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■ L'hiver
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- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - 2020-03-05 | |
Illustration R.Reumond. Le rafiot des médusés (2019).
« Ils sont venus, ils sont tous là , dès qu’ils ont entendu ce cri … » On va ensemble changer le monde ! Toutes ces rumeurs, c’est bien la foire d’empoigne, le remue-ménage et même le remue-méninges ; à coups d’ergots, ça se bat ; à coups de mots, ça cogite dans toutes les langues du Monde ; tous ces va-et-vient, ça dérange nos habitudes ; ça renverse nos grands principes et ça chamboule nos vies confortables, c’est-à -dire que ça nous donne les boules. C’est toujours comme ça, un débarquement ; paradoxalement, ça nous embarque toujours dans de nouvelles aventures, même si pour finir on s’habitue à tout, et qu’après quelques années tout nous semble normal, même qu’on y trouve de l’originalité, des avantages et même de nouvelles et de belles amitiés. Certes, au début, ça crée une certaine confusion, je dirais même un désordre certain ; ça chahute par-ci par-là , ça se bouscule sur les quais de gares et sur les débarcadères ; ça criaille dans la rue et ça trame dans les hémicycles, les familles et plus encore sur les médias ; au début c’est comme pour toute « Création » il y a toujours un certain tohu-bohu, les esprits s’échauffent sur les places et les plates-bandes ; la peur s’installe ; une certaine cacophonie règne de tous les côtés ; et c’est bien vrai qu’au début ça dérange, et que tout grand débarquement est en quelque sorte, un tout grand chambardement. Depuis mes ancêtres vikings, par ciel et par mer, la Normandie n’avait plus connu un tel débarquement d’étrangers. Ils y ont même donné le meilleur d’eux-mêmes, jusqu’à offrir leur propre vie, pour nous libérer de nos envahisseurs, bien sûr ; mais surtout, surtout, pour nous libérer de nous-mêmes, pour déranger quelque peu nos habitudes et bousculer notre éternel quotidien. C’est en quoi depuis ce jour J, le jour le plus long, chaque jour ressemble « étrangement » à un 6 juin 1944 (à remarquer que dans « étrangement », il y a étrange et étranger). Oui, ils sont déjà là , à nos frontières ou dans nos parcs, sur le pas de nos portes, à travers les médias et sur les réseaux sociaux. « Ils sont venus, ils sont tous là , dès qu’ils ont entendu ce cri … » Tous ensemble, on va changer le monde ! Qu’ils soient déjà là , qu’ils arrivent, ou qu'ils arriveront, ne dramatisons pas, n’en faisons pas notre business et encore moins un jeu ou un enjeu idéologique, politique, social, culturel ou religieux. Ils sont là , comme nous avons nous tous aussi été là en son temps, sans exception aucune, venu d’ailleurs pour un meilleur possible ; étranges étrangers parmi d’étranges étrangers. Notre ADN l’affirme et le confirme au présent d’un passé composé. Et comme en 44, comme hier, c’est manifeste, la résistance est toujours là , mais ce n’est plus du tout la même ! Sur nos côtes, des barricades se dressent, des drapeaux se hissent, des boucliers se lèvent et des discours s’élèvent… Mais heureusement que partout, des sourires se font avenants, des corps reçoivent d’autres corps fatigués, des cœurs, des mains et des portes s’ouvrent ; c’est comme si certains se souvenaient mieux que d’autres, de ce temps où ils étaient eux-mêmes harassés par la vie et en souffrance, en attente de bienvenue et de bonheur, en quête de travail ou d’une simple terre d’accueil. Migrants parmi de prétendus autochtones nous l’avons tous été, été comme hiver. Rien n’a changé et rien ne changera à ce niveau-là , c’est un éternel flux qui est celui de la vie en mouvement, d’Afrique en Asie, du Nord au Sud, qu’importe le sens (la direction), c’est le sens de la vie qui compte et pas la couleur des peaux. Et depuis nos plus anciens ancêtres préhominiens, c’est toujours la même grotte ou la même « Porte de l’Homme » qui s’ouvrent et qui accueillent ; c’est toujours les mêmes déplacements de population qui font en définitive, la belle et grande histoire de l’humanité. Il y eut des petites arrivées et des invasions intempestives ; des exils douloureux, de fâcheuses émigrations ou des immigrations plus ou moins volontaires, comme des déplacements déplacés, mais nécessaires… Et ainsi de suite, depuis la nuit des temps l’homme se déplace pour aller vers des ailleurs plus verts, où ce sont les mêmes bras qui se défont pour s’ouvrir davantage et brasser l’amour et la fraternité. Mais lors de ses rencontres, c’est aussi vrai que le premier réflexe, dans les deux sens, est de se mettre à l’abri de l’inconnu et de l’étrange ; de prendre garde, on ne sait jamais ! De réflexe de fermeture en action de prudence, ou même en réaction de protections, parfois violence … C’est ainsi depuis toujours, avant de mettre l’étranger sous son aile, nous préférons le mettre à distance ou de côté. Et avant toute intégration, il y a une part d’assimilation réciproque et une part de conflit, c’est-à -dire de danger et d’opportunité. Qu’ils soient déjà là ou pas encore, indubitablement, ils viennent ou viendront bien assez tôt, pour nous libérer de notre pire ennemi qui est « en nous-mêmes ». Et donc, avec sagesse et discernement, mettons des x à nos inconnus et arrêtons de leur chercher des poux, de leur faire des croches-genoux ou de leur lancer des cailloux ; car nous avons besoin d’eux comme de l’air que nous respirons tous. Il en fut ainsi depuis toujours et il en sera toujours ainsi, c’est la vie, son brassage et ses complexifications, et cessons une bonne fois pour toutes de chercher des « boucs émissaires », nous sommes bien assez grands et assez bêtes surtout pour faire nous-mêmes notre malheur (1). Comme Sisyphe roule avec peine son rocher, ils sont totalement innocents et déjà tellement ballottés par la vie ! Ils sont là , comme portés et emportés par le vortex de l’existence, pour nous débarrasser de toutes nos contradictions ; pour ouvrir en plus grand nos us et coutumes à l’innovation, et enrichir nos multiples traditions ; pour apporter leur particularisme comme on apporte sa pierre à l’édifice collectif ; c’est en quoi, chaque jour de libération et d’enrichissement ressemble « étrangement » à ce 6 juin 1944. C’est souvent ainsi pour tous les problèmes que nous rencontrons, comme pour tous ces symptômes et conflits sociaux que nous portons. Apprivoiser l’événement qui survient ou l’étrangeté qui nous arrive comme apparaît l’étranger avec son pauvre balluchon, c’est apprivoiser ses propres ombres, c’est ensemble accueillir et célébrer le changement ; c’est nous réconcilier avec ce qui est étrange et étranger en nous-mêmes ; moi-même, ni de gauche, ni de droite, je cherche cet essentiel entre nous qui n’est jamais dans les extrêmes, je cherche comme une quête du Graal, le plus juste milieu entre tous les extrêmes et extrémismes de tout bord, ceux qui se battent à mort pour plus d’avoir et d’avantages, et pour un peu plus de pouvoir croyant tout savoir des mystères de la vie. Quant à moi, pauvre Lutin (2) en perdition sur ce radeau de fortune et de fortunés, croyant encore au ciel, je crie « terre ! » pour ceux qui sont sans paroles ou pour ceux n’y croient plus... Fin de la première partie |
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