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Même avec un Nobel de littérature en poche, écrire reste un pis-aller !
prose [ ]
L’écriture est toujours de l’ordre du trait saignant, de la plaie à la cicatrice, ou du plat à la ride, du plein au vide, noir sur blanc, sur rien, dans la grande expansion des Univers.

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par [Reumond ]

2009-12-25  |     | 



« Le papier est là et je me soulage »



Dédicace :

À mon ami et coéquipier en cette randonnée au taux mots biles, Jacques Bernimolin, en voyage depuis, pour quelque nébuleuse.
Pour toutes ces heures, jours et mois que nous avons passés ensemble, Jacques, à converser sur nos cieux astraux, sur nos soucis, car nous en avions ; pour ces soirées trépassées à taquiner les mots aux jeux de nos paumes, et comme dans un duel mortel, nous lancer au cerveau des locutions nouvelles, tout épicées de folie, pour faire gerber les anges et exploser les électroencéphalogrammes des Académiciens, au gramme prêt.
Nous nous aimions tant, que de se jouer de nos bons mots était pour nous une manière et une matière de dire ce sacrement. En tandem, nous avons fait, et en parole seulement, le tour du Monde des psychotropes, des spiritualités et des états modifiés d’inconscience …, refaisant l’Univers au son d’un morceau de Django Reinhardt, si ma mémoire est bonne, l’enfant de Pont-à-Celles jouait « Nuage » et nous étions aux cieux. Il y avait avec nous deux, Saint Artaud et Saint Rimbaud , avec Corbière et Mallarmé, les douze étaient là, de Villon à Poe, avec tous les martyrs du souffle, toutes les victimes du trait, les suppliciés du porteplume ; avec les Rois Mages, les Saints, les Bergers, l’Ane et le bof ! C’était Noël avec Verlaine et Dieu lui-même qui était las d’écrire La Création avec la main de l’homme.
Il y avait aussi Nerval et Baudelaire, Lautréamont et le Grand Charles Cros ; en communion avec eux, pétés de leur Présence, nous refaisions toute une cosmogonie poétique, pleine de psychanalyses, de jazz, d’écriture et d’arts plastiques. Tout ça pour dire avec Flaubert, que le papier est là pour servir.
Peut-être partirais-je moi aussi emporté au vent par quelque hémorragie cérébrale, tellement que les mots et les maux vont ensemble, pour un dernier Tango, comme Django, me reposant de tout.




« Le papier est là et je me soulage » disait prosaïquement Flaubert dans son gueuloir.

Aux silos des heures, aux sillons des jours, la vie grave les aubes, gave les formes aux saillies des parchemins et se trace de nuit sans plus rien à attendre ; de ses faits et traits burinés, elle entaille, glyphe, graphe, gratte nos regards peu éveillés.

Vif-argent, eaux fortes, contemplation …,

Le verni protège peut-être, mais il ne permet pas d’être vraiment soi-même !

L’écriture est toujours de l’ordre du trait saignant, de la plaie à la cicatrice, ou du plat à la ride, du plein au vide, noir sur blanc, sur rien, dans la grande expansion des Univers.

Sept milliard d’années pour graver l’infini d’une empreinte, écrire un pet !

Pour écrire comme pour imprimer, on encre le papier ou la plaque, la rétine, selon, ensuite, pas à pas, on éponge, on essuie le champ gravé, là où l’encre ne reste qu’au fond des sillons, au fin fond des expériences.

Par la suite, le papier ira chercher l’encre dans les creux, les lieux clos, les régions encaissées, les zones détestables …, et plus la plaie est profonde, plus la taille sera concave, la lésion étrangère, plus le noir sera intense, dense comme le bois ou la pierre d’un calvaire, de la consistance même de la nuit obscure, selon Saint Jean de la Croix.

Si on grave en surface, sans consistance ni gravité, sans profondeur aucune selon les critères de la conviction , ou si on laisse trop peu l’acide nitrique attaquer le cuivre ou l’œil, là où le vernis a été enlevé à la fine pointe de l’âme, on obtiendra un triste gris, un regard terne.

Mais plus l’acide agresse le métal, piquant de profondeur comme le gel, l’abysse océanique, plus on obtiendra du noir au noir, et plus longtemps encore, pour parvenir à l’extrême du noir, à l’œuvre ultime au noir, à la limite même de la matière et de l’esprit, là où la lumière se divulgue, acidulée à souhait !
Flash ! Révélation, conversion, basculement total, ou tout ce que j’avais mis en poèmes, en prose, en œuvre, en forme …, bascule du négatif au positif, en un cliché panoramique où l’extrême touche son opposé dans un éclair insondable.

La preuve que l’épreuve du gueuloir n’est que la preuve d’un dégueuloir ! Écrire ne sert à rien, c’est un pis à mots, un pis-aller, un urinoir, un exutoire …, c’est toute la profondeur de l’écriture, de l’égratignure qui fait la gravure de la profondeur même de l’être !

Crier et s’écrire d’adverbes et de conjonctions, dégueuler à bouches pleines, dégobiller la bile à gerber les mots à pleines dents ..., Liège sent la vomissure du petit matin à la commissure du ciel et de la terre.
Rue Douffet, à Liège, le soleil se lève à l'ouest des jeux de gros mots, trop gros pour être malhonnêtes. Entre « la perte totale » et « la grâce totale », entre le don de soi et l’image de soi, il y a la distance que se fait et s’écrit : « absolue ».

J’aurais beau lire à pleine voix mes poèmes et mes œuvres, être réaliste comme le Maître, et tout préoccupé d'esthétisme et d'élaborations savantes, si l’amour ne coule pas dans mes veines et le don de moi-même dans les branches de l’arbre, je ne suis rien qu’un point d’interrogation au bout d’une ligne.
J’aurais beau dire les mots les plus beaux, praliner le verbe à l’excès, utiliser les adjectifs les plus remarquables, si je n’ai pas la paix, la joie de vivre, l’amour à perdre, je ne suis rien que deux points superflus attendant l’inutile.

J’aurais beau écrire l’amour, si je ne suis pas amour, je ne suis que mot gras à langueur d’italiques et de majuscules stériles. Si je n’ai pas l’amour, si je ne mue pas, si je ne change pas de voie, si je ne mets pas mes paris en bouteille et mes défis en pratique, je ne suis rien qu’un homme de Lettres, mais pas encore un homme de l’Être.

De je à Tu, si tu ne fais pas du SUJET, si tu ne fait croître la conscience de la matière et celle de l’humanité, dans l’unicité et l’utilité de chacun de ses membres, si je n’aime pas l’amour, même avec un porteplume en or à la main, je ne suis rien qu’une virgule attitrée, un infructueux point, virgule.

Si l’esprit de la lettre n’est pas l’Esprit de l’Être ; si je ne fais pas l’amour au Cosmos tout entier, ma foi reste vaine et vide comme un chapitre sans lettres. Même avec un Nobel de littérature en poche, écrire, reste un pis-aller ! J’aurais beau réussir tous les Goncourt, obtenir à tout prix tous les prix et toute la reconnaissance du Grand Monde, si je ne vois pas au-delà des apparences, si je ne sais écrire et pardonner entre les lignes, jusqu’au derrière des mots, je ne suis rien, rien qu’une suite de mots.

Car les vrais mots nous conduisent mystérieusement au port des écrits, lac d’encres ancrées aux papiers miroitants d’encres vives, au-delà de toutes les conjugaisons et de toutes les espérances.

Tout besoin de lire ou d’écrire est toujours du domaine de la captation, du désir de prendre, d’attirer à soi, une tromperie en sorte ! Un prélèvement d’attention et d’intention ; écrire c’est s’approprier les mots comme dans une prise de parole, une saisie, dont le laquais est toujours huissier d’injustice, serviteur d’une parole prise de pouvoir et apprise d’avoir. Écrire est en cela un aveu d’avoir et donc toujours une forme de concupiscence !

Ce qui est ici devant mes yeux, entre mes mains, dans ma tête …, doit passer par le filtre de l’amour désintéressé, à l’intérieur, pour vivre cœur à cœur, par le chemin du dépouillement, de la désappropriation, et seul l’esprit peut opérer ce déplacement, de changement de lieu, du lieu de l’égo à celui de l’altérité.

Cela semble difficile, car l’homme a constamment besoin de se raccrocher physiquement à quelque chose, à quelqu’un, à des mots, des idées, des rêves, des traits qui l’enracinent et l’incarnent. C’est une manière pour lui de matérialiser le réel, de le rendre palpable et sensible.

Que d’écrits vains à même nos veines nouées, d’inutiles ouvrages aux creux des librairies ; que de futiles fuites dans l’écriture. Insignifiance des ronds de la pensée comme des pets dans l’eau. Mais que de cris profonds, fondés dans tous les recoins de l’homme et à tous les coins de la Terre ; des coups d’épée dans l’os, des cris de faims, d’injustices et de souffrances nues, crues et vives.

Que de cris comme des coups d’essai dans l’épaisseur des jours et de gros maux qui savent leur chemin par corps. Entre les deux, jeter des ponts, faire du lien avec des liens équitables, tenter l’amour en s’écriant : « Aimons » et en s’écrivant, nu, cru et vif : Amour.

Entre je et Tu, si tes mots ne sont pas d’essence divine, c’est-à-dire vraiment humains ; si ton texte n’exprime pas le cri de l’humanité tout entière, tout texte est vain et donc tout reste vain.

Dans ce sens, devenir présence réelle à la parole, écrire devient pour l’homme un rituel, tel un sacrement fait d’encre et de mots, sur l’enclos, aux champs d’une feuille ou d’un support quelconque, pour enclore les paroles d’un cadre, d’une marge qui le rassure ; l’écriture est une doudou !

Pour rendre réel ce sacrement de l’écriture, il lui faut trois choses : une matière, une forme et un valet. La matière est la chose sensible qu’on emploie pour écrire : comme l’eau, l’huile et le baume, le rituel nécessite l’encre, appelle la sueur et draine le sang.

La « forme » consiste dans les paroles qu’on prononce pour les faire. Le valet est le ministre du sacrement, ils se nomment « Poètes », pouet , pouet !

Une homme à topée, topique atypique, évoquant le couinement du porteplume sur l’enclume des académismes ; pouet , pouet ! Tels les jouets des écrits vains, se jouant des écrits.

Le laquais rédige, note, dénote, fait, rature, signe, confère, consacre, consigne le sacrement d’écrire comme sacrement du Verbe.

Le rituel de l’écriture devrait permettre de passer de la tête au cœur, du mirage au miracle, c’est-à-dire de la rage et de l’illusion à la pleine vision. Mais ça, c’est de la théorie ! dans la pratique le poète est toujours « en décrochage scalaire » (du latin scalaris, scalæ : escalier), perpétuellement au pied de l’échelle, de ciel, de l’escalier, de la scala santa, qu’il monte les genoux écorchés vifs, les doigts crispés de douleur …, Sisyphe pèlerin, le Bic à la main.

Quand même j’aurais tous les dons littéraires et que je connaîtrais par cœur tous les mystères de la littérature et toutes les sciences, si je ne suis pas une totale rature, si je n’ai pas cette relation de sujet à sujet, je ne suis rien qu’un objet périssable, qu’un étron couronné de lauriers, et cela ne me sert à rien !
Je ne serais plus que vers qui riment, qui rythme …, comme retentit le glas criard, désespérant, dans le silence glacé d’un grand champ de betteraves du pays Hesbignons. Cela ne me sert plus à rien !

Entre muse et mue, il y a une fine convivialité : il y a « possession » quand les muses m’usent, et un subtil dépouillement (une dépossession) quand la muse mue. C’est quand meurent les clowns et les poètes, quand les rires, les rimes et les écrits ne sont plus que dépouilles laissées là à l’abandon, telles des peaux rejetées par l’animal, l’homme commun, qu’il y a désappropriation.

Au bout du rouleau, on peut dire que les sans-papiers sont en grande souffrance, au même titre que les sans homicide fixe, les poètes fous demandeurs d’asile. Entre nous il n’y a pas de lézard ! L’écriture ne serait-elle qu’un en-cas ontologique (jambon), métaphysique (fromage) ou existentiel (fromage jambon) ? Qui permet de se débarrasser de quelques angoisses, besoins ou envie … ?

Le passage obligé, l’état de mue, de transformation de l’âme et du corps que les spirituels appellent la métanoïa, ne serait-il que le passage d’une écriture accaparante au dépouillement total de l’écriture ; comme un abandon progressif de soi-même au seuil de Soi, un transfert de l’induvie à l’exuvie de l’écriture, peau de parchemin (…).


L’infini est mité, muselé, et l’éternité mythée, il ne reste plus que l’Amour !

Entre je et Tu, et sur ce, en cette fête de Noël 2009, je te souhaite une bonne éternité !
En attendant de te lire ou mieux encore de te revoir ; comme on le dit chez nous, à très bientôt Jacques, ou surtout à tantôt.

Roland

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