remake de "Amor Brujo" (1986), sa dernière oeuvre au cinéma.

Multipliant les tournées à travers le monde, couvert de prix et de distinctions en tous genres, Gades avait décidé de prendre à nouveau sa retraite en 1995 pour se consacrer à la formation. Il était malade depuis plusieurs années.

Sa mort laisse aujourd'hui un art orphelin, et comme le souligne la danseuse Sara Baras, "personne qui danse aujourd'hui ne peut dire qu'il n'a rien appris de lui".

mardi 20 juillet 2004, AFP.